En préambule, nous nous devons de rappeler que la Torah nous interdit explicitement de consommer des bêtes Tréfot, en ces termes : "Et des gens saints vous serez pour Moi, et la chair Tréfa [trouvée] dans les champs, vous ne mangerez point, aux chiens vous la jetterez."[1]

Le terme Tréfa, généralement traduit par "déchirée", englobe toutes les bêtes (volatiles, gibiers ou bêtes domestiques) qui présentent des lésions internes ou externes, susceptibles de mettre en péril la vie de l'animal. La Michna énonce le principe général suivant : "Toute bête est Tréfa, si aucune bête de son espèce ne peut survivre au moins douze mois avec une telle lésion."[2]

Nos Sages dénombrent un grand nombre de cas de Tréfot : soixante-dix selon Rambam ![3]

Bien entendu, il est impossible de vérifier systématiquement toutes les zones à risque, et l'on se fonde sur le principe selon lequel la plupart des bêtes ne sont pas Tréfot, à partir du moment où elles ne présentent pas des signes visibles d'infirmité.[4]

Quels organes doivent-être vérifiés sur les poulets afin de s’assurer qu’ils ne présentent pas de lésions ?

A- Les poumons

Cependant, les Sages ont quand même imposé la vérification des poumons des mammifères, qui s'avèrent régulièrement atteints de lésions, telles que des œdèmes ou des filaments de chair caractérisés par des adhérences. (Les adhérences correspondent à des creux qui se sont cicatrisés sur le poumon.)

D'après la Halakha stricte, les règles de vérification des poumons pour les volailles sont plus souples. En effet, chez les volatiles, les poumons sont protégés d'éventuels coups, car ils sont situés entre les côtes. Au contraire, chez les mammifères, les poumons "flottent dans l'air". Ainsi, si les volailles ne présentent pas de lésions apparentes, telles que des ailes cassées, il n'est pas nécessaire de procéder à la vérification systématique des poumons. Un examen visuel pourrait être suffisant.

Cependant, de nos jours, l'élevage intensif des volailles favorise l'apparition d'imperfections dans leurs poumons. C'est pourquoi, il est préférable que des vérificateurs experts en la matière procèdent à une vérification systématique des poumons, en palpant les imperfections potentielles avec les doigts.[5] Cette pratique correspond aux normes d'une Cacheroute Laméhadrin (qualité supérieure de Cacheroute).

Incidence pratique d'un contrôle non Laméhadrin : dans un tel cas, le constat d'un problème de Tréfa sur l'échantillon prélevé peut remettre en cause la Cacheroute, de toute la production depuis le dernier contrôle ! Aussi, La Rabbanout Harachit (Grand-Rabbinat) d'Israël exige dans un tel cas de vérifier tous les poumons des poulets du lot problématique. Cependant, s'il était impossible d'identifier les poumons avec les poulets correspondants, toutes les volailles pourraient être invalidées.[6]

B- Le Tsomèt Haguidim (le plexus de la cuisse)

De la même manière, de nos jours, les méthodes d'élevage industriel permettent aux poulets d'atteindre un poids adulte beaucoup plus rapidement qu'auparavant. Ainsi, le poids du poulet est parfois anormalement élevé par rapport à ce que ses pattes ne peuvent supporter. Cela peut entraîner la rupture de l'un des seize tendons qui se situent entre la patte et la cuisse, et qui constituent le Tsomèt Haguidim (littéralement, le "carrefour des tendons"). Or, selon la Halakha, la rupture d'un seul de ces tendons (voire de la majorité de chacun d'entre eux) est une cause de Tréfa.[7]

Par conséquent, il est préférable de ne consommer que des volailles dont le Tsomèt Haguidim est systématiquement contrôlé. Cela correspond également aux normes d'une Cacheroute Laméhadrin. En effet, si le poulet acheté provient d'une production pour laquelle le Tsomèt Haguidim n'a pas été vérifié et dont une cuisse porte une trace de coup sombre, il est nécessaire de montrer le morceau à une autorité compétente en la matière, qui pourra déterminer si ce coup a été infligé avant ou après l'abattage du poulet. (Si c’est avant, la bête est Tréfa, si c’est après, elle est autorisée.)

Conclusion

Selon la Halakha stricte, il n'est pas nécessaire de procéder à une vérification systématique des poumons et du Tsomèt Haguidim des volailles. Cependant, l'industrie moderne étant à l'origine de nouvelles anomalies sur les poulets, il est recommandé de se fier aux surveillances de Cacheroute Laméhadrin, qui vérifient en amont ces deux parties sensibles de manière systématique. Ceci afin d'éviter de se retrouver confronté à la difficulté de devoir montrer à un Rav un morceau douteux. Ceux qui adoptent une attitude rigoureuse, en ne consommant que des volailles dotées d'une surveillance Laméhadrin, attirent sur eux les bénédictions.


[1]L'Exode (22, 30).

[2]Traité 'Houlin, chapitre 3, Michna 1, et Guémara 'Houlin 57b.

[3]D'après le Dayan Rav Shmouel Melloul dans son livre Les sentiers du savoir sur la Cacheroute des aliments, p.52, à partir du Michné Torah du Rambam, Hilkhot Kédoucha, chapitres 5 à 10.

[4]Michné Torah du Rambam, Livre Kédoucha, Hilkhot Che'hita, chapitre 11, Halakha 3.

[5] Rav Moché Sternbuch dans son Téchouvot Véhanhagot, vol.2, chapitre 369.

[6] The Chief Rabbinate Of Israel : Normes officielles sur l'abattage rituel des volatiles publiées par la Division Nationale de la Cacheroute, p.4, Section surveillance - "Vérification des poumons", §2.

[7] Michné Torah du Rambam, Hilkhot Kédoucha, chapitre 8, Halakhot 14, 15 et 19.