Dans la Paracha de la semaine, Choftim, la Torah ordonne au roi d’Israël de ne pas se marier avec trop de femmes. Rachi rapporte le commentaire de la Guémara qui explique qu’il ne lui fallait pas dépasser le nombre de dix-huit femmes, comme on l’apprend de David Hamelekh.

À ce propos, Rabbi Yéhouda, fils de Rabbi Kélounimouss Shapira, le Rav du Rokéah, a écrit dans son livre « Généalogie des Tanaïm et Amoraïm » que le Tana Bar Kapara s’est marié avec douze femmes et qu’elles ont accepté de le nourrir pour qu’il consente à les épouser, car c’était un homme très érudit.

Beaucoup de commentateurs ont fait remarquer que cet enseignement au sujet de Bar Kapara ne figurait nulle part dans le Talmud. De plus, cette démarche d’épouser autant de femmes est sans précédent, d’autant plus que les grands Sages consacraient leur vie à la sainteté et à la pureté !

Rabbi Réouven Margaliot éclaira ce mystère en rapportant un récit figurant dans le Talmud Yérouchalmi :

« Une fois, douze des treize frères qui avaient épousé des femmes moururent. Les douze veuves vinrent chez Rébbi et lui demandèrent à ce que le treizième frère les prenne pour épouses, comme le prévoit la loi du Yboume. Celui-ci prétexta qu’il n’avait pas les moyens de toutes les nourrir. Alors, chacune des douze femmes accepta de prendre en charge toute la maison un mois par an. Ce dernier prétexta à nouveau : ‘Qui prendra en charge la maison le treizième mois de l’année bissextile ?’ Rébbi prit sur lui la responsabilité de nourrir toute la famille ce treizième mois.

Trois ans passèrent. Les douze femmes se rendirent chez Rébbi, chacune accompagnée de trois enfants (quarante-huit personnes au total). Elles demandèrent à son Chamach de lui transmettre que des enfants se trouvaient devant sa maison et lui passaient le bonjour. Rébbi (Rabbi Yéhouda Hanassi) se pencha à la fenêtre et, apercevant tout ce monde, il leur demanda : ‘Que voulez-vous ?’ Elles lui répondirent : ‘La prise en charge du treizième mois’. Il leur donna tout ce qu’il fallait. »

Le nom du mari aux multiples femmes n’est pas mentionné dans le Yérouchalmi, cependant, dans le Talmud Bavli, Bar Kapara est l’avis qui pense qu’un homme ne doit pas faire le Yboume (prendre pour épouse la femme de son frère défunt), mais plutôt réaliser la ‘Halitsa (la libérer par un cérémonial). Nous savons d’autre part que Bar Kapara était l’un des élèves de Rébbi.

On peut donc faire le parallèle entre les deux Guémarot et en déduire que Bar Kapara était l’homme aux douze femmes. Il ne voulait pas faire le Yboume, jusqu’à ce que son Maître Rébbi l’y oblige et lui règle le « petit » problème de la charge financière.

Le mystère est donc élucidé : ses douze femmes étaient des Yébamot et l’obligation de les épouser provenait du ciel.    

Si ce parallèle est vrai, un autre enseignement dans la Guémara de Brakhot s’éclaircit. « Une fois, Bar Kapara a raconté à son maître Rébbi qu’il avait vu dans un rêve ses deux mains coupées. Rébbi lui expliqua : Tu n’auras jamais besoin du produit de tes mains ! »

Le rêve de Bar Kapara s’est effectivement réalisé…