La paracha de cette semaine aborde une grande variété de thématiques. Elle commence avec la suite de l’épisode de Pinhas qui a défendu l’honneur d’Hachem au milieu du peuple, puis évoque les différents sacrifices offerts par le peuple, et elle passe également en revue l’ensemble des fêtes qui rythment la vie juive. Il est, par conséquent, difficile de ne retenir qu’un thème pour évoquer le bonheur tant les angles et les approches peuvent être multiples à travers le texte de cette semaine.

Notre paracha s’ouvre sur « l’alliance de paix » promise par Hachem à Pinhas. En effet, ce dernier venait de tuer un couple aux yeux de tout le peuple afin de défendre l’honneur d’Hachem qui était bafoué par ces derniers. Même si la démarche de Pinhas était bonne, louable, et vertueuse, il n’en demeure pas moins qu’il avait commis un acte violent qui aurait pu laisser des « séquelles » dans le cœur et la psychologie de Pinhas et des Bnéi Israel. A travers cette promesse d’Hachem de donner une « alliance de paix » à Pinhas, nos Sages nous disent que l’Eternel s’est alors engagé à effacer du cœur de Pinhas les conséquences négatives et délétères de son acte.

Or, cet attribut d’Hachem de pouvoir effacer le négatif revient une nouvelle fois dans la paracha lorsque notre texte évoque la fête de Roch Hachana. Il s’agit, selon notre tradition, d’un des jours les plus solennels du calendrier juif, mais aussi un jour de fête et de joie. « Allez, mangez des mets succulents, buvez des breuvages doux, et envoyez-en à ceux qui n’ont rien d’apprêté, car ce jour est consacré à l’Eternel. Ne vous attristez-donc pas, car la joie en l’Eternel est votre force ! » (Néhémie 8.10)

Le jour du jugement est donc également un jour de joie et de fête. Comment cela fonctionne-t-il ?

Le Maguid de Douvno donnait une belle parabole pour faire comprendre intuitivement ce qui était en jeu (cité par R. A Twerski, Simcha is not just Happiness). L’image est la suivante : un Roi part en chasse un jour avec une partie de sa cour, mais il s’égare au cours de la chasse et se retrouve seul dans la forêt. Une pluie battante se met alors à tomber et il finit par apercevoir une lumière au loin. Il se rend dans cette habitation et est accueilli chaleureusement par un bûcheron qui l’installe chez lui, le réchauffe, lui prête de nouveaux habits et le restaure. De retour au château, le Roi promeut le bûcheron à un poste de responsabilité au palais Royal.

Toutefois, au bout de quelques temps, le bûcheron prend part à une révolte interne contre le Roi. Le complot est découvert, et les responsables, dont le bûcheron, sont condamnés à mort. Comme dernière volonté, il demande à pouvoir revêtir ses habits de bucheron et de rencontrer le Roi à nouveau. Emu par l’image de son bienfaiteur d’hier, le Roi se souvient de la bonté du bûcheron quand il s’était perdu, et accepte de le grâcier.

Le Maguid de Douvno utilise cette image afin de nous rappeler que le son du shofar que nous faisons retentir à Rosh Hachana fonctionne de la même manière. Il rappelle à Hachem le son qui retentit au Mont Sinaï lorsque les enfants d’Israël acceptèrent la Torah, après que tous les autres peuples l’eurent refusée. Cette évocation de la bonté et de la confiance des enfants d’Israël dans leur « jeunesse » quand ils ont fait confiance à Hachem et l’on suivi dans le désert, à la faveur du son du shofar, éveille la miséricorde d’Hachem à notre endroit. C’est précisément ce que dit le prophète Jérémie à la fin de la Haftara de cette semaine, dans des versets que l’on lit également le jour de Roch Hachana, parmi les « zichronot », « les versets du souvenir ».

La miséricorde d’Hashem s’appuie alors, non seulement sur le son du shofar, mais également sur la sincérité du repentir de l’homme qui regrette ses erreurs du passé et s’engage à ne pas les recommencer. Au terme du processus de Techouva (confession des fautes, regret, engagement de ne plus recommencer), l’homme est considéré comme nettoyé de ses fautes, elles se déconnectent de lui, il n’a plus en rendre compte.

Roch Hachana nous rappelle avec force la faculté d’Hachem à effacer les fautes des hommes, et éliminer les moindres traces de ses égarements. « J’effacerai tes fautes volontaires comme un brouillard et tes péchés comme un nuage. Reviens à moi, je suis Ton  libérateur ! » (Isaie, 44.22).

L’homme a donc cette faculté de ne pas être rivé pour l’éternité à ses fautes ou ses erreurs. Il peut en alléger le fardeau en faisant une techouva authentique, sincère, et en les faisant donc disparaître. Il ne s’agit pas de « mettre la poussière sous le tapis », d’occulter des périodes gênantes de nos vies, mais plutôt d’une authentique renaissance, d’une nouvelle vie !

Ce n’est donc probablement pas un hasard si notre paracha commence par l’épisode de Pinhas, et se poursuit avec l’évocation des fêtes, et notamment du shofar de Roch Hachana.

Elle nous rappelle ainsi la faculté offerte à l’homme de ne jamais être enfermé dans son passé et dans ses erreurs, mais de pouvoir toujours orienter sa vie pour le bien. L’homme n’est pas enchainé à son histoire comme les personnages des tragédies grecques sur lesquelles s’abattait un « fatum », un « destin » tragique que rien ne pouvait arrêter.

Hachem peut tout autant gommer les aspects négatifs de certains actes vertueux, comme pour Pinhas, qu’effacer les fautes à part entière, avec le processus de Techouva de Roch Hachana.

Aussi, la Torah a donné à l’homme un cadeau inestimable : la possibilité de commencer une nouvelle vie à chaque instant, en se libérant des fautes du passé, et en cheminant auprès d’Hachem, chacun à son niveau, grâce à l’étude de le Torah et à la pratique des mistvot.

Cette possibilité de renaître au cours de sa vie va au-delà de tout ce qui a pu être pensé et écrit autour de la résilience et du développement personnel. Elle est une source de joie et d’espoir permanent à nulle autre comparable.