Parachat Béchala'h. Alors que le peuple juif se préparait à sortir d’Égypte, Moché Rabbénou se soucia de récupérer les ossements de Yossef Hatsadik pour les enterrer en Erets Israël. La Guémara dans Sota rapporte un verset de Yéhochoua qui semble contredire le récit que la Torah nous fait dans la Paracha de cette semaine ; c’est le peuple juif, et non Moché Rabbénou, qui apporta les ossements de Yossef en Terre d’Israël. La Guémara répond que si une personne entame une Mitsva sans la terminer et que quelqu’un d’autre s’en charge, c’est le « Gomer », celui qui complète l’action qui est crédité de la Mitsva. Moché a seulement commencé la Mitsva d’enterrer Yossef en Erets Israël, mais ne put pas l’achever, c’est donc aux Bné Israël qu’elle revient.

Pourtant le Midrach So’her Tov affirme que le roi David est crédité de la construction du Beth Hamikdach, comme il est écrit dans les Téhilim : « Mizmor Chir ’Hanoukat Habaït Lédavid »[1] bien qu’il ne fit que commencer cette édification. Ceci laisse sous-entendre que la récompense est réservée au Mat’hil, à celui qui commence.[2] Rav Moché Feinstein résout cette contradiction. Il écrit que si le Mat’hil n’a pas terminé l’action commencée indépendamment de sa volonté, il en est tout de même gratifié. En revanche, s’il est fautif, même d’une erreur très subtile, c’est le Gomer qui est crédité.

David n’était absolument pas responsable de son incapacité à construire le Beth Hamikdach. Mais Moché ne put pas entrer en Erets Israël à cause de la faute des Mé Mériva, donc son incapacité à terminer l’enterrement de Yossef était en quelque sorte due à son erreur, ce qui explique que la Mitsva ne soit pas mentionnée en son nom.[3]

La faute de Moché fut minime, mais cela suffit à lui retirer le mérite de la Mitsva. Nous aussi, traversons des moments dans notre quotidien où nous avons l’opportunité de terminer certaines Mitsvot, mais nous n’y parvenons pas à cause de notre manque de persévérance. C’est souvent le cas pour l’étude de la Torah – lorsqu’une nouvelle série de cours commence, il y a beaucoup de personnes qui viennent y assister, mais au fur et à mesure que les semaines passent, les participants se font de plus en plus rares. Rav Yaakov Kamenetsky remarqua ce phénomène concernant le Daf Hayomi – de nombreuses personnes commencent le nouveau cycle par Brakhot, mais pour le traité suivant – Massékhet Chabbat, « Ba Chabbat, Ba Ménou’ha » (quand Chabbat arrive, on se met au repos) !

Nous avons également du mal à faire preuve de persévérance dans notre élévation spirituelle. Durant les Jours Redoutables par exemple, nous prenons facilement de bonnes résolutions, mais elles deviennent souvent un lointain souvenir. Comment rester assidu dans nos décisions ?

L’écriture du Michna Béroura dura vingt-cinq années, lors desquelles le ’Hafets ’Haïm endura de nombreuses tribulations qui retardèrent l’édition du Séfer. La plupart des gens auraient capitulé dans de telles circonstances, voyant en elles un signe que l’entreprise en question ne doit pas aboutir. Mais le ’Hafets ’Haïm comprit que toutes les difficultés étaient envoyées par le Yétser hara pour empêcher le Michna Béroura de paraître. Il persévéra et réussit finalement à éditer l’un des ouvrages les plus marquants du dernier siècle. C’est l’un des conseils dont on dispose pour savoir comment mener à bien nos entreprises — rester concentré sur l’importance de nos actions.

Nous avons, nous aussi, des élans de grandeur qui nous stimulent à atteindre de hauts niveaux. Mais l’inspiration du moment s’affadit souvent : pour la maintenir, il faut un acte concret, dès le début, en espérant qu’il préservera l’impulsion du moment. Par exemple, après avoir entendu un beau cours de Moussar, il faudrait le traduire dans les faits tout de suite. Aussi, quand on ressent une certaine proximité avec Hachem, il faut essayer de se souvenir de cet instant, en prendre une photographie à l’intérieur de soi pour pouvoir la regarder à tout moment, dès que l’on désire retrouver cette ardeur. Ceci, afin de nous aider à ne pas simplement entamer de bonnes actions, mais également les mener à bien.


[1] Téhilim, 30:1.

[2] Midrach So’her Tov, 122:1.

[3] Igrot Moché, ’Hochen Michpat, 1ère partie, Siman 49, Anaf 2, d.h: Ouléaniout Daati