Lors de mon dernier voyage en Israël l’été dernier, on me confia que l’armée israélienne avait besoin de Sifré Torah (rouleaux de la Torah). J’y réfléchis sérieusement - je souhaitais ardemment offrir un Séfer Torah aux forces de l’armée israélienne, car c’est notre défense, notre arme la plus puissante. J’abordai le sujet avec ma famille, et ils tombèrent tous d’accord que nous devrions offrir un Séfer Torah en souvenir de nos parents et grands-parents bien-aimés, le Gaon Rav Avraham Halévi Jungreis et la Rabbanite Miriam Jungreis, qui ont consacré leur vie au service du ‘Am Israël, du peuple juif. A Szeged, Hongrie, où mon père occupait le poste de grand-rabbin orthodoxe, mes parents avaient offert l’hospitalité et prodigué des soins à un grand nombre de jeunes hommes juifs astreints à des travaux forcés par les zsandars hongrois ; plus tard, lorsque les Nazis construisirent le ghetto, mes parents accueillirent chaleureusement, dans notre petit appartement, des dizaines de réfugiés des shtetls voisins. Lorsque nous fûmes déportés au camp de concentration de Bergen Belsen, mes parents adoptèrent un groupe d’adolescents orphelins polonais qui avaient assisté à l’exécution de leurs parents ; après la guerre, dans le camp des personnes déplacées en Suisse, mon père célébrait le Chabbath et prodiguait un enseignement à ces jeunes garçons, tandis que ma mère s’était portée volontaire à la cuisine afin de pouvoir offrir un petit extra à ces âmes brisées et misérables.

A notre arrivée aux Etats-Unis, mes parents créèrent une Yéchiva pour accueillir ces enfants qui auraient autrement fréquenté l’école publique, et leur travail en faveur des autres se poursuivit. Toute leur vie était focalisée sur le dévouement, le sacrifice et l’amour pour le peuple juif. Il ne pouvait y avoir de manière plus appropriée d’honorer leur sainte mémoire que d’offrir une Torah à l’armée israélienne.

Tout est Basherte, prédestiné. Mon livre, Une vie engagée, a été traduit en hébreu et publié par Opus Press à Tel Aviv. Avec l’aide de D.ieu, le 20 décembre, je dois le présenter en Erets Israël, et quel bon timing, pensais-je, pour offrir le Séfer Torah à l’armée.

Mon gendre, Rav Chlomo Gertzulin, devait voyager cette semaine-là en Israël. Je lui ai demandé s’il pouvait emporter le Séfer Torah avec lui de sorte qu’à mon arrivée en décembre, le Séfer Torah y serait déjà, prêt, attendant d’être offert. Ceux qui ont pris l’avion récemment savent que la sécurité des aéroports est devenue très sévère ; à chaque aéroport, on trouve des hommes armés de garde - c’est normal. Lorsque mon gendre enregistra ses bagages à l’aéroport JFK en portant le Séfer Torah emballé dans un Talith, les soldats refusèrent de le laisser passer. Ils prirent le Ets ‘Haïm, les chevilles en bois sur le rouleau comme des armes potentielles, et voulurent démanteler le Séfer Torah pour qu’il passe par l’appareil de radioscopie - ce que, bien sûr, Rav Chlomo refusa catégoriquement. Une longue discussion s’ensuivit, mais les soldats n’en démordaient pas. Le fiasco à l’aéroport de Chicago quelques jours auparavant avait ébranlé tout le monde et ils étaient extrêmement vigilants. Et puis, comme surgi de nulle part, le pilote d’El Al apparut soudain.

« Je prendrai moi-même ce Séfer Torah », annonça-t-il aux soldats. « Ce Séfer Torah est notre Chomer, notre gardien, notre protecteur… Il ne va pas voyager à l’arrière. Je vais le placer dans le cockpit à côté de moi pour qu’il nous protège pendant notre voyage ! » Et sur ces mots, le pilote partit, portant affectueusement le Séfer Torah dans ses bras, comme un bébé. J’ignore ce qu’ont été vos expériences avec le terminal d’El Al, mais depuis trente ans que je voyage avec El Al, je n’ai jamais vu de pilote lorsque j’enregistre mes bagages… Or, il était là, surgi de nulle part, juste au bon moment ! Puis pensez au fait que les pilotes israéliens sont réputés pour être laïcs, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils n’admirent pas particulièrement le mode de vie de la Torah. Or, ce fut avec une grande déférence, beaucoup de respect et d’amour que le pilote avait embrassé le Séfer Torah et annoncé aux soldats américains qu’il était notre gardien. Je ne pus m’empêcher de penser que tout fût prédestiné, et je suis convaincue que mes parents bien-aimés, qui devaient observer la scène d’en-haut, ont également adopté ce pilote.

Ma petite-fille Rivki, qui étudie à Jérusalem, est venue à l’aéroport avec son cousin pour faire une surprise à son père. Toute excitée, elle appela sa mère (ma fille ‘Haya Sort) à New York sur son portable. « Maman, tu ne sais pas ce qui se passe ici !, dit-elle. Papa est sorti du terminal avec le Séfer Torah dans les bras et tous les chauffeurs de taxi et tous les gens dans la salle d’attente se sont rués vers le Séfer Torah. Ils voulaient tous l’embrasser, lui faire honneur. C’était si beau. Ensuite, les chauffeurs de taxi se sont disputés l’honneur de conduire le Séfer Torah à Jérusalem! »

Dès qu’elle eut raccroché, ‘Haya Sort me téléphona, toute émue. « Cela n’a lieu qu’en Erets Israël ! », s’exclama-t-elle. Comme elle avait raison ! Je pensais qu’il était important de vous raconter cette histoire, car on entend tant d’histoires négatives sur ceux qui rejettent les valeurs de la Torah. Et nous avons ici une preuve que l’étincelle juive, cette Pintele Yid qui se trouve enfouie dans chaque âme juive, est vibrante et bien présente.

Avec l’aide de D.ieu, lorsque je vais offrir ce Séfer Torah à l’armée, je relaterai à nouveau cette histoire, je vais également la raconter à la radio et à la télévision israélienne, car les propos du pilote sont un message au Klal Israël, à notre peuple : « La Torah est notre Chomer, notre gardienne, notre guide, et si nous formons un avec la Torah, la peur n’a plus lieu d’être, car D.ieu sera avec nous. » Comme le roi David l’a dit : « Que les unes (les nations du monde) se fient aux chars, les autres aux chevaux, nous nous réclamons, nous, du nom de l’Eternel, notre D.ieu. » En cette période critique, le message doit être entendu par chaque Juif. La Torah est notre gardienne et notre guide.