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Vayétsé
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28,10
Jacob sortit de Beer Shava et se dirigea vers Haran.
Ya’aqov sortit
Le récit de la Tora a interrompu la narration de la vie de Ya‘aqov pour nous dire que les filles de Kena‘an ayant déplu à Yits‘haq, son père, ‘Essaw était allé chez Yichma‘el, ainsi qu’il est écrit : « ‘Essaw vit que Yits‘haq avait béni Ya’aqov... » (verset 6). Cette incidente terminée, le récit revient à son sujet premier
Il alla
Il aurait suffi d’écrire simplement : « il alla à ‘Haran ». Pourquoi mentionner son départ de Beér Chèva’ ? C’est pour nous apprendre que le départ d’un juste fait impression dans l’endroit qu’il quitte. Aussi longtemps que le juste se trouve dans une ville, c’est lui qui en est la beauté, c’est lui qui en est l’éclat, c’est lui qui en est la majesté. Lorsqu’il la quitte, finie sa beauté, fini son éclat, finie sa majesté, comme dans : « elle sortit de l’endroit » (Routh 1, 7) à propos de Naomi et Routh (Beréchith raba 68, 6)
Il alla à ‘Haran (‘harana)
Il sortit pour aller à ‘Haran
28,11
Il arriva dans un endroit où il établit son gîte, parce que le soleil était couché. II prit une des pierres de l'endroit, en fit son chevet et passa la nuit dans ce lieu.
Il atteignit l’endroit
Le texte ne spécifie pas le nom de l’endroit. Il s’agit d’un « endroit » mentionné ailleurs, à savoir le Mont Moria (‘Houlin 91b), ainsi qu’il est écrit : « il vit “l’endroit” de loin » (supra 22, 4)
Il atteignit (wayifga’)
Comme dans : « il atteignit (oufaga’) Jéricho » (Yehochou‘a 16, 7), « il atteignit (oufaga’) Dabècheth » (Yehochou‘a 19, 11). Nos rabbins ont expliqué ce mot comme impliquant l’idée de prière (Berakhoth 26b, Beréchith raba 68, 9), comme dans : « Ne cherche pas à me fléchir (al tifga’ bi) » (Yirmeya 7, 16). Cela nous enseigne que Ya‘aqov a institué la prière du soir (‘arvith). Le texte a cependant modifié le vocabulaire et n’a pas écrit « il pria », afin de t’apprendre que les distances ont été « supprimées » pour lui, comme expliqué dans la guemara (‘Houlin 91a)
Car le soleil s’était couché
Le texte aurait dû porter : « le soleil s’est couché et il y passa la nuit ». L’expression « car le soleil s’était couché » signifie que le soleil s’est couché prématurément, et non à son heure, afin qu’il soit obligé d’y passer la nuit (Beréchith raba 68, 10)
Les mit sous sa tête
Il en a formé comme une murette de l’apparence d’une gouttière autour de sa tête, car il avait peur des bêtes féroces. Les pierres ont commencé de se disputer, l’une exigeant : « C’est sur moi que ce juste posera sa tête ! », et l’autre protestant : « Non ! c’est sur moi qu’il la posera ! » (Beréchith raba 68, 11). Aussitôt, le Saint béni soit-Il les a fondues en une seule pierre (‘Houlin 91b), ainsi qu’il est écrit : « il prit “la pierre” [au singulier] qu’il avait mise sous sa tête » (verset 18)
Il se coucha en cet endroit-là
L’expression implique une restriction : Il s’est couché en cet endroit-là, mais durant les quatorze ans qu’il avait passés à étudier dans la maison de ‘Evèr, il ne s’était pas couché la nuit, car il y étudiait la Tora sans interruption
28,12
Il eut un songe que voici: Une échelle était dressée sur la terre, son sommet atteignait le ciel et des messagers divins montaient et descendaient le long de cette échelle.
Y montaient et descendaient
Ils montaient d’abord, puis ils descendaient (Beréchith raba 68, 12). Les anges qui l’avaient accompagné à l’intérieur d’Erets Israël ne devaient pas sortir du pays : ils sont donc remontés au ciel. Et ceux attachés aux autres pays sont descendus pour l’accompagner
28,13
Puis, l'Éternel apparaissait au sommet et disait: "Je suis l'Éternel, le Dieu d'Abraham ton père et d'Isaac; cette terre sur laquelle tu reposes, je te la donne à toi et à ta postérité.
Se tenait sur lui
Pour le protéger (Beréchith raba 69, 3)
Et Eloqim de Yits‘haq
Il est vrai que, nulle part dans le texte, le Saint béni soit-Il n’a associé de leur vivant Son nom à celui des justes, en écrivant « Eloqim d’un tel », car il est écrit : « même en Ses saints Il n’a pas confiance » (Iyov 15, 15). Ici, cependant, Il a uni Son nom à celui de Yits‘haq, parce que sa vue s’était assombrie et qu’il était obligé de rester chez lui. Il était donc comme mort, et son penchant au mal l’avait quitté, [de sorte qu’il était devenu hors d’état de pécher] (Midrach tan‘houma guemara)
Sur laquelle tu es couché
Le Saint béni soit-Il a rassemblé sous lui le sol de tout Erets Israël, lui suggérant ainsi que ses enfants le conquerraient avec autant de facilité qu’une parcelle de quatre coudées, dimension qui représente la place occupée par un homme couché (‘Houlin 91b et Rachi ibid.)
28,14
Elle sera, ta postérité, comme la poussière de la terre; et tu déborderas au couchant et au levant, au nord et au midi; et toutes les familles de la terre seront heureuses par toi et par ta postérité.
Tu t’étendras
Tu te fortifieras, comme dans : « elle s’étendait » (Chemoth 1, 12)
28,15
Oui, je suis avec toi; je veillerai sur chacun de tes pas et je te ramènerai dans cette contrée, car je ne veux point t'abandonner avant d'avoir accompli ce que je t'ai promis."
Je suis avec toi
Car il avait peur de ‘Essaw et de Lavan
Jusqu’à ce que (‘ad im) j’aie fait
Le mot im a ici le sens de ki (« que »)
Ce que ce que je t’ai dit
Dans ton intérêt et à ton sujet. Ce que j’ai promis à Avraham pour sa descendance, je l’ai promis à ton sujet et non pas au sujet de ‘Essaw, car je ne lui ai pas dit : « car c’est la descendance de Yits‘haq qui portera ton nom », mais : « c’est “dans” Yits‘haq que l’on appellera ta descendance »(supra 21, 12), et non pas la totalité de Yits‘haq (Nedarim 31a). D’une manière générale, tout li, lekha, lo, lahem complément du verbe dabèr signifie : « au sujet de » (voir Rachi sous supra 24, 7). Le présent verset en est la preuve, puisque Dieu ne s’était jamais, jusqu’alors, adressé à Ya’aqov
28,16
Jacob, s'étant réveillé, s'écria: "Assurément, l'Éternel est présent en ce lieu et moi je l'ignorais."
Et moi je ne le savais pas
Car si je l’avais su, je n’aurais pas dormi dans un lieu aussi saint
28,17
Et, saisi de crainte, il ajouta: "Que ce lieu est redoutable! ceci n'est autre que la maison du Seigneur et c'est ici la porte du ciel."
Ceci n’est autre que la maison de Eloqim
Rabi El‘azar a enseigné dit au nom de rabi Yossi ben Zimra (Beréchith raba 69, 7) : Cette échelle était posée à Beér Chèva’, et le milieu de sa rampe surplombait le Temple, car Beér Chèva’ se trouve au sud du territoire de Yehouda, et Jérusalem au nord, à la limite entre Yehouda et Binyamin. Quant à Beith-El, il se trouve au nord de Binyamin, à la limite entre Binyamin et les fils de Yossef. En conséquence, les pieds de l’échelle étaient à Beér Chèva’ et son sommet à Beith-El, le milieu de sa rampe étant au surplomb de Jérusalem. Cela répond à un autre enseignement de nos sages. Dieu a dit : « Ce juste viendrait dans ma demeure [c’est-à-dire le Temple de Jérusalem] et il s’en irait sans y passer la nuit ! » (‘Houlin 91b). Et ils ont également enseigné : Ya’aqov a donné à Jérusalem le nom de Beith-El (Pessa‘him 88a). Or, il s’agit ici de Louz et non de Jérusalem. Et d’où déduisent-ils cela [à savoir que Louz s’identifie à Jérusalem] ? A mon avis, le Mont Moria a été déraciné et est venu se placer à cet endroit, et c’est ce mouvement qui a caractérisé la « suppression des distances » dont il est question dans le traité ‘Houlin. C’est le Temple lui-même qui est venu à sa rencontre jusqu’à Beith-El, d’où l’emploi des mots : « il atteignit l’endroit » (verset 11) [c’est-à-dire qu’il l’a « rencontré », à la manière de deux personnes qui se déplacent l’une vers l’autre]. On peut se demander, dans ce cas, [étant ainsi acquis que Ya‘aqov s’est rendu de Beér Chèva’ à Jérusalem, puis à Louz et à ‘Haran, et donc qu’il avait dépassé Jérusalem lorsqu’il s’est arrêté à Louz] pourquoi Dieu ne l’a pas retenu lorsqu’il est passé sur l’emplacement du Temple. S’il n’avait pas l’idée de prier à l’endroit où avaient prié ses pères, le ciel aurait dû l’y retenir ! En fait, il est parti jusqu’à ‘Haran, ainsi qu’il est écrit dans le traité ‘Houlin. Et le texte le prouve : « il alla à ‘Haran » (verset 10). Il s’est dit : « Comment se peut-il que je sois passé par l’endroit [Beith-El] où a prié mon père sans y prier moi-même ? » Il a alors décidé de faire demi-tour, et il était déjà revenu à Beith-El lorsque les distances ont été « supprimées »
Que ce lieu est redoutable
Traduction du Targoum : « Quelle vénération s’attache à cet endroit ! » Il emploie un substantif, comme pour « intelligence » (Devarim 32, 28), « un vêtement pour me vêtir » (verset 20)
Et ceci est la porte des cieux
Un lieu de prière par où sa supplication est montée au ciel (Pirqé deRabi Eli‘èzèr 35). Et d’après le midrach : le sanctuaire d’en-haut qui correspond au sanctuaire d’ici-bas, [le Temple de Jérusalem étant ainsi considéré comme la « porte » du sanctuaire d’en-haut](Beréchith raba 69, 7)
28,18
Jacob se leva de grand matin; il prit la pierre qu'il avait mise sous sa tête, l'érigea en monument et répandit de l'huile à son faite.
