Cette question m’a été posée par une femme s’occupant d’une dame très âgée. Elle me fait part d’un dilemme bien connu et fréquent auquel font face les personnes ayant atteint un âge avancé et ne comprenant déjà plus le but de leur vie.

Voici sa question :

« Chalom,

Je travaille depuis déjà quatre ans chez une vieille femme âgée de 92 ans. Que me conseillez-vous de faire afin que l’aide que je lui apporte soit plus efficace, car quelquefois je ne sais pas quoi lui dire ou quoi faire pour lui remonter le moral. Autre petite question si vous le permettez. Comment lui expliquer que chaque Bénédiction, chaque Mitsva, chaque acte de charité qu’elle accomplit sont des plus importants et que chacun d’entre eux justifie qu’elle vive ? En effet, elle me dit qu’elle en a assez de la vie et qu’elle ne comprend déjà plus pourquoi elle reste en vie.

Réponse :

Votre question est très belle et très émouvante.

L’être humain n’est pas en mesure de connaître la raison pour laquelle D.ieu le maintient en vie, mais le principe important de la foi est de savoir qu’aucun Juif ne vit pas même un instant sans raison. Et chaque moment de sa vie est doté d’un but et de grande sainteté.

Il y a un siècle, vivait à Jérusalem une vieille veuve presque centenaire. Elle endurait des douleurs atroces. Un jour elle rencontra Rav Yossef ’Haïm Zonnenfeld, le Rav de Jérusalem, et sollicita de sa part une Bénédiction lui accordant la longévité. Le Rav lui demanda : « Pourquoi réclamez-vous cela ? Vous souffrez tellement ! Vous pouvez à peine voir, vous pouvez à peine marcher et vous voulez vivre encore ! » 

La vieille femme lui répondit : « Sachez Rav Zonnenfeld, que presque toute la journée et presque toute la nuit je me trouve dans une situation hygiénique m’empêchant de prononcer des Brakhot ou de prier. Et pourtant chaque jour, il y a une heure où je peux boire un verre d’eau et réciter les mots “Baroukh Ata Hachem Elokénou Mélekh Ha’olam Chéhakol Niya Bidvaro.” Et je sais que Hachem se réjouit que Sa fille prononce une Bénédiction. Rien que pour cet instant-là, tout cela en vaut la peine. »

Si vous y croyez de tout cœur, je suis persuadé que vous réussirez à lui transmettre ce message de la meilleure façon.

Il convient de lui donner le sentiment que son entourage considère qu’elle est importante et indispensable, que les gens l’aiment et sont heureux de la voir, que ses petits-enfants se souviendront toujours de leur mamie… Lorsqu’une personne se rend compte qu’elle a de l’importance et qu’elle est irremplaçable, elle est ragaillardie et veut vivre plus longtemps. 

C’est la réponse que j’ai donnée à cette femme. Je voudrais maintenant rajouter quelques mots. Il arrive souvent que des personnes âgées vers la fin de leur vie souffrent de douleurs intenses et n’aient plus la force d’y faire face, ce qui affecte fortement la prise de décision concernant les soins à leur donner. Sans plonger dans les profondeurs de la Halakha relative à ces cas-là, je voudrais citer ces propos de Rabbi Chlomo Zalman Auerbach figurant dans son livre Min’hat Chlomo :

« Puisqu’il s’agit de la Vie, nous n’avons aucun étalon nous permettant de mesurer sa valeur et son importance pas même dans la Torah et dans ses Mitsvot, car il est permis de profaner le Chabbath même pour un vieillard couvert de pustules et bien qu’il soit sourd, qu’il ait perdu complètement la raison, qu’il ne puisse accomplir aucune Mitsva et que sa vie ne constitue qu’un énorme fardeau et qu’une grande souffrance pour les membres de sa famille, les obligeant d’annuler l’étude de la Torah et l’accomplissement des Mitsvot… malgré tout, les Grands d’Israël considèrent que c’est une énorme Mitsva de s’évertuer à venir à son secours et de transgresser pour lui le Chabbath. »

Ces paroles nous font comprendre combien chaque instant de l’existence est crucial et précieux – et peu importe l’état dans lequel se trouve la personne. Chaque moment de la vie que D.ieu lui accorde est capital et chargé de sainteté. Et bien entendu, nous pouvons en tirer un enseignement en ce qui concerne également chaque instant de notre propre vie alors que nous sommes encore jeunes et en bonne santé…