Qui était notre arrière-arrière-arrière… grand-mère, Sarah ? À quoi ressemblait-elle ? Quelles étaient ses valeurs ? Ses qualités ? Qui fut notre première matriarche, ainsi que la première prophétesse du peuple juif ? Que pouvons-nous, nous les femmes, apprendre d’elle au 21ème siècle ?

Une vie inspirée

Sarah Iménou (notre mère) a grandi à Our-Kasdim, une ville moderne et cosmopolite située en Mésopotamie, dans laquelle prédominait une forte idolâtrie. Tous ses habitants, bien que très instruits dans les matières profanes, adoraient des dieux, des statues de bronze, d’argent, et d’or. C’est dans cet environnement qu’elle grandit et qu’elle épousa un proche parent, Avram. Ils quittèrent alors Our-Kasdim pour installer leur tente dans le désert, et commencèrent à enseigner l’existence de D.ieu à tous ceux qu’ils croisaient.

Quelle a été la force de cette femme - unique dans l’histoire - à opérer de tels changements radicaux dans sa vie, afin de répandre le Bien dans le monde ?

La réponse se trouve dans les différents noms qu’elle possédait. En effet, Sarah changea deux fois de prénoms ; deux changements fondamentaux, qui découpèrent sa vie en 3 étapes, mais, surtout, qui furent le symbole d’un raffinement spirituel croissant.

Yisska ou la prophétie innée

Peu savent que le prénom originel de Sarah était Yisska. “Yisska” vient de “voir” (Rachi sur Béréchit 11,29), et inclut les deux attributs constitutifs de Sarah : la prophétie et la beauté. En vérité, ces deux dons (la prophétie et la beauté) sont dérivés de l’idée de vision : la vision active de Sarah Iménou (elle “voyait” D.ieu, Lui parlait), et sa vision passive (elle était belle à “voir”); autrement dit, comment elle percevait le monde, et comment le monde la percevait.

Ainsi, Sarah, comme le traduit son prénom originel, est née prophétesse, c’est-à-dire qu’elle percevait D.ieu depuis sa plus tendre enfance. Concernant Avraham, il n’y a aucune preuve que D.ieu s’est révélé à lui dans son enfance. Ce n’est qu’à l’âge de 75 ans que D.ieu se révéla à lui pour la première fois. Non seulement Sarah était dotée de prophétie antérieurement à son mari, mais, surtout, la prophétie de Sarah lui était également supérieure (Rachi sur Béréchit 21,12).

Ce prénom fut le prénom qu’elle porta lorsqu’elle était une enfant, mais lorsqu’elle grandit, elle prit conscience de la valeur de la pudeur, et prit la décision de changer son nom. Elle décida à présent de ne plus se faire appeler Yisska, mais Saraï, qui signifie littéralement « ma princesse ». Ce changement de nom opéré, elle montra qu’elle ne souhaitait plus “être vue”, mais qu’elle œuvrait pour acquérir de nobles qualités, dans l’intimité, la pudeur, et la modestie.

Cela doit être pour nous une leçon : ne pas chercher à se faire voir, mais être modestement au quotidien une Princesse d’Israël. “La gloire d’une Princesse se trouve à l’intérieur”. Comprendre que notre véritable grandeur ne se réalise pas à travers le regard des autres (copines, collègues, voisines, ou autres), mais à travers le regard qu’Hachem porte sur nous.

Saraï ou la femme vaillante

Comme son mari, Sarah se consacra corps et âme à diffuser l’idée d’un D.ieu unique à chaque personne qu’elle rencontrait. Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes (voir Rachi sur Béréchit 12,5). Il est intéressant de noter que, bien qu’à l’époque, de fait, les femmes adoptaient systématiquement les choix de leurs maris, il ne suffisait pas de convaincre seulement les hommes. En effet, faire rentrer Hachem dans sa vie et Le servir de tout son cœur reste une décision qui doit imprégner les deux membres du couple. C’est un changement de conception et de mode de vie tellement radical qu’il doit être choisi et vécu positivement par chacun des membres du foyer. Sarah fut donc cette femme qui enseignait aux autres le mode de vie juif et qui inspira hautement les femmes de son époque. Sarah fut donc le modèle d’une femme qui répandit le nom d’Hachem sur terre en prodiguant du bien à chaque personne qu’elle rencontrait.