28,19
Il appela cet endroit Béthel; mais Louz était d'abord le nom de la ville.
28,20
Jacob prononça un vœu en ces termes: "Si le Seigneur est avec moi, s'il me protège dans la voie où je marche, s'il me donne du pain à manger et des vêtements pour me couvrir;
Si Eloqim est avec moi
S’Il tient pour moi ces promesses qu’Il m’a faites d’être avec moi, comme Il me l’a dit : « et voici, je suis avec toi » (verset 15)
S’Il me garde
Comme Il me l’a dit : « Je te garderai partout où tu iras » (verset 15)
S’Il me donne du pain à manger
Comme il me l’a dit : « car je ne t’abandonnerai pas » (verset 15). On dit de celui qui mendie du pain qu’il est « abandonné », ainsi qu’il est écrit : « Jamais je n’ai vu un juste abandonné, ni ses enfants obligés de mendier leur pain » (Tehilim 37, 25)
28,21
si je retourne en paix à la maison paternelle, alors le Seigneur aura été un Dieu pour moi
Que je retourne
Comme Il me l’a dit : « je te ramènerai dans ce pays » (verset 15)
En paix
Le mot chalom (« paix ») contient l’idée « d’intégrité ». « Entier » de tout péché, car je ne veux rien apprendre des manières d’agir de Lavan
Hachem sera pour moi Eloqim
Puisse Son nom reposer sur moi du début à la fin, puisse-t-on ne jamais trouver de tare dans ma descendance (Sifri Waeth‘hanan 31), comme Il me l’a dit : « ce que je t’ai dit » (verset 15). Cette promesse, Dieu l’avait faite à Avraham, ainsi qu’il est écrit : « afin d’être pour toi Eloqim, et pour ta descendance après toi » (supra 17, 7)
28,22
et cette pierre que je viens d'ériger en monument deviendra la maison du Seigneur et tous les biens que tu m'accorderas, je veux t'en offrir la dîme."
Et cette pierre
Voici comment il faut expliquer la conjonction « et » : si tu fais pour moi ces choses-là, alors je ferai cela
Et cette pierre que j’ai érigée en monument...
D’après le Targoum : « sur elle je servirai Dieu ». Et c’est ce qu’il a fait à son retour de Padan Aram. Lorsque Dieu lui a dit : « lève-toi, monte à Beith-El » (infra 35, 1), le texte ajoute : « Ya’aqov érigea un monument... il fit couler dessus une libation » (infra 35, 14)
29,1
Jacob se remit en chemin et alla vers la terre des enfants de l'Orient.
Ya’aqov se mit en chemin (littéralement : « souleva ses pieds »)
Lorsqu’il a reçu la bonne nouvelle qui lui annonçait la protection divine, son cœur a comme soulevé ses pieds et il lui a été facile de marcher. C’est ce que l’on explique dans Beréchith raba (70, 8)
29,2
II vit un puits dans les champs et là, trois troupeaux de menu bétail étaient couchés à l’entour, car ce puits servait à abreuver les troupeaux. Or la pierre, sur la margelle du puits, était grosse.
Ils abreuvaient les troupeaux
Les bergers abreuvaient les troupeaux. Le texte s’exprime de manière elliptique
29,3
Quand tous les troupeaux y étaient réunis, on faisait glisser la pierre de dessus la margelle du puits et l'on abreuvait le bétail, puis on replaçait la pierre sur la margelle du puits.
On y réunissait
Ils avaient l’habitude de se réunir, parce que la pierre était grande
On roulait
Le Targoum traduit par un verbe au présent : « ils roulent ». Une action au présent s’exprime parfois par un futur, parfois par un passé, car si elle se renouvelle constamment elle a été et elle sera
Et on remettait
Le Targoum traduit par un verbe au présent : « ils remettent »
29,4
Jacob leur dit: "Mes frères, d'où êtes vous?" Ils répondirent: "Nous sommes de Haran."
29,5
II leur dit: "Connaissez-vous Laban, fils de Nahor?" Ils répondirent: "Nous le connaissons."
29,6
Il leur dit: "Est-il en paix?" Et ils répondirent: "En paix; et voici Rachel, sa fille, qui vient avec son troupeau."
Vient avec le bétail
L’accent tonique est mis sur la dernière syllabe, et le Targoum traduit par un verbe au présent. Plus loin, dans : « Ra‘hel vint » (verset 9), l’accent est mis sur la première syllabe, et le Targoum traduit par un verbe au passé. Dans le premier cas, l’action est en cours, dans le second elle a déjà eu lieu
29,7
"Mais," reprit-il, "le jour est encore long, il n'est pas l'heure de faire rentrer le bétail: abreuvez les brebis et les menez paître."
Il est encore grand jour
Comme il avait vu que le bétail était couché, il pensait que les bergers voulaient le rassembler pour le faire rentrer, et mettre ainsi fin à leur pâture. C’est pourquoi il leur a dit : « il est encore grand jour », c’est-à-dire : « Si vous êtes rémunérés à la journée, vous n’avez pas achevé votre tâche. Et même si ces bêtes vous appartiennent, alors malgré tout, “il n’est pas temps de rassembler le bétail...” » (Beréchith raba 70, 11)
29,8
Ils dirent: "Nous ne saurions, jusqu'à ce que tous les troupeaux soient rassemblés: on déplacera alors la pierre qui couvre l'orifice du puits et nous ferons boire les brebis."
Nous ne le pourrons pas
Les abreuver, parce que la pierre est trop grande
On roulera
[Même mot qu’au verset 3], que le Targoum traduit ici par un verbe au futur : « ils rouleront »
29,9
Comme il s’entretenait avec eux, Rachel vint avec le troupeau de son père car elle était bergère.
29,10
Lorsque Jacob vit Rachel, fille de Laban, frère de sa mère et les brebis de ce dernier, il s'avança, fit glisser la pierre de dessus la margelle du puits et fit boire les brebis de Laban, frère de sa mère.
Ya’aqov s’approcha
Comme quelqu’un qui retire le bouchon de l’ouverture d’une bouteille, cela pour te faire savoir que sa force était grande (Beréchith raba 70, 12)
29,11
Et Jacob embrassa Rachel et il éleva la voix en pleurant.
Il pleura
Car il a su à ce moment sous l’inspiration de l’esprit saint qu’elle ne partagerait pas sa tombe [dans le caveau de Makhpéla]. Autre explication : Parce qu’il était arrivé les mains vides. Il s’est dit : « Eli’èzer, le serviteur de mon grand-père, avait apporté des anneaux, des bracelets et autres présents, et moi, je n’ai rien dans les mains ! ». Elifaz, le fils de ‘Essaw, l’avait en effet poursuivi, sur l’ordre de son père, pour le tuer, et il l’avait rattrapé. Mais comme Elifaz avait grandi « dans le giron » de Yits‘haq (Devarim raba 2, 13), il avait renoncé à son projet meurtrier. Il lui avait dit : « Comment vais-je faire pour obéir à mon père ? » Ya’aqov lui avait répondu : « Prends tout ce que je possède car, comme dit le dicton (Nedarim 64b, Beréchith raba 71, 6), “le pauvre est considéré comme mort” »
29,12
Et Jacob apprit à Rachel qu'il était parent de son père, qu'il était le fils de Rébecca. Elle courut l'annoncer à son père.
Qu’il était frère de son père
Un proche parent de son père, comme dans : « car nous [Avram et Lot] sommes frères » (supra 13, 8). Et selon le midrach : s’il se comporte avec ruse, je saurai moi aussi être son « frère » en ruse. Et si c’est un homme honnête, je le serai aussi, car je suis le fils de Rivqa, sa sœur, qui est une femme honnête (Baba Batra 123a, Beréchith raba 70, 13)
Le raconter à son père
Comme sa mère était morte, elle ne pouvait le raconter qu’à lui seul (Beréchith raba 70, 13)
29,13
Aussitôt que Laban eut appris l'arrivée de Jacob, le fils de sa sœur, il courut au devant de lui, il l'embrassa, le couvrit de baisers et l'emmena dans sa demeure. Jacob raconta à Laban tous ces événements.
