Parachat Vayétsé. ’Hazal affirment que lorsque Ya'acov quitta ses parents pour se rendre chez Lavan, il fit une pause de quatorze ans d’Étude à la Yéchiva de Chem et Ever. Durant cette période, il était tellement absorbé par son Limoud (étude) qu’il ne dormit pas ![1]La Torah affirme que durant les 63 premières années de sa vie, Ya'acov était « Yochev Ohalim » — il passait son temps à étudier. Mais elle ne raconte pas qu’il n’a jamais dormi. Alors qu’est-ce qui permit à Ya'acov d’avoir cette force surnaturelle de ne pas dormir pendant ces 14 années (et qui dépasse ce qu’il avait accompli jusqu’alors) ? Rav Its’hak Berkovits explique que Ya'acov savait qu’il allait devoir affronter de grands défis chez son oncle. Ses Midot (traits de caractère) et son niveau spirituel allaient être mis à l’épreuve et il avait donc besoin de s’élever pour surmonter la difficulté et ne pas se laisser influencer par Lavan. Il réalisa qu’il devait mettre à profit chaque seconde de ces 14 années et étudier sans interruption. Il ne fait aucun doute que les 63 années précédentes furent également consacrées entièrement à la Torah avec beaucoup d’assiduité, mais l’urgence se faisait alors moins ressentir. On en déduit qu’une situation d’épreuve peut être le moteur de notre Messirout Néfech dans le service divin.

Comment mettre cet enseignement en application dans nos vies ? La Michna dans Avot propose plusieurs réponses : « Rabbi Tarfon dit : "La journée est courte, le travail est considérable, les employés sont paresseux, la récompense est importante et le Baal Habaït est pressant."[2] ». Rabbi Tarfon essaie ici de nous motiver à étudier et à grandir en insistant sur l’urgence de la situation.

« La journée est courte » — la vie est courte, elle passe sans que l’on s’en aperçoive et le temps perdu ne se rattrape pas. Et on ne peut pas savoir quand notre vie prendra fin – détail qui peut grandement motiver l’individu ! Rav Aharon Kotler note que la Michna utilise le mot « journée » au singulier, elle ne dit pas que nos jours sont courts, mais « le jour » est court. Ceci nous montre que chaque journée compte, a son rôle et son potentiel. Si l’on réalise que tout moment gaspillé est perdu à jamais, on fera plus attention à maximiser chaque instant.[3]

La Michna poursuit : « Le travail est considérable ». Il est évident que chaque domaine dans la Avodat Hachem demande beaucoup d’efforts et que le travail est infini. C’est bien sûr le cas de l’étude, qui n’a pas de limite (ni dans la profondeur ni dans les connaissances qu’elle procure), mais aussi des Midot – les échelons pour grimper sur « l’échelle des Midot » sont innombrables, on peut toujours améliorer son caractère.

« La récompense est importante » si l’on réalisait davantage l’ampleur du salaire réservé à chaque Mitsva, notre 'Avodat Hachem serait toute autre. Une autre Michna nous prévient d’accomplir les Mitsvot faciles autant que les plus difficiles, parce que nous ne connaissons pas leur récompense[4].

Comment parvenir à considérer toutes les Mitsvot de manière égale et à être motivé pour chacune d’elle ? Rav Noa’h Weinberg propose une idée : à la fin du repas du vendredi soir, quand on est bien fatigué et que l’on se prépare à aller dormir, on peut essayer de se motiver à étudier cinq minutes en se disant : « Si je recevais 1000 € pour ces cinq minutes d’étude, je serais prêt à le faire. Je sais, au moins intellectuellement, que le salaire dans le Olam Haba est infiniment plus grand que cela ! »

« Le Ba'al Habayit est pressant. » Hachem attend que nous fassions notre travail et que nous accomplissions notre mission – celle de parfaire le monde. La Guémara affirme que chacun devrait dire : « Le monde a été créé pour moi » — j’ai une part de responsabilité dans ce projet et je dois agir en conséquence. Hachem attend beaucoup de nous et nous devons fournir des résultats.

Baroukh Hachem, les Juifs vivant dans les pays démocratiques peuvent pratiquer leur religion librement. Mais ce confort peut nous faire oublier l’urgence de la nécessité d’améliorer notre 'Avodat Hachem. Rav Mordékhaï Gifter répondit à ceux qui lui demandèrent comment il était devenu un tel Talmid ’Hakham, qu’il considérait chaque jour comme pouvant être le dernier de sa vie. Cela l’incita à donner le meilleur de lui-même et à s’élever continuellement. Puisse son exemple nous inspirer !


[1] Vayétsé, Rachi, 28:1 qui rapporte Béréchit Raba, 68:6.

[2] Avot, 2:20

[3] Michnat Rabbi Aharon, 2ème vol., p. 109, rapporté dans Michel Avot, 1er vol., p. 399-400.

[4] Avot, 2:1.