On souligne souvent que la tente d’Avraham était ouverte des quatre côtés afin de recevoir les voyageurs provenant de chaque direction afin de pratiquer l’hospitalité. C’est effectivement cette Mitsva qu’il réalisait du matin jusqu’au soir ; même au prix de sa santé, et dans les jours de grande canicule. Mais, en réalité, qui faisait en sorte que tout cela soit possible ? La réponse se trouve dans la Paracha de Vayéra : “Avraham rentra en hâte dans sa tente, vers Sarah et dit : Vite, prends trois mesures de farine de pur froment, pétris-la, et fais-en des gâteaux.” Sarah fut celle qui s’occupait de gérer toute la conception des plats et ne ménageait aucunement ses forces pour réaliser la Mitsva de recevoir des invités afin de sanctifier le Créateur.

(De quoi nous donner des forces lorsque notre mari ramène “spontanément” des amis de la synagogue le samedi matin…!)

Enfin, Sarah fut celle qui, de façon héroïque et totalement altruiste, dit à Avraham de prendre pour seconde femme Hagar. Voyant qu’elle n’arrivait pas à enfanter, elle eut de la compassion pour son mari et lui suggéra d’épouser sa servante Agar. C’est ce qu’Avraham fit, et c’est ainsi qu’il donna naissance à Yichmaël. Seule une femme totalement dépourvue du moindre trait d’égoïsme peut être capable d’un tel acte, héroïquement désintéressé.

Sarah ou la femme digne de miracles

À l’âge de 90 ans, sur l’ordre d’Hachem, Saraï changea de nom en Sarah. Elle n’est plus seulement la Princesse de D.ieu, mais une Princesse aux yeux de tous les individus de la terre. Étant dépourvue d’utérus, elle était destinée à restée stérile toute sa vie, mais l’insertion du “Hé”, la lettre symbolisant Hachem, permit de changer son destin. Le Talmud (Brakhot 13a) explique que seul ce changement de nom permettrait à Sarah de sortir de sa destinée pour créer une nouvelle destinée : celle d’enfanter une dynastie, la Nation juive.

En effet, mis à part le fait qu’elle enfanta à un âge miraculeux (90 ans), Hachem lui prodigua de nombreux miracles accompagnant celui de la naissance : elle redevint jeune d’apparence, elle ne souffrit pas de son enfantement, elle donna naissance à un enfant qui ressemblait à son mari en tous points, et, enfin, pour faire taire les mauvaises langues, toutes les femmes qui allaitaient cessèrent d’avoir du lait, et Sarah nourrit toute une génération de bébés !

C’est également à travers tous les miracles dont elle bénéficia qu’Hachem put témoigner de sa haute valeur aux yeux de chacun.

Ainsi, toutes les femmes juives, nous devons notre existence à un miracle originel : celui de la naissance d’Its’hak. Cette idée doit nous inspirer quotidiennement : notre existence même est de l’ordre du miracle ! À l’instar de Sarah, nous savons que si nous tournons nos yeux vers D.ieu, Il peut renverser la situation de façon miraculeuse ; comme Il l’a fait pour Sarah Iménou lorsqu’Il lui a donné un fils à 90 ans.

Notre mère à tous, notre modèle à toutes

Sarah mourut à 127 ans et avait acquis au cours de sa vie les plus beaux attributs qu’une femme puisse posséder : pureté, courage, et sagesse. Elle fut pleurée par tous les habitants de Cana'an, car chacun savait qu’il prenait part à la bénédiction qu’elle diffusait autour d’elle. Elle incarna à la fois la femme moderne et forte de ses convictions, mais également, le dévouement pour son mari, sa famille, et pour tout son entourage ; le tout imprégné de modestie et de la plus grande pudeur qu'il puisse être. Bien qu’elle fut véritablement “mère” que trente-sept ans, elle est la mère de toute la Nation Juive, et elle est une mère éternelle pour chacun d’entre nous.

Rien ne peut l’égaler, nous ne pouvons que nous en inspirer.