Il courut à sa rencontre
Il pensait que Ya’aqov était chargé d’argent, puisque le serviteur de la maison était venu autrefois au même endroit accompagné de dix chameaux chargés de cadeaux
Il l’étreignit
Lorsqu’il a vu qu’il n’avait rien, il s’est dit : « Peut-être a-t-il apporté des pièces d’or et les porte-t-il sur lui ? »
Il l’embrassa
Il s’est dit : « Peut-être a-t-il apporté des pierres précieuses et les porte-t-il dans sa bouche ? »
Il raconta à Lavan
Qu’il n’était venu que parce qu’on l’y avait forcé, étant menacé par son frère, et qu’on l’avait dépossédé de ses biens
29,14
Laban lui dit: "Tu n'es rien moins que mon corps et ma chair!" Et il demeura avec lui un mois durant.
Mais tu es mon corps et ma chair
Je n’ai plus de raison, désormais, de t’accueillir chez moi, puisque tu n’as rien. Cependant, eu égard à notre parenté, je t’hébergerai pendant un mois. Et c’est ce qu’il a fait, mais pas gratuitement, car Ya’aqov gardait ses troupeaux
29,15
Alors Laban dit à Jacob: "Quoi! parce que tu es mon parent, tu me servirais gratuitement? Déclare moi quel doit être ton salaire."
Est-ce parce que tu es mon frère
C’est une interrogation
Que tu me serviras gratuitement
Le verbe est au passé précédé du waw conversif. C’est ainsi que tout verbe au passé, auquel on a ajouté un waw comme préfixe, se transforme en futur
29,16
Or, Laban avait deux filles: le nom de l'aînée était Léa, celui de la cadette Rachel.
29,17
Léa avait les yeux faibles; Rachel était belle de taille et belle de visage.
Ternes
Parce qu’elle se croyait destinée à ‘Essaw, et elle en pleurait. Tout le monde disait : « Rivqa a deux fils, et Lavan deux filles. L’aînée sera pour l’aîné, et la cadette pour le cadet » (Beréchith raba 70, 16)
De taille (torr)
Ce sont les traits du visage, comme dans : « Il la dessine (yethaaréhou) à la craie... et la proportionne (yethaaréhou) au compas » (Yecha’ya 44, 13). En français médiéval : « conpas »
De visage
C’est l’éclat du visage
29,18
Jacob avait conçu de l'amour pour Rachel. II dit: "Je te servirai sept ans pour Rachel, ta plus jeune fille."
Je te servirai sept ans
Ce sont les quelques jours dont lui avait parlé sa mère (Beréchith raba 70, 17) : « tu demeureras avec lui quelques jours » (supra 27, 44). Et il en a été effectivement ainsi, puisqu’il est écrit : « elles furent à ses yeux comme “quelques jours” » (verset 20)
Pour Ra‘hel
Pourquoi toutes ces précisions ? Parce qu’il savait que Lavan était rusé. Il lui a dit : « je te servirai... pour Ra‘hel ». Peut-être prétendras-tu qu’il s’agit d’une autre Ra‘hel en ville. Aussi le texte fixe-t-il : « ta fille ». Et si tu devais décider de changer le nom de Léa et de la nommer Ra‘hel, le texte précise : « la petite ». Et tout cela ne lui a servi à rien, puisque Lavan l’a néanmoins trompé
29,19
Laban répondit: "J'aime mieux te la donner que de la donner à un autre époux: demeure avec moi."
29,20
Jacob servit, pour obtenir Rachel, sept années et elles furent à ses yeux comme quelques jours, tant il l'aimait.
29,21
Jacob dit à Laban: "Donne-moi ma femme, car mon temps est accompli et je veux m'unir à elle."
Car mes jours sont accomplis
Le temps que m’avait dit ma mère. Et aussi mon temps est arrivé, puisque j’ai quatre-vingt-quatre ans. Quand donc donnerai-je naissance aux douze tribus ? C’est pourquoi il est écrit : « je viendrai vers elle ». Et pourtant le plus dévergondé des hommes ne parle pas ainsi ! S’il l’a fait, c’est par impatience de donner naissance à sa descendance (Beréchith raba 70, 18)
29,22
Laban réunit tous les habitants du lieu et donna un festin.
29,23
Mais, le soir venu, il prit Léa sa fille et la lui amena et Jacob s'unit à elle.
29,24
Laban avait aussi donné Zilpa, son esclave, à Léa, sa fille, comme esclave.
29,25
Or, le matin, il se trouva que c'était Léa; et il dit à Laban: "Que m'as-tu fait là! N'est ce pas pour Rachel que j'ai servi chez toi? Et pourquoi m'as-tu trompé?"
Ce fut
Mais pendant la nuit, elle n’était pas Léa, car Ya‘aqov avait donné à Ra‘hel des signes de reconnaissance. Lorsque celle-ci a vu qu’on lui amenait Léa, elle s’est dit : « Ma sœur va subir une humiliation ! ». Elle lui a donc transmis ces signes (Meguila 13b)
29,26
Laban répondit: "Ce n'est pas l'usage, dans notre pays, de marier la cadette avant l'aînée.
29,27
Achève la semaine de celle ci et nous te donnerons également celle là en échange du service que tu feras encore chez moi pendant sept autres années."
Remplis la semaine de celle-ci
Le mot chevou‘a (« semaine ») est à l’état construit, car le chin est ponctué d’un cheva : « la semaine de celle-ci ». Ce sont les sept jours que dure une noce (Yerouchalmi Mo‘èd qatan 1, 7). Et l’on ne peut pas dire que l’expression signifie : « cette semaine-là », car si tel était le cas, le chin aurait dû être ponctué d’un qamats (chavou‘a). De plus, le nom chevou‘a est masculin, ainsi qu’il est écrit : « puis tu compteras sept (chiv’a, et non chéva’) semaines » (Devarim 16, 9), [de sorte que l’on aurait dû avoir ici : chevou‘a zè, et non : chevou‘a zoth]. C’est pourquoi le mot chevou‘a signifie ici une période effective de sept jours. En français médiéval : « septaine » »
Et nous te donnerons
Le mot est au pluriel avec un hé en suffixe, comme dans : « allons, descendons, confondons » (supra 11, 7), « cuisons-les » (supra 11, 3). Ici aussi, le verbe signifie : « nous allons donner »
Egalement celle-là
Immédiatement après les sept jours de la noce, et tu me serviras après le mariage
29,28
Ainsi fit Jacob, il acheva la semaine de la première; puis Laban lui accorda Rachel, sa fille, pour épouse.
29,29
Laban donna, à Rachel sa fille, Bilha, son esclave, pour qu'elle devint la sienne.
29,30
Jacob s'unit pareillement à Rachel et persista à aimer Rachel plus que Léa; et il servit encore chez Laban sept autres années.
Encore sept autres années
« Autres » semblables aux premières. De même que Ya’aqov avait servi fidèlement pendant les premières années, de même a-t-il servi fidèlement les autres années, bien que Lavan l’eût trompé la première fois
29,31
Le Seigneur considéra que Léa était dédaignée et il rendit son sein fécond, tandis que Rachel fut stérile.
29,32
Léa conçut et enfanta un fils. Elle le nomma Ruben "parce que, dit elle, le Seigneur a vu mon humiliation, de sorte qu'à présent mon époux m'aimera."
Elle appela son nom Reouven (Reou vén)
Nos rabbins ont expliqué (Berakhoth 7b) : Elle a dit : « Voyez (reou) la différence entre (bén) mon fils et le fils de mon beau-père qui a vendu le droit d’aînesse à Ya’aqov ! Celui-ci [Reouven] ne le vendra pas à Yossef, et il ne se plaindra pas de lui, [à savoir de la préférence dont il sera l’objet]. Et non seulement il ne plaindra pas de lui, mais il s’efforcera de le faire sortir du puits ! »
29,33
Elle conçut de nouveau et enfanta un fils. Elle dit: "Parce que le Seigneur a entendu que j’étais dédaignée, il m’a accordé aussi celui là." Et elle l’appela Siméon.
29,34
Elle conçut de nouveau et enfanta un fils. Elle dit: "Ah! désormais mon époux me sera attaché, puisque je lui ai donné trois fils." C'est pourquoi on l'appela Lévi.
Cette fois mon mari m’accompagnera
Comme les matriarches étaient prophétesses, elles savaient que douze tribus naîtraient de Ya’aqov (Midrach tan‘houma Wayétsé 9). Or, il a épousé quatre femmes. Elle a donc voulu dire : « Il n’aura plus désormais à se plaindre de moi, puisque j’ai pris toute ma part en lui donnant trois fils » (Berakhoth 60a)
C’est pourquoi
Pour chacun des fils à l’occasion de la nomination duquel il est écrit : « c’est pourquoi », cette expression est l’annonce qu’il aura une descendance nombreuse, sauf pour la tribu de Léwi, chargée du transport de l’Arche Sainte, dont toute faute commise par ses membres était passible de mort (Beréchith raba 71, 4)
Il appela son nom Léwi
Le sujet du verbe « appeler » est ici au masculin (qara), alors qu’il est au féminin (watiqra ou qarea) pour les autres. Il existe un midrach dans Devarim raba : le Saint béni soit-Il a chargé l’ange Gavriel d’amener l’enfant devant Lui et c’est Lui qui lui a donné ce nom. Il lui a offert les vingt-quatre prérogatives dues aux prêtres. C’est parce qu’Il l’a accompagné (lewahou) de ces cadeaux qu’Il lui a donné le nom de Léwi (« accompagné »)
29,35
Elle conçut encore et mit au monde un fils et elle dit: "Pour le coup, je rends grâce à l’Éternel!" C’est pourquoi elle le nomma Juda. Alors elle cessa d’enfanter.
