Question d'une internaute : « Il y a 3 ans, mon mari s'est retrouvé au chômage et il n'a pas retrouvé de travail depuis... Du coup, il passe son temps à dormir ; l'après-midi, il joue aux cartes avec ses copains ou au PMU pendant que moi je travaille d'arrache-pied pour joindre les deux bouts. Évidemment, je ne peux pas me permettre d'avoir une femme de ménage, donc je me retrouve à faire du ménage tandis que lui, ne lève pas un verre... Le pire, c'est qu'il donne un mauvais exemple à nos enfants. Ils n'ont plus aucun respect pour leur père qui dort quand ils partent à l'école et qui fume sur notre balcon le soir pendant que nous sommes à table et que j'essaye de mettre une "bonne atmosphère" à la maison. Je n'en peux plus, je suis épuisée et toute cette situation me mène à le mépriser voire le détester à certains moments. »

La réponse de Mme Nathalie Seyman :

Avant toute chose, j’ai envie de vous dire que vous être très courageuse. D’un côté, vous faites beaucoup d’efforts pour sauver votre couple et sauvegarder l’harmonie familiale et de l’autre, vous soutenez depuis des années votre mari qui traverse un moment difficile de sa vie. Il est indéniable que la vie à deux est un partenariat basé sur l’amour, le partage et les concessions. Mais que faire lorsque l’un des deux partenaires ne joue plus son rôle ? Partir ou subir ? Et si l’on tentait la solution alternative : comprendre pour guérir ? Essayons d’analyser ensemble le comportement de votre époux.

Les dommages du chômage

Je n’ai pas tous les éléments de votre histoire, mais je crois comprendre que votre mari n’avait pas du tout le même comportement avant de se retrouver au chômage et que tout se passait bien dans la famille. Le chômage a donc eu sur lui des répercussions qui l’ont amené à devoir se comporter ainsi pour se protéger psychiquement.  

Comment un homme vit-il le fait de se retrouver au chômage ?

- Le sentiment d’être un mauvais mari : Surtout aujourd’hui au sein de cette société de consommation, les hommes ressentent encore plus la pression sociale de devoir assurer le confort matériel à leur famille. Le fait de ne plus pouvoir y parvenir, de voir sa femme seule aux commandes du budget et d’être la cause d’une insécurité financière l’amène à penser qu’il n’est plus légitime dans son rôle d’époux. Ce qui le conduit à des comportements en accord avec sa conclusion : puisque ma femme va penser que je ne suis pas un bon époux alors autant ne plus me comporter comme un bon époux. Il s’agit un mécanisme de défense : pour ne pas se faire rejeter pour un fait qu’il n’a pas choisi, il préfèrera se faire rejeter pour ses propres actions. C’est une façon de reprendre le contrôle de sa vie.

- Le sentiment d’être un mauvais père. Comment être à la hauteur des attentes de ses enfants lorsque l’on se retrouve sans travail, à la maison ? Pas simple de s’autoriser une autorité lorsqu’on ne se sent pas en harmonie avec soi-même et que l’on ne se sent pas fier de soi.

- Un sentiment de dévalorisation général : Il se sent vulnérable, inférieur aux autres et il en a honte. Pour éviter le risque d’être de nouveau rejeté, il ne cherche pas un autre emploi. Il préfère rester dans sa zone de confort, moins risqué pour son équilibre psychique. Mais ce qu’il ne comprend pas, c’est qu’il est ainsi entré dans un cercle vicieux et qu’il aura besoin de beaucoup de volonté et d’aide pour s’en sortir.

- Un sentiment de solitude : en se refermant sur lui-même, il s’isole, se sent incompris et rejeté, alors il rejette à son tour.

Tous ces sentiments le tirent petit à petit vers la dépression et la seule façon qu’il a trouvée pour se protéger, ce sont les comportements aberrants que vous observez.

Besoin de revalorisation

En perdant son travail, votre mari semble avoir donc perdu tous ses repères. Sans doute que, dans son histoire personnelle, un homme se doit d’être fort, de subvenir aux besoins de sa famille, d’assurer sur tous les points. Il s’est déçu lui-même, a perdu confiance en lui. Il n’arrive plus à se relever. Mais, du fait de son attitude, il ternit l’image que vous avez de lui. Cependant un homme se voit à travers les yeux de sa femme, et aujourd’hui il se voit donc tel que vous le regardez : un bon à rien.

Et c’est encore une fois un cercle vicieux. Il a donc impérativement besoin d’aide. De votre présence aimante et valorisante bien entendu, mais aussi de l’aide d’un spécialiste (thérapeute, coach) qui pourra travailler avec lui à comprendre pourquoi la perte de son travail l’a déstabilisé au point de ne plus avoir goût à la vie et de risquer de perdre encore plus en mettant son couple et sa famille en danger. Il a besoin de concevoir que des jours meilleurs sont possibles, de se remettre en mouvement et de reprendre espoir.

