« Car ce commandement que Je t’ordonne aujourd’hui ne t’est pas caché, ni trop loin. Il n’est pas dans les cieux, pour que tu dises : " Qui montera pour nous jusqu’au ciel, pour le prendre et nous le faire entendre, afin que nous l’accomplissions ?" Il n’est pas non plus au-delà de l’océan, pour que tu dises : "Qui traversera pour nous la mer, pour le prendre et nous le faire entendre afin que nous l’accomplissions ?" Car la chose est très proche de toi, dans ta bouche et dans ton cœur, pour l’accomplir. »[1]

Après une longue admonition concernant les conséquences du non-respect de la Torah, Moché Rabbénou déclare qu’en dépit de l’apparente difficulté à étudier et à observer la Torah, celle-ci est facile d’accès. Rachi explique que ces versets font référence à l’ensemble de la Torah et non à une Mitsva particulière[2]. Le Tana Débé Eliahou[3] cite certaines paroles de Moché Rabbénou et raconte une histoire intéressante concernant Eliahou Hanavi.

Ce dernier rencontra un chasseur qui se plaignit du fait qu’il n’avait pas été doté des qualités nécessaires pour étudier et comprendre la Torah ; il était donc exempté d’essayer. Eliahou lui répondit que dans ce métier, plusieurs aptitudes sont fondamentales pour effectuer des tâches difficiles (coudre des filets à partir de matériaux bruts, attraper poissons et volatiles…). S’il est capable d’apprendre et de comprendre toutes ces techniques, il était certainement apte à étudier et à comprendre la Torah, sur laquelle il est dit : « La chose est très proche de toi. »

Le Ohel Torah explique ce Midrach. Eliahou voulait montrer au chasseur qu’il n’était pas né avec les connaissances et l’habileté requises pour la chasse. C’est la nécessité de subvenir à ses besoins qui l’avait poussé à apprendre ces techniques. Ainsi, s’il connaissait l’importance primordiale de la connaissance de la Torah, il aurait développé ses capacités à l’étudier, car si l’on a la volonté d’y parvenir et que l’on s’en donne la peine, on réalisera que la Torah n’est pas loin de nous.

Pourtant, il semble que la réussite dans l’étude de la Torah fait défaut à bon nombre de personnes. C’est peut-être parce que, comme le chasseur, l’individu doit d’abord apprécier la valeur et l’importance de l’étude de la Torah, pour renforcer son lien avec Hachem et respecter correctement les Mitsvot. On comprend facilement l’importance de gagner sa vie, du fait de la nécessité de pourvoir à ses besoins. On est par conséquent disposé à consacrer plusieurs années d’études, au prix de grands efforts et sacrifices. Ainsi, ce n’est que si l’on réalise que c’est l’étude de la Torah qui prime, que l’on pourra y consacrer le temps et les efforts requis.

Il est également probable que les sections de Torah déjà étudiées ne furent pas agréables à la personne et que cela ait affecté son attitude vis-à-vis de l’Étude en général. La Guémara affirme que l’homme n’apprend que ce que son cœur désire[4] ; or si l’on a été exposé qu’à une seule méthode d’apprentissage, il se peut que l’on n’ait jamais abordé l’étude d’une manière qui nous est agréable et intéressante. Il est donc conseillé d’essayer plusieurs façons d’étudier (la Guémara en Iyoun[5], la Guémara en Békiout[6], l’étude de la Guémara à travers la Halakha, ainsi que l’étude d’autres parties de la Torah, comme le Navi, la Michna, la Hachkafa et le Moussar [conception, idéologie et morale juive]).

On demanda à trois Guédolim (érudits en Torah, dirigeants spirituels de la génération) – Rav ’Haïm Kanievsky, Rav Nissim Karelits et Rav Guershon Edelstein – quelle était la meilleure façon d’étudier la Torah. Ils donnèrent tous la même réponse ; il faut étudier ce que le cœur désire. Rav Edelstein raconta qu’alors que la Guémara étudiée dans sa Yéchiva portait sur les lois des préjudices et des dédommagements – un élève lui confia que cette étude ne lui procurait aucun plaisir, aucune satisfaction. Le Rav lui demanda ce qu’il appréciait, ce à quoi le disciple répondit qu’il aimait étudier le Michna Broura[7]. Rav Edelstein lui proposa d’apprendre les mêmes lois (celles étudiées à la Yéchiva), sur la base du Choul’han Aroukh et avec le commentaire du Sma (qui s’apparente au Michna Broura dans cette section de la Torah). L’élève suivit le conseil du Rav et réussit à approfondir le sujet de manière très profitable, bien que différente de celle de ses camarades. Il continua à progresser et devint un Talmid ’Hakham.

Si l’on arrive à valoriser l’importance de la Torah et trouver le domaine que l’on apprécie le plus, on pourra trouver sa place dans l’Étude.


[1] Dévarim, 30:11-14.

[2] Le Ramban est en désaccord avec Rachi. Il estime que ces versets font référence à la Mitsva de Téchouva (le repentir). Voir Kli Yakar qui développe les deux approches.

[3] Rapporté dans Mayana Chel Torah, Dévarim, p. 132, au nom du Ohel Torah.

[4] Avoda Zara 19a.

[5] Étude approfondie

[6] Étude effectuée à un rythme plus rapide.

[7] Ouvrage célèbre du ’Hafets ’Haïm sur la Halakha (loi juive).