Cette fois
D’avoir pris plus que ma part. Désormais, j’ai de quoi remercier
30,1
Rachel, voyant qu'elle ne donnait pas d'enfants à Jacob, conçut de l'envie contre sa sœur et elle dit à Jacob." Rends moi mère, autrement j'en mourrai!"
Ra‘hel envia sa sœur
Elle a envié ses bonnes actions. Elle se disait : « Si elle n’était pas plus vertueuse que moi, elle n’aurait pas mérité d’avoir des enfants ! » (Beréchith raba 71, 6)
Donne-moi
Est-ce là ce que ton père a fait à ta mère ? N’a-t-il pas prié pour elle ? 
Et s’il n’y en a pas je suis morte
D’où l’on apprend que celui qui n’a pas d’enfants est considéré comme mort (Nedarim 64b, Beréchith raba 71, 6)
30,2
Jacob se fâcha contre Rachel et dit: "Suis je à la place de Dieu, qui t'a refusé la fécondité?"
A la place
Suis-je en Son lieu 
Qui t’a refusé
Tu me dis de faire comme mon père ! C’est que je ne suis pas comme mon père ! Mon père n’avait pas d’enfants. Moi, j’en ai ! C’est à toi que Dieu t’a refusé la fécondité, pas à moi 
30,3
Elle dit alors: "Voici ma servante Bilha, approche toi d'elle; elle enfantera dans mes bras, et, par elle, moi aussi je serai mère."
Sur mes genoux
Traduction du Targoum : « J’aurai des enfants »
Et je bâtirai moi aussi
Pourquoi « aussi » (gam) ? Voici ce qu’elle lui a dit : « Ton grand-père Avraham a eu des enfants de Hagar, et il a ceint ses reins [c’est-à-dire a imploré Dieu] pour Sara ». Ya’aqov lui a répondu : « Ma grand-mère avait fait entrer sa rivale dans sa maison ! ». Elle lui a répliqué : « Si c’est là le seul obstacle, voici ma servante... “et je bâtirai moi « aussi » par elle”
Et je bâtirai moi aussi par elle
"comme Sara" (Beréchith raba 71, 7)
30,4
Elle lui donna Bilha, son esclave, comme épouse et Jacob s'approcha d'elle.
30,5
Bilha conçut et enfanta un fils à Jacob.
30,6
Rachel dit alors: "Le Seigneur m'a jugée et il a écouté ma voix aussi en me donnant un fils." C'est pourquoi elle le nomma Dan.
Eloqim m’a jugée
Il m’avait jugée et condamnée, puis Il a reconnu mon innocence
30,7
Bilha, l'esclave de Rachel, conçut de nouveau et enfanta un second fils à Jacob.
30,8
Et Rachel dit: "C'est une lutte de Dieu que j'ai entreprise contre ma sœur et pourtant je triomphe!" Et elle le nomma Nephtali.
Les luttes (naftoulei) de Eloqim
Le grammairien Mena‘hem ben Sarouq a expliqué dans son Ma‘hbèrèth que le mot naftoulei possède la même racine que pethil (« entièrement clos d’un couvercle ») (Bamidbar 19, 15). L’expression employée ici signifie que Ra‘hel s’est « associée » avec sa sœur pour pouvoir mériter d’avoir elle aussi des enfants. Quant à moi, je la rattache à : ‘iqéch oufethaltol (« pervers et tortueux ») (Devarim 32, 5) : « Je me suis tournée de tous les côtés, j’ai usé d’insistance et j’ai mené des assauts multiples contre Dieu, pour être l’égale de ma sœur. 
Aussi l’ai-je emporté
Dieu m’a donné gain de cause. Le Targoum le traduit dans le sens de tefila (« prière ») : « J’ai adressé à Dieu des prières qu’Il a aimée
j’ai été écoutée
"j’ai été écoutée et exaucée comme ma sœur". Il existe de nombreux midrachim qui procèdent à ce jeu de mots que l’on appelle notariqon
30,9
Léa, voyant qu'elle avait discontinué d'enfanter, prit Zilpa, son esclave et la donna à Jacob comme épouse.
30,10
Zilpa, esclave de Léa, donna à Jacob un fils.
Zilpa engendra
Pour toutes les autres il est dit : « elle conçut », sauf pour Zilpa. C’est qu’elle était la plus jeune de toutes, encore une enfant, de sorte que sa grossesse n’a pas été pas apparente (Beréchith raba 71, 9). Et c’est elle que Lavan, pour tromper Ya’aqov, avait donnée à Léa comme servante, afin qu’il ne remarque pas qu’on lui faisait épouser l’aînée de ses filles. L’usage voulait, en effet, que l’on donne la servante la plus âgée à l’aînée, et la plus jeune à la cadette
30,11
Et Léa dit: "Une bande m'arrive!" Et elle le nomma Gad.
Le bonheur est venu
Comme dans la guemara : « sois heureux, mon bonheur, (gad guedi) et ne te relâche pas » (Chabath 67b), et comme dans : « vous qui dressez une table pour Gad (divinité du bonheur) » (Yecha’ya 65, 11). Et le midrach explique : il est né circoncis, comme dans : « Coupez (guedou) l’arbre » (Daniel 4, 11). Je ne sais pas pourquoi les deux mots ba et gad sont écrits en un seul mot (bagad). Autre explication : pourquoi bagad est-t-il écrit en un seul mot ? C’est comme si Léa avait voulu dire à son mari : « Tu m’as trahie (bagadeta) », lorsque tu t’es uni à ma servante, comme un homme qui trahit l’épouse de sa jeunesse
30,12
Zilpa, esclave de Léa, donna un second fils à Jacob.
30,13
Et Léa dit: "II est né pour mon bonheur! Oui, les filles m'ont nommée bienheureuse." Et elle l'appela Aser.
30,14
Or, Ruben étant allé aux champs à l'époque de la récolte du froment, y trouva des mandragores et les apporta à Léa sa mère. Rachel dit à Léa; "Donne-moi, je te prie, des mandragores de ton fils."
A l’époque de la récolte du froment
Ces mots sont écrits à l’éloge des chefs des futures tribus (Beréchith raba 72, 2). C’était l’époque de la récolte, et pourtant il ne s’est pas laissé aller à commettre un vol de froment ou d’orge. Il n’a ramassé que de ce qui n’appartenait à personne, d’une production à laquelle personne n’attachait d’importance
Des doudaïm (mandragores)
Des sigli (Sanhèdrin 99b). Des fleurs parfumées, espèce végétale que les Arabes appellent « jasmin »
30,15
Elle lui répondit: "N'est ce pas assez que tu te sois emparée de mon époux, sans prendre encore les mandragores de mon fils?" Rachel reprit: "Eh bien! Il reposera cette nuit avec toi en échange des mandragores de ton fils."
Et tu prendrais aussi les doudaïm de mon fils
C’est une exclamation. Tu ferais encore cela : « prendre aussi les doudaïm de mon fils » ! Le Targoum le traduit par un infinitif : « prendre »
Eh bien ! il couchera avec toi cette nuit
C’est à moi qu’appartenait cette nuit. Mais je te la donne en échange des doudaïm de ton fils. Et comme elle avait dédaigné la compagnie nocturne de ce juste, elle n’a pas mérité d’être enterrée dans la même tombe que lui (Beréchith raba 72, 3)
30,16
Jacob revenant des champs, le soir, Léa sortit à sa rencontre et dit: "C'est à mes côtés que tu viendras, car je t'ai retenu pour les mandragores de mon fils." Et il reposa près d'elle cette nuit là.
Car je t’ai loué
J’ai donné son dû à Ra‘hel
Cette nuit-là
Le pronom hou (dans cette nuit -» là ») s’applique à Lui. Le Saint béni soit-Il l’a aidé à engendrer Yissakhar (Nidda 31a, voir Berakhoth 99)
30,17
Le Seigneur exauça Léa: elle conçut et enfanta à Jacob un cinquième fils.
Eloqim entendit Léa
Qui désirait ardemment donner naissance à de nombreuses tribus (Beréchith raba 72, 5)
30,18
Et Léa dit "Le Seigneur m'a récompensée d'avoir donné mon esclave à mon époux." Et elle lui donna le nom d'Issachar.
30,19
Léa conçut de nouveau et donna un sixième fils à Jacob.
30,20
Et Léa dit: "Le Seigneur m'a accordée, moi, comme un don précieux; désormais mon époux fera de moi sa compagne, car je lui ai enfanté six fils." Et elle appela celui ci Zabulon.