Il faut parvenir à lui montrer une autre vision du chômage : celle d’une belle opportunité pour se renouveler et réaliser ce que l’on n’a jamais oser réaliser faute de temps ou simplement par peur de prendre des risques. Le mot « chômage » a une connotation trop négative car il est associé aux termes « sans emploi », « assisté » ou « difficultés financières ». Il faut donc bannir ces mots de votre vocabulaire et changer l’optique de votre mari en utilisant plutôt les mots « en transition », « en reconversion », « en recherche », etc.

Il faut également l’empêcher de se poser en victime. Il doit se retrouver aux commandes de sa vie. Il faut lui créer un cercle vertueux. Oubliez le « comment faire pour retrouver du travail ? », mais cherchez plutôt le « Qu’as-tu envie de faire dans la vie ? » Une infinité de possibilités lui sont offertes. Car c’est en retrouvant l’envie qu’il trouvera le moyen d’y arriver. Sans cela, il ne saura pas par quel bout commencer et restera perdu dans son cercle vicieux.

Mes conseils

Aujourd’hui, il semble que vous meniez deux combats en même temps : relever votre mari et sauver votre couple. Or il faut choisir ses combats. Sauver votre couple doit être votre priorité et se relever doit être la sienne. Quoiqu’il en soit, vous ne pourrez rien faire sans sa volonté de s’en sortir.

- Une discussion sérieuse s’impose : vous vous sentez impuissante car le mal-être qui ronge votre mari est un combat personnel. Vous allez l’aider évidemment à s’en sortir, mais pour cela vous devez être soudés. Donc il va falloir initier un dialogue. Pas à l’occasion d’une dispute ni au milieu des enfants. Il faut créer une ambiance propice à la confidence : un dîner à deux, en tête-à-tête, sans parasites extérieurs (comme le téléphone, par exemple).

- Exprimez-lui ce que vous ressentez : votre colère envers lui est légitime et vous devez lui en parler. Il a besoin d’entendre vos sentiments envers cette situation et son comportement pour réagir. Évitez les mots à charge ou accusateurs mais parlez plutôt de ce que vous ressentez : votre inquiétude de le voir si peu réagir par rapport à vous qui prenez toute la famille en charge pour deux. Comme s’il ne tenait pas assez à vous pour y parvenir. Alors que, certainement, il n’est juste pas en mesure de pouvoir le faire actuellement.

- Revalorisez-le ! Vous avez perdu beaucoup de votre estime pour lui et c’est normal. Mais si vous l’avez épousé, c’est que vous savez combien c’est un homme bien. Écrivez une liste des raisons pour lesquelles vous vous êtes mariée avec lui, avec toutes les qualités que vous admiriez chez lui. Cela vous aidera à vous focaliser sur ce qu’il y a de positif en lui. Et vous pourriez même lui montrer cette liste afin d’éclairer quelque chose en lui. Car pour retrouver l’homme que vous aimez et tel que vous l’avez connu, il va être indispensable pour lui de retrouver de la valorisation à vos yeux. La perte d’un emploi est un accident de la vie, un problème qu’il faut dissocier de la personne. Dites-lui que vous comprenez ce qu’il traverse et que vous n’avez pas envie de perdre tout ce que vous avez construit ensemble. Que c’est une épreuve pour votre couple et que vous allez la traverser ensemble. Proposez-lui de consulter ensemble un thérapeute qui pourra vous aider tous les deux à retrouver votre place dans la famille.

- Orientez-le vers la médecine douce : telle que la sophrologie ou la réflexologie. Ces méthodes peuvent l’aider à s’apaiser et à ressentir du bien-être et ainsi lui permettre de sortir de son cercle vicieux.

- Rendez-vous ensemble à des cours de Torah : je donne toujours ce conseil car plus que de donner des réponses aux obstacles que nous rencontrons au quotidien, l’étude de la Torah transmet de véritables valeurs et de la motivation pour progresser dans sa vie. Allez-y ensemble, cela ne peut que vous aider.

- Priez pour votre mari, et en particulier, essayez de faire après chaque repas le Birkat Hamazone, cette prière contribue à la Parnassa du foyer.

Vous êtes forte et vous allez transmettre cette force à votre mari afin qu’il se batte pour s’en sortir, se relever et être plus fort ! Car c’est à cela que servent les épreuves. La vie, c’est tomber puis se relever. C’est comme cela que l’on comprend le sens des priorités. Aujourd’hui, il est au creux de la vague, mais il peut à tout moment remonter et il doit savoir que vous êtes à ses côtés pour qu’il retrouve le chemin d’une vie de famille harmonieuse. Mais s’il décide de rester en bas, alors il faut qu’il comprenne qu’il ne vous entraînera pas…

Béhatsla’ha !

Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.