Cette histoire débute en 1889. Chlomo et son fils de 6 ans, Pin’has, commencent à construire leur Soucca dans la joie et la bonne humeur. A chaque fois qu’une Mitsva se présente, Chlomo s’efforce toujours de faire participer son fils afin qu’il grandisse avec l’amour de la Torah.

Le petit Pin’has est très beau et a de nombreuses qualités, à un tel point que dans son village, toutes les mamans juives se bénissaient mutuellement d’avoir le mérite d’enfanter un enfant comme Pin’has. Mais de son côté, le prêtre du village se disait :

- Quel dommage qu’un tel enfant grandisse en tant que juif !

Deux jours plus tard, nous sommes en plein après-midi du premier jour de la fête de Souccot. Chlomo est à la synagogue pour y écouter les cours du Rav de la ville, tandis que la mère de Pin’has est occupée à la cuisine. De son côté, le jeune garçon va jouer dans la Soucca avec son Etrog, lorsque tout à coup, un étranger arrive en criant à Pin’has :

- Viens avec moi, ton père t’appelle ! 

Effrayé par l’allure agressive de cet étranger, Pin’has commence à pleurer, mais l’homme se jette sur lui en lui bâillonnant la bouche et l’emmène de force jusqu’au carrosse qui l’attend sur la route, dans lequel se trouve… le prêtre du village (malheureusement, à cette époque, ce genre d’enlèvement était fréquent).

En rentrant à la maison, Chlomo demande à sa femme :

- Où est Pin’has ? 

Elle lui répond :

- Il doit être dans la Soucca, je l’ai entendu jouer là-bas tout à l’heure.

Mais Chlomo ne trouve que du désordre dans la Soucca, ce qui lui laisse un mauvais pressentiment. Les parents partent immédiatement à la recherche de Pin’has, mais il reste introuvable. Une heure passe, deux heures, trois heures, mais toujours aucun signe de leur fils. La joie de la fête de Souccot se transforme alors en véritable drame pour tous les habitants du village.

Le lendemain matin, Chlomo se rend dans le village voisin où habite son Rav et lui confie sa peine. Après l’avoir écouté, le Rav lui dit :

- Sois fort et ne perds pas ta foi en D.ieu. Sois certain qu’Hachem te rendra ton fils bien aimé. Efforce-toi de toujours respecter très méticuleusement la Mitsva du Etrog pendant Souccot quoi qu’il en coûte, et ne crains pas de dépenser ce qu’il faut pour son achat. Sache que c’est par le mérite du Etrog que tu retrouveras ton fils !

25 ans plus tard, en 1 914, la Première Guerre mondiale commence. Quelques jours avant la fête de Souccot de cette même année, les autorités russes mettent en place un couvre-feu interdisant les juifs de sortir de leur village, sous peine d’être très sévèrement puni. Chlomo est extrêmement peiné et anxieux : comment va-t-il se procurer un Etrog pour la fête ?

Une fois la nuit tombée, Chlomo décide, malgré l’interdiction, de sortir des limites du village afin de se rendre en ville pour y acheter un Etrog. Après tout, son Rav lui a bien dit de tout faire pour se procurer un Etrog pour la fête, et que par ce mérite, il retrouverait son cher Pin’has.

Quelques heures plus tard, Chlomo parvient finalement à acheter un Etrog, mais au retour, alors qu’il repasse la frontière du village, deux soldats russes l’attrapent et lui demandent :

- Qu’y a-t-il dans cette boite ?

Chlomo répond timidement :

- Juste un Etrog, un cédrat pour la fête de Souccot...

Mais les soldats ne le croient pas :

- Qui nous dit que tu ne caches pas de la dynamite ? Viens immédiatement avec nous, notre général s’occupera de ton cas !

Chlomo est donc conduit jusqu’au bureau du général qui commence son interrogatoire :

- Juif ! Que caches-tu dans cette boite ?

Chlomo ose à peine répondre :

- Un simple cédrat en l’honneur de la fête de Souccot, on appelle cela un Etrog.

En entendant cela, le général ouvre de grands yeux et dit :

- Un Etrog… Un Etrog ?! Montre-le moi, je dois le voir !

Chlomo obéit. C’est alors qu’en voyant le Etrog, le général devient blême et ses mains commencent à trembler. Il prend le Etrog entre ses mains et se met à le contempler puis à le sentir, comme s’il cherchait quelque chose. Après un long moment, le général demande à Chlomo :

- Dis-moi, juif, as-tu des enfants ?

En entendant cette question, Chlomo retient ses larmes et ne parvient pas un sortir un seul mot de sa bouche. Le général remarque sa peine, mais il continue de le fixer en attendant sa réponse. Finalement, Chlomo prend une grande inspiration et lui répond :

- J’avais un petit garçon adorable et très intelligent que des étrangers ont kidnappé. Dans trois jours, cela fera exactement 25 ans qu’il a disparu…

Le général lui demande alors :

- Et comment s’appelait l’enfant ?

Chlomo répond :

- Pin’has !

En entendant ce prénom, le général tombe de sa chaise et manque de s’évanouir. Il se relève lentement et se met à crier :

- Pin’has… Pin’has !!

Chlomo ne comprend rien à ce qui se déroule devant lui. C’est tout ce qui lui manque : on va maintenant l’accuser d’avoir causé un malaise au général…

Après s’être remis de ses émotions, le général tend la main vers Chlomo et lui dit :

- C’est moi Pin’has ! Vous êtes mon cher papa !

Chlomo n’en revient pas :

-  Pin’has ? Mon fils ?

L’odeur du Etrog avait réveillé la mémoire de Pin’has. Il se souvenait de tout à présent : leur belle Soucca, l’ambiance joyeuse de la fête, la synagogue où il aimait tant accompagner son père etc.

Difficile de décrire l’émotion de Chlomo et de son fils à ce moment-là. Hachem les avait enfin réunis après tant d’années de séparation. Lorsque Pin’has annonce à son père son désir de pratiquer à nouveau la Torah et les Mitsvot, la joie de Chlomo est à son comble.

Pin’has raconte ensuite ce qui s’est passé après son enlèvement : on l’a conduit chez un riche homme russe qui l’a élevé et éduqué. Avec le temps, les souvenirs de son enfance ont complètement disparu. Cet homme riche l’a destiné à une carrière de soldat qu’il a brillamment réussie, jusqu’à devenir général. Jusqu’au jour où l’odeur du Etrog de son père lui a fait retrouver sa mémoire…