Une bonne part
Conformément à la traduction du Targoum
Il demeurera près de moi
Dans le sens de : « une maison qui sert de demeure » (I Melakhim 8, 13). En français médiéval : « herbergerie ». Désormais le lieu de résidence principal de Ya’aqov sera auprès de moi, car j’ai donné naissance à autant de fils que toutes ses autres femmes réunies
30,21
Plus tard elle enfanta une fille et elle la nomma Dina.
Dina
Nos rabbins ont expliqué que Léa, [qui savait par intuition prophétique que Ya‘aqov aurait douze fils], prononça un jugement (din) contre elle-même : « Si c’est un garçon, ma sœur Ra‘hél ne sera même pas à égalité avec l’une des servantes ». Aussi a-t-elle prié au sujet de cet enfant, qui est devenu une fille (Berakhoth 60a)
30,22
Le Seigneur se souvint de Rachel: il l'exauça et donna la fécondité à son sein.
Eloqim se souvint de Ra‘hel
Il s’est souvenu d’elle, car elle avait transmis ses signes de reconnaissance – convenus avec Ya’aqov – à sa sœur, et parce qu’elle était redoutait d’être destinée à ‘Essaw, au cas où Ya’aqov l’aurait répudiée à cause de sa stérilité (Beréchith raba 73, 4). ‘Essaw l’impie avait d’ailleurs eu cette idée lorsqu’il avait appris qu’elle n’avait pas d’enfants. C’est ce que dit le poète dans la liturgie du premier jour de Roch haChana : « Le roux [désignation pour ‘Essaw], voyant qu’elle n’avait pas d’enfant, a désiré la prendre pour lui, et elle en était accablée. 
30,23
Elle conçut et enfanta un fils; et elle dit: "Dieu a effacé ma honte."
Eloqim a ôté (assaf)
Il l’a enfermée de manière qu’on ne la voie plus, comme dans : « enlève (èssof) notre honte » (Yecha’ya 4, 1), « et ne sera pas rentré (velo yéasséf) à la maison » (Chemoth 9, 19), « voilent (asfou) leur éclat » (Yoél 4, 15), « ta lune ne se retirera (yéasséf) jamais » (Yecha’ya 60, 20), [dans le sens de : elle ne sera jamais éclipsée]
Ma honte
J’étais un sujet de honte parce que j’étais stérile, et on disait à mon sujet que j’allais être destinée à ‘Essaw, l’impie. Le midrach explique : aussi longtemps qu’une femme n’a pas de fils, elle n’a personne sur qui rejeter ses fautes (Beréchith raba 73, 5). A partir du moment où elle a un fils, c’est sur lui qu’elle les rejette : « Qui a brisé ce vase ? - Ton fils ! ». « Qui a mangé ces figues ? - Ton fils ! »
30,24
Elle énonça son nom Joseph, en disant "Dieu veuille me donner encore un second fils!"
Que Hachem m’ajoute un autre fils
Comme elle savait par intuition prophétique que Ya’aqov ne donnerait naissance qu’à douze tribus (Beréchith raba 72, 6), elle a dit : « Que ce soit Sa volonté que celui à qui il donnera encore naissance soit de moi ! ». C’est pourquoi, elle ne pria que pour un seul autre fils
30,25
Or, après que Rachel eut donné le jour à Joseph, Jacob dit à Laban: "Laisse moi partir, que je retourne chez moi, dans mon pays.
Lorsque Ra‘hel eut engendré Yossef
Lorsque le mauvais génie de ‘Essaw est venu au monde (Beréchith raba 73, 6), ainsi qu’il est écrit : « la maison de Ya‘aqov sera feu, la maison de Yossef flamme, et la maison de ‘Essaw, paille » (‘Ovadya 1, 18). Un feu qui ne produit pas de flamme est sans action à distance. Lorsque Yossef est né, Ya’aqov a été assuré que le Saint béni soit-Il lui donnerait la victoire et il a pris la décision de rentrer chez lui
30,26
Donne moi mes femmes et mes enfants, ces femmes pour lesquelles je t'ai servi et que je m'en aille: car tu sais toi même avec quel zèle je t'ai servi."
Donne-moi mes femmes
Je ne veux partir qu’avec ton autorisation
30,27
Laban lui répondit: "Ah! Si je trouvais grâce à tes yeux! J'avais bien auguré; l'Éternel m'a béni à cause de toi."
J’ai deviné
Il était devin (Targoum yonathan). J’ai su par mes moyens de divination que c’était par toi que la bénédiction était venue à moi. Lorsque tu es arrivé ici, je n’avais pas de fils, ainsi qu’il est écrit : « Et voici Ra‘hel sa fille vient avec le bétail » (supra 29, 6). Se pourrait-il qu’ayant eu des fils il ait envoyé sa fille parmi des bergers ? A présent il avait des fils, ainsi qu’il est écrit : « les paroles des fils de Lavan » (infra 31, 1)
30,28
II continua: "Dicte moi ton salaire, je le donnerai."
Fixe-moi
Traduction du Targoum : « Dis clairement ton salaire »
30,29
Il lui répondit: "Tu sais comment je t'ai servi et ce qu'est devenu ton bétail entre mes mains.
Et ce qu’était ton bétail avec moi
Tu sais la faiblesse numérique de ton bétail lorsque tu me l’as confié
30,30
Oui, de faible qu'il était avant moi, il s'est accru considérablement et l'Éternel t'a béni grâce à moi. Et maintenant, quand travaillerai-je à mon tour pour ma famille?"
Grâce à moi (leragli – littéralement : « à mon pied »)
Avec mon pied. En même temps que j’ai mis le pied chez toi, est arrivée chez toi la bénédiction, comme dans : « et tout le peuple qui t’obéit (beraglèkha – littéralement : “qui est à tes pieds”) » (Chemoth 11, 8), « le peuple qui me suit (beraglaï – littéralement : “qui est à mes pieds”) » (Choftim 8, 5)
Moi aussi pour ma maison
Pour les besoins de ma maison. En ce moment, seuls mes fils travaillent pour mes besoins, mais il me faut moi aussi travailler avec eux pour les aider (Beréchith raba 73, 8). Tel est le sens de « aussi »
30,31
II répondit: "Que te donnerai-je?" Jacob répliqua: "Tu ne me donneras rien; mais si tu m'accordes la chose que voici, je recommencerai à conduire ton menu bétail, à le surveiller.
30,32
Je passerai en revue tout ton bétail aujourd'hui pour en écarter tous les agneaux pointillés et mouchetés et tous les agneaux bruns, parmi les brebis et les chevreaux mouchetés et pointillés, parmi les chèvres: ce sera mon salaire.
Marqués de points
Tachetés de taches fines comme des points. En français médiéval : « pointurés »
Et tacheté
Dans le sens de « taches », de taches larges
Roux
Brun foncé, se rapprochant du rouge. En français : « rouge ». La michna emploie ce mot pour désigner des épis de blé rougeâtres qui tournent ensuite au blanc (Baba Batra 5, 6)
Ce sera mon salaire
Ceux qui naîtront à partir de ce moment-là, marqués de points et tachetés chez les chèvres, et roux chez les agneaux, seront à moi. Quant à ceux qui présentent actuellement ces caractéristiques, retire-les et confie-les à tes fils, afin que tu ne me dises pas à propos de ceux qui naîtront à partir de maintenant : « Ceux-là étaient déjà là ! ». Et afin que tu ne me dises pas non plus : « C’est par les mâles marqués de points et tachetés que les femelles, à partir de ce moment-là, ont donné naissance à des petits de même aspect »
30,33
Mon droit parlera pour moi au jour à venir, où tu viendras vérifier mon salaire par tes yeux tout ce qui ne sera pas pointillé ou moucheté parmi les chèvres, brun parmi les brebis, je l'aurai volé."
Ma justice répondra pour moi...
Si tu devais en venir à me soupçonner d’avoir pris quoi que ce soit de ce qui t’appartient, ma justice répondra pour moi. Elle viendra témoigner de l’honnêteté de mon salaire devant toi, parce que tu ne trouveras dans mon troupeau que des bêtes marquées de points et tachetées. Et si tu devais en trouver qui ne soit ni marquée de points ni tachetée ni rousse, tu sauras que je te l’ai volée, et que c’est par le vol qu’elle se trouve chez moi
30,34
Laban répondit: "Bien; qu'il en soit comme tu as dit."
Bien (hén)
Le mot hén dénote une acceptation de ce qui vient d’être dit
Qu’il en soit selon ta parole
Pourvu que tu le veuilles ainsi 
30,35
Il mit à part, ce jour même, les boucs rayés ou mouchetés, toutes les chèvres pointillées ou mouchetées, tout ce qui était mêlé de blanc et toutes les brebis brunes et il les remit entre les mains de ses fils.
Il ôta
Lavan
Ce jour-là
Mâles
Tout ce qui avait du blanc
Toutes les bêtes qui portaient une marque blanche
Il les remit dans les mains de ses fils
Lavan
30,36
Il mit une distance de trois journées entre lui et Jacob; et Jacob conduisit paître le reste du troupeau de Laban.
Qui restait
Les mauvaises, les malades et les stériles qui n’étaient que des « restes ». Celles-là, Lavan les lui a données (Beréchith raba 73, 9)
30,37
Or, Jacob se pourvut de rameaux verts de peuplier, d'amandier et de platane; il y pratiqua des entailles blanches en mettant à découvert la blancheur des rameaux.
De rameaux verts de peuplier
D’un arbre appelé livnè, comme dans : « au pied du chêne, du peuplier (livnè) et du térébinthe » (Hoché‘a 4, 13). Cet arbre s’identifie, à mon avis, à celui appelé en français le tremble, qui est de couleur blanche (levana)
Verts
Lorsqu’ils sont encore humides de sa sève
D’amandier
Il a pris aussi une branche de louz, arbre sur lequel poussent des noisettes. En français médiéval : « coldre »
Et de châtaignier (’armon)
En français médiéval : « chastenier »
Des entailles
Il a taillé l’écorce et strié le bâton
Ecorçant le blanc
Le blanc du bâton devenait ainsi visible. Lorsqu’il le dépouillait de l’écorce, le blanc apparaissait à l’endroit ainsi incisé
30,38
Il fixa les rameaux, ainsi écorcés, dans les rigoles, dans les auges où le menu bétail venait boire en face du menu bétail et entrait en chaleur en venant ainsi boire.
Il fixa
Le Targoum traduit par : « il enfonça », en employant le mot araméen oude‘its, qui signifie une action de pénétration, d’enfoncement. Il existe de nombreux exemples similaires dans la guemara comme dans : « s’il a enfoncé (datsa) et retiré » (Chabath 50b), ou dans : « il y a enfoncé (dats) quelque chose » (‘Houlin 93b), où dats est une forme abrégée de da‘atsa
Dans les rigoles (barehatim)
Là où l’eau court (meroutsoth) dans les sillons creusés dans la terre pour y abreuver le bétail [rehat étant l’équivalent araméen de routs (« courir »)]
Où le troupeau venait boire...
Dans les rigoles où le menu bétail venait boire, il a fixé les rameaux en face des animaux
Il entrait en chaleur
Lorsque la bête voyait les rameaux, elle effectuait un mouvement de recul vers le mâle, qui s’accouplait avec elle. Il en naissait des petits de la même couleur que les rameaux. Rabi Hocha’ya a enseigné : l’eau devenait de la semence dans leurs entrailles, et elles n’avaient pas besoin de mâle, d’où les mots : « il [à savoir les femelles] entrait en chaleur... » (Beréchith raba 73, 10)
30,39
Les brebis s'échauffèrent devant les rameaux et produisirent des agneaux rayés, pointillés, mouchetés.
Devant les rameaux
A la vue des rameaux
Marquetés (‘aqoudim)
D’une couleur différente à l’endroit où on les attache (‘aqéda), c’est-à-dire aux chevilles des pattes de devant et à celles des pattes de derrière
30,40
Ces agneaux, Jacob les tenait à distance et il tournait la face du bétail de Laban, du coté des tachetés et des bruns; plus tard il les réunit en troupeau pour lui seul et ne les mêla point au bétail de Laban.
Ces agneaux
Ceux qui étaient nés marqués aux chevilles et mouchetés, il les a séparés, les a mis à part et en a fait un troupeau distinct qu’il a fait marcher devant les brebis. Les brebis qui suivaient les regardaient. C’est ce que veut dire : « il tourna la face du troupeau vers ceux qui étaient marquetés », c’est-à-dire que les brebis étaient tournées vers les bêtes marquetées. Et de toutes les brebis rousses qu’il avait trouvées dans le bétail de Lavan
Il plaça les troupeaux
comme je viens de l’expliquer
30,41
Or, chaque fois que les brebis se livraient avec ardeur à l'accouplement, Jacob exposait les rameaux à leurs regards, dans les rigoles, pour qu'elles conçussent devant ces rameaux,
Les plus vigoureuses (hameqoucharoth)
Traduction du Targoum : les premières à mettre bas. Il n’existe pas d’autre exemple d’emploi de ce mot dans le texte qui permette de prouver que c’est bien là le sens. Le grammairien Mena‘hem le rattache à la notion de « lien », comme dans : « A’hitophel était parmi les conjurés (baqochrim) » (II Chemouel 15, 31), « la conspiration (haqèchèr) devint puissante » (II Chemouel 15, 12). Elles s’accouplaient (mithqacheroth) pour hâter leur gestation
30,42
mais quand elles s'y livraient languissamment, il ne le faisait point: de sorte que les agneaux débiles furent pour Laban, les vigoureux pour Jacob.
Et quand elles étaient chétives (ouveha‘atif)
Le mot a le sens de « tarder », comme le traduit le Targoum. Et le grammairien Mena‘hem le compare au verset : « les vêtements de fête, les manteaux (ma‘atafoth) » (Yecha’ya 3, 22), dans le sens de « s’envelopper dans un manteau », c’est-à-dire qu’elles s’enveloppaient dans leur peau et leur laine et ne désiraient pas s’accoupler avec les mâles
30,43
Cet homme s'enrichit prodigieusement; il acquit du menu bétail en quantité, des esclaves mâles et femelles, des chameaux et des ânes.
Un bétail nombreux
Plus prolifique que le reste du bétail
Et des servantes
Acquis en vendant son bétail à bon prix
31,1
Or, il fut instruit des propos des fils de Laban, qui disaient: "Jacob s'est emparé de tout ce que possédait notre père; c'est des biens de notre père qu'il a créé toute cette opulence."
Il s’est fait
Il a amassé, comme dans : « Il a levé (waya‘ass) une troupe et il a battu ‘Amaleq » (I Chemouel 14, 48)
31,2
Jacob remarqua que la face de Laban n'était plus à son égard comme précédemment.
31,3
Et l'Éternel dit à Jacob: "Retourne au pays de tes pères, dans ton lieu natal; je serai avec toi."
Retourne au pays de tes pères
Et là-bas « je serai avec toi » (Midrach tan‘houma Wayétsé 10). Mais tant que tu resteras attaché à cet homme impur, il sera impossible de faire reposer sur toi ma chekhina
31,4
Alors Jacob envoya quérir Rachel et Léa aux champs, près de son troupeau;
Ya‘aqov envoya appeler Ra‘hel et Léa
D’abord Ra‘hel, et ensuite Léa. Parce que Ra‘hel était le « fondement de son foyer », étant donné que c’est pour elle que Ya’aqov avait voulu entrer dans la famille de Lavan. Même les enfants de Léa ont reconnu cette préséance (Beréchith raba 71, 2), puisque Bo’az et son tribunal, descendants de la tribu de Yehouda, ont déclaré : « semblable à Ra‘hel et à Léa qui ont édifié à elles deux... » (Routh 4, 11), accordant ainsi une primauté à Ra‘hel sur Léa
31,5
et il leur dit: "Je vois, au visage de votre père, qu'il n'est plus pour moi comme hier ni avant hier; mais le Dieu de mon père a été avec moi.
31,6
Pour vous, vous savez que j'ai servi votre père de toutes mes forces,
31,7
tandis que votre père s'est joué de moi et dix fois a changé mon salaire; mais Dieu n'a pas permis qu'il me fit du tort.
Dix fois
On ne dénombre jamais à moins de dix, [étant donné qu’un nombre inférieur n’est significatif que d’une quantité négligeable] (Beréchith raba 74, 3)
Fois
Le mot monim veut dire « décompte effectué dix fois ». D’où nous apprenons que c’est à cent reprises que Lavan avait changé ses conditions, [‘assèreth monim voulant donc dire : « dix fois dix »]
31,8
Lorsqu'il parlait ainsi: ‘Les bêtes pointillées seront ton salaire’, tout le bétail produisait des animaux pointillés; disait-il: ‘Les rayés seront ton salaire’, tout le bétail en produisait des rayés.
31,9
C'est Dieu qui a dégagé le bétail de votre père et me l'a donné.
31,10
Or, à l'époque où les troupeaux s'accouplent, je levai les yeux et j'eus une vision et voici que les mâles qui fécondaient le bétail étaient rayés, pointillés et grivelés.
Et voici que les boucs
Bien que Lavan les eût tous mis à part afin que les brebis ne donnent pas naissance à des petits à leur ressemblance, les anges les amenaient depuis le troupeau confié aux fils de Lavan vers celui détenu par Ya’aqov (Beréchith raba 73, 10)
Et grivelés (ouveroudim)
Traduction du Targoum : « tachés ». En français médiéval : « peised » [de la même racine que « pois »]. Un filet blanc faisait tout le tour du corps de la bête, ses taches étaient séparées et passaient de bout en bout. Je n’ai pas trouvé d’autre occurrence de ce mot dans tout le texte biblique
31,11
Un envoyé du Seigneur me dit dans la vision: ‘Jacob!’ Je répondis: ‘Me voici.’
31,12
II reprit: ‘Lève les yeux et regarde; tous les mâles qui fécondent le bétail sont rayés, pointillés et grivelés. C'est que j'ai vu la conduite de Laban à ton égard.
31,13
Je suis la Divinité de Béthel, où tu as consacré un monument, où tu as prononcé un vœu en mon honneur. Maintenant, dispose-toi à sortir de ce pays et retourne au pays de ta naissance.’ "
Le Qél de Beith-El
L’article ha (« le ») est en trop, mais le texte a l’habitude de parler ainsi, comme dans : « comme vous allez entrer dans “le pays” (haarets) de Kena‘an » (Bamidbar 34, 2)
Où tu as oint
Expression d’élévation, de grandeur, de même que pour la consécration d’un roi, comme dans : « il versa de l’huile à son sommet [de la pierre] » (supra 28, 18), afin qu’elle soit consacrée comme autel
Où tu as prononcé envers moi un vœu
Et tu devras t’en acquitter. Tu as dit que la pierre que tu as érigée en monument deviendra « la maison de Eloqim » (supra 28, 22). Il faudra donc que tu y offres des sacrifices (Midrach tan‘houma Wayichla‘h 8)
31,14
Pour réponse, Rachel et Léa lui dirent: "Est il encore pour nous une part et un héritage dans la maison de notre père?
Avons-nous encore
Pourquoi nous opposerions-nous à ton départ ? Nous ne nous attendons à aucune part dans l’héritage de notre père, [puisqu’il a des fils]
31,15
N'avons nous pas été considérées par lui comme des étrangères, puisqu'il nous a vendues? Il a consommé, oui, consommé notre bien!
N’avons-nous pas été considérées par lui comme des étrangères
Là même où il est d’usage de doter ses filles, au moment de leur mariage, il s’est conduit envers nous comme envers des étrangères, « puisqu’il nous a vendues » à toi en rétribution de ton travail
Notre argent
Car il a retenu le montant de tes salaires
31,16
Certes, toute la fortune que Dieu a retirée à notre père, elle est à nous et à nos enfants; et maintenant, tout ce que Dieu t'a dit, fais le."
Car toute la richesse
La conjonction ki a ici le sens de èla (« mais »). C’est-à-dire : « De chez notre père, nous ne possédons rien. Mais ce que le Saint béni soit-Il a ôté de chez lui est bien à nous. 
Qu’Il a sauvée
Dans le sens de « Il a séparé ». Toutes les fois que l’on trouve, dans le texte, le mot hatsala, il exprime l’idée d’une « mise à l’abri » du mal, de l’ennemi
31,17
Jacob s’y disposa. Il fit monter ses fils et ses femmes sur les chameaux;
Ses fils et ses femmes
Il a fait passer les hommes avant les femmes (Beréchith raba 74, 5), tandis que ‘Essaw a donné le pas aux femmes sur les hommes, ainsi qu’il est écrit : « ‘Essaw prit ses femmes et ses fils... » (infra 36, 6)
31,18
il emmena tout son bétail avec tous les biens qu’il avait amassés, possessions à lui, qu’il avait acquises dans le territoire d'Aram et s’achemina vers son père Isaac au pays de Canaan.
Le bétail qu’il possédait
Tout ce qu’il avait acquis en échange de son bétail : serviteurs, servantes, chameaux et ânes
31,19
Comme Laban était allé faire la tonte de ses brebis, Rachel déroba les pénates de son père.
Tondre son bétail
Dont il avait chargé ses fils, à trois jours de marche entre lui et Ya’aqov
Ra‘hel déroba les pénates
Dans l’intention de détacher son père de l’idolâtrie
31,20
Jacob trompa l'esprit de Laban l'Araméen, en s'enfuyant sans lui rien dire.
31,21
II s'enfuit donc, lui et tout ce qui lui appartenait; il se mit en devoir de passer le fleuve, puis il se dirigea vers le mont Galaad.
31,22
Laban fut informé, le troisième jour, que Jacob s'était enfui.
Le troisième jour
Puisqu’ils étaient séparés par une distance de trois jours de marche
31,23
Il prit ses frères avec lui, le poursuivit l'espace de sept journées et le joignit au mont Galaad.
Ses frères
Ses proches parents
Un chemin de sept journées
Pendant les trois jours que le messager de Lavan a dû employer pour rebrousser chemin afin de lui rendre compte, Ya’aqov a poursuivi son trajet. Il en est résulté que Ya’aqov s’est alors trouvé à une distance de six jours par rapport à Lavan, et pourtant Lavan l’a rattrapé dès le septième jour,. Nous en déduisons que Lavan a pu franchir en une journée tout le chemin que Ya‘aqov avait mis sept jours à parcourir, ainsi qu’il est écrit : « il le poursuivit un chemin de sept journées », et non : « il le poursuivit pendant sept jours »
31,24
Mais Dieu visita Laban l'Araméen dans un songe nocturne et lui dit: "Garde toi d'interpeller Jacob, en bien ou en mal."
En bien ou en mal
Ce qui est un bien chez les impies est un mal pour les justes (Yevamoth 103b)
31,25
Laban arriva jusqu'à Jacob. Or, Jacob avait dressé sa tente sur la montagne et Laban posta ses frères sur la même montagne de Galaad.
31,26
Laban dit à Jacob: "Qu'as-tu fait? Tu as abusé mon esprit et tu as emmené mes filles comme des prisonnières de guerre!
Comme des prisonnières de guerre
Littéralement : « comme des prisonnières d’épée ». Toute troupe qui vient faire la guerre s’appelle une « épée »
31,27
Pourquoi t'es tu enfui furtivement et m'as tu trompé et ne m'as tu rien dit? Mais je t'aurais reconduit avec allégresse, avec des chants, au son du tambourin et de la harpe!
M’as-tu volé
Tu as « volé » ma pensée [c’est-à-dire « abusé de ma confiance », comme dit au verset précédent]
31,28
Et puis, tu ne m'as pas laissé embrasser mes fils et mes filles! Certes, tu as agi en insensé.
31,29
Il serait au pouvoir de ma main de vous faire du mal; mais le Dieu de votre père, cette nuit, m'a parlé ainsi: ‘Garde toi d'interpeller Jacob, soit en bien, soit en mal.’
J’ai en ma main le pouvoir (él)
Ma main détient la force et la puissance de vous faire du mal. Le mot él, lorsqu’il désigne Dieu, signifie « puissance, plénitude de force »
31,30
Et maintenant que tu t'en vas, parce que tu soupires après la maison de ton père, pourquoi as tu dérobé mes dieux?"
Tu languissais (nikhsafta)
Tu désirais. On trouve souvent ce mot dans le texte : « mon âme languissait (nikhsefa) et soupirait » (Tehilim 84, 3), « tu languirais (tikhsof) après l’œuvre de tes mains » (Iyov 14, 15)
31,31
Jacob répondit en ces termes à Laban: "J'ai craint, parce que je me disais que tu pourrais m'enlever de force tes filles.
J’avais peur...
Il commence par répondre à la première question, celle où il lui disait : « et tu as emmené mes filles... » (verset 26)
31,32
Quant à celui que tu trouverais en possession de tes dieux, qu'il cesse de vivre! En présence de nos frères, vérifie toi même ce qui est par devers moi et reprends ton bien." Or, Jacob ne savait pas que Rachel les avait dérobés.
Qu’il ne vive pas
C’est de cette malédiction que Ra‘hel est morte en cours de trajet (Beréchith raba 74, 9)
Ce qui est avec moi
De ce qui t’appartient
31,33
Laban entra dans la tente de Jacob, dans celle de Léa, dans celle des deux servantes et ne les trouva point. Étant sorti de la tente de Léa, il entra dans celle de Rachel.
Dans la tente de Ya’aqov
C’était la tente de Ra‘hel, car c’est chez elle que vivait habituellement Ya’aqov. C’est pourquoi il est écrit : « les fils de Ra‘hel, femme de Ya’aqov » (infra 46, 19), tandis qu’on ne trouve pas chez les autres femmes l’indication : « femme de Ya’aqov » (Beréchith raba 74, 9)
Il vint dans la tente de Ra‘hel
Lorsqu’il est sorti de la tente de Léa, il est revenu vers celle de Ra‘hel, avant de commencer de chercher dans celle des servantes. Et pourquoi cela ? Parce qu’il la savait touche-à-tout (Beréchith raba 74, 9)
31,34
Mais Rachel avait pris les pénates, les avait cachés dans la selle du chameau et s'était assise dessus. Laban fouilla toute la tente et ne les trouva point.
Dans la selle du chameau
Le mot kar (« selle ») a le même sens que dans l’expression talmudique « coussins (karim) et oreillers ». Traduction du Targoum : « la selle (‘avita) du chameau ». C’est une selle confectionnée comme un coussin. On trouve le même terme dans la guemara : « ils l’avaient entouré de selles (‘avité) » (‘Erouvin 16a), où il s’agit de selles de chameaux. En français médiéval : « bastel »
31,35
Elle dit à son père: "Ne sois pas offensé, mon seigneur, si je ne puis me lever devant toi à cause de l'incommodité habituelle des femmes." II chercha encore et il ne trouva point les pénates.
31,36
Jacob s'emporta en plaintes contre Laban; il se récria, disant à Laban: "Quel est mon crime, quelle est ma faute, pour que tu t'acharnes après moi?
Pour que tu t’acharnes (dalaqta)
Pour que tu m’aies poursuivi, comme dans : « ils nous ont poursuivis (dalaqnou) sur les montagnes » (Eikha 4, 19), « cette poursuite (medaléq) des Plichtim » (I Chemouel 17, 53)
31,37
Après avoir fureté tout mon ménage, qu'as tu découvert qui appartienne à ta maison? Expose le ici, en présence de mes frères et des tiens et qu’ils se prononcent entre nous deux!
Ils décideront
Ils désigneront celui qui est dans son droit. « Aprover » en français
31,38
Ces vingt ans que j’ai été chez toi, tes brebis, ni tes chèvres n’ont avorté et les béliers de ton troupeau, je n’en ai point mangé.
N’ont pas avorté (chiqélou)
N’ont pas perdu leur portée, comme dans : « une matrice sujet à avorter (machkil) » (Hoché‘a 9, 14), « sa vache vêle et n’avorte pas (thechakél) » (Iyov 21, 10)
Et les béliers de ton troupeau
D’où l’on pose la règle qu’un agneau mâle peut être appelé « bélier » même s’il n’est âgé que d’un jour (Baba Qama 65b). Car sinon, quelle valeur l’argument posséderait-il ? Des béliers, il n’en aurait pas mangé, mais des moutons, si. Il serait donc de toute façon un voleur 
31,39
La bête mise en pièces, je ne te l’ai point rapportée; c’est moi qui en souffrais le dommage, tu me la faisais payer, qu'elle eût été prise le jour, qu'elle eût été ravie la nuit.
La bête déchirée
Par un lion ou par un loup
Qui la remplaçais (a‘haténna)
Dans le même sens que : « et avec la pierre de leurs frondes, ils visaient un cheveu sans le manquer (welo ya‘hati) » (Choftim 20, 16), « moi et mon fils Salomon, nous serons déchus (‘hataïm) » (I Melakhim 1, 21), c’est-à-dire « privés de nos droits ». C’est moi qui supportais le préjudice. S’il manquait une bête, c’est à moi qu’elle manquait, car tu me la faisais remplacer
Qui la remplaçais
Traduction du Targoum : « ce qui manquait au compte », c’est-à-dire ce qui manquait et avait été enlevé, comme dans : « et il n’en manque pas un seul » (Bamidbar 31, 49), où le Targoum traduit de la même manière
Qu’elle eût été volée de jour
Que le vol ait eu lieu de jour ou de nuit, je payais tout
Qu’elle eût été volée (guenouvthi)
Le suffixe en i est le même que dans : « elle, si puissante (rabathi) parmi les peuples... elle qui était souveraine (sarathi) parmi les provinces » (Eikha 1, 1), « pleine (meléathi) de justice » (Yecha’ya 1, 21), « aimant (ohavti) à fouler le blé » (Hoché‘a 10, 11)
31,40
J'étais, le jour, en proie au hâle et aux frimas la nuit; et le sommeil fuyait de mes yeux.
Dévoré (akholani) par la chaleur
Dans le sens de : « un feu dévorant (okhla) » (Devarim 4, 24)
La gelée (qèra‘h)
Comme dans : « Il lance des glaçons (qar‘ho) » (Tehilim 147, 17). Le Targoum traduit par « glace »
Mon sommeil
Chenathi (« mon sommeil ») est dérivé du mot china (« sommeil »)
31,41
J'ai passé ainsi vingt années dans ta maison! Je t'ai servi quatorze ans pour tes deux filles et six ans pour ton menu bétail et tu as changé dix fois mon salaire.
Tu as changé mon salaire
Tu changeais les conditions convenues entre nous : des bêtes marquées de points aux bêtes tachetées, et des bêtes rayées aux grêlées
31,42
Si le Dieu de mon père, le Dieu d'Abraham et celui que révère Isaac ne m'était venu en aide, certes, actuellement tu m'aurais laissé partir les mains vides. Dieu a vu mon humiliation et le labeur de mes mains et il a prononcé hier."
Et la frayeur de Yits‘haq
Il n’a pas voulu dire : « Eloqim de Yits‘haq », car le Saint béni soit-Il n’associe pas de leur vivant Son nom à celui des justes (Midrach tan‘houma Toldoth 7). Il est vrai qu’Il lui a dit, lorsqu’il est sorti de Beér Chèva’ : « Je suis Hachem, le Eloqim d’Avraham ton père et Eloqim de Yits‘haq » (supra 28, 13). Mais c’est parce que la vue de Yits‘haq avait baissé, et qu’il était donc considéré comme mort. Ya’aqov n’a donc pas osé dire : « Eloqim de Yits‘haq », et il a préféré parler de « la frayeur de Yits‘haq »
Il a jugé hier
En ce sens qu’Il a « réprouvé », et non qu’Il a « décidé », [selon le sens que possède le mot au verset 37]
31,43
Laban répondit à Jacob: "Ces filles sont mes filles et ces fils sont mes fils et ce bétail est le mien; tout ce que tu vois m'appartient. Étant mes filles, comment agirais je contre elles, dès lors, ou contre les fils qu'elles ont enfantés?
Que ferais-je aujourd’hui à celles-ci
Comment pourrais-je envisager de leur faire du mal 
31,44
Maintenant, tiens, concluons une alliance, moi et toi, ce sera une alliance entre nous deux."
Il sera témoin
Le Saint béni soit-Il
31,45
Jacob prit une pierre et l'érigea en monument.
31,46
Et il dit à ses frères: "Ramassez des pierres." Ils prirent des pierres et en firent un monceau et l'on mangea là, sur le monceau.
A ses frères
A ses fils, qui étaient pour lui comme des frères. Ils étaient à ses côtés dans le malheur et dans la lutte (Beréchith raba 74, 13)
31,47
Laban l'appela Yegar Sahadouthâ et Jacob le nomma Galed.
Yegar sahadoutha
Le monceau du témoignage. C’est la traduction araméenne de Guil’ad
31,48
Laban avait dit: "Ce monceau est un témoin entre nous deux dès aujourd'hui." De là on énonça son nom Galed;
Il le nomma ainsi Galed
Gal'e
31,49
et aussi Miçpa, parce qu'il dit: "L'Éternel sera présent entre nous deux, alors que nous serons cachés l'un à l'autre.
Et aussi Mitspa
Mitspa se trouve dans la montagne de Guil’ad, ainsi qu’il est écrit : « il traversa Mitspa-Guil’ad » (Choftim 11, 29). Et pourquoi ce nom de Mitspa ? Parce que chacun a dit à l’autre : « Veuille Hachem regarder (yitsèf) entre moi et entre toi si tu trahis l’alliance ! »
Alors que nous serons cachés
Et que nous ne nous verrons pas l’un l’autre
31,50
Si tu outrageais mes filles; si tu associais d'autres épouses à mes filles nul n'est avec nous; mais vois! Dieu est témoin entre moi et toi!"
Mes filles... mes filles
Deux fois. Bilha et Zilpa aussi étaient ses filles, nées d’une concubine (Pirqé deRabi Eli‘èzèr 36)
Si tu humiliais mes filles
En leur refusant les rapports conjugaux (Yoma 77b)
31,51
Laban dit à Jacob: "Tu vois ce monceau, tu vois ce monument que j'ai posé entre nous deux; soit témoin ce monceau,
J’ai érigé (yarithi)
Comme dans : « Il les a précipités (yara) dans la mer » (Chemoth 15, 4). Comme le geste de « lancer » une flèche, [où le lanceur se vante ensuite de sa prouesse, à l’image de Lavan qui se vante ici d’une construction à laquelle il n’a pas participé personnellement (voir versets 45 et 46)]
31,52
soit témoin cette pierre, que je ne dépasserai point de ton côté ce monceau, que tu ne dépasseras point de mon côté ce monceau ni cette pierre, dans des vues mauvaises.
Que moi
La conjonction im (« si ») a ici le sens de achèr (« que »), comme dans : « jusqu’à ce que (‘ad im) j’aie dit mes paroles » (supra 24, 33)
Pour le mal
C’est pour le mal que tu n’as pas le droit de le dépasser, mais tu as le droit de le dépasser pour des actes de commerce (Beréchith raba 74, 15)
31,53
Puissent nous juger le Dieu d'Abraham et le dieu de Nahor, les divinités de leur père!" Et Jacob jura par le Dieu révéré de son père Isaac.
Eloqim d’Avraham
Le nom de Dieu ici est sacré
Et le dieu de Na‘hor
Le nom divin est employé ici dans un sens profane
Les divinités de leur père
Dans un sens profane (Beréchith raba 74, 16)
31,54
Jacob égorgea des animaux sur la montagne et invita ses parents au festin. Ils y prirent part et passèrent la nuit sur la montagne.
Ya’aqov offrit un sacrifice
Il égorgea des bêtes pour le repas
Ses frères
Ses amis, qui étaient avec Lavan
A manger du pain
Tout ce que l’on mange s’appelle du « pain », comme dans : « il donna un grand festin (lè‘hèm – littéralement : « du pain ») » (Daniel 5, 1), « détruisons l’arbre avec son fruit (bela‘hmo – littéralement : « avec son pain ») » (Yirmeya 11, 19)
32,1
Laban se leva de bon matin, embrassa ses fils et ses filles et les bénit; puis il partit et s'en retourna chez lui.
32,2
Pour Jacob, il poursuivit son voyage; des envoyés du Seigneur se trouvèrent sur ses pas.
Des anges de Eloqim le rencontrèrent
Des anges d’Erets Israël sont venus à sa rencontre pour l’y accompagner (Beréchith raba 74)
32,3
Jacob dit en les voyant: "Ceci est la légion du Seigneur!" Et il appela cet endroit Mahanayim.
Ma‘hanayim
Deux camps, [le mot ma‘hanayim étant au duel] : les anges de l’extérieur du pays qui étaient venus avec lui jusque là, et ceux d’Erets Israël qui s’étaient portés à sa rencontre (Midrach tan‘houma Wayichla‘h)