Question d'une internaute : « J’ai eu une fausse-couche et je le vis très mal. J’oscille entre la culpabilité et le sentiment d’injustice. "Peut-être que c’est de ma faute parce que je me suis surmenée", et "pourquoi cela m’arrive à moi ?" sont les deux questions que je me pose sans cesse sans vraiment trouver de réponses. »

Réponse de Mme Nathalie Seyman :

La fausse-couche… La joie la plus intense qui laisse place soudainement au désespoir le plus total.

La fausse-couche concerne une grossesse sur cinq. Un évènement qui peut être traumatisant pour certaines femmes plus que pour d’autres, et, cela, pour plusieurs raisons : première grossesse, fausse-couche tardive, virus… Pour certaines, il pourra s’agir d’un épisode triste dans leur parcours maternel comme peut survenir toute embûche sur un chemin. Pour d’autres, cela réveillera des angoisses telles que la solitude, le vide, la tristesse, la culpabilité, la colère que ce soit par étape, ou bien tout cela à la fois. Est-ce normal de ressentir tout ça ? Pourquoi ? Comment s’en sort-on ?
 

Les principaux sentiments ressentis :

1. Je me sens coupable :

« J’aurais dû mieux me nourrir, j’aurais dû me reposer, j’aurais dû garder le secret… » Autant de « j’aurais » qui ne laisse aucun doute quant au responsable de cet évènement dans notre esprit.

Il vous faut bien comprendre que la majorité des fausses-couches sont la conséquence d’une anomalie génétique et que rien de rien n’aurait pu l’éviter.

Sachez juste que ce sentiment de culpabilité est un sentiment normal, et, je dirai même, une étape nécessaire du processus de deuil par lequel vous devez passer : vous recherchez des causes extérieures en vous posant en responsable, et cela vous permet un certain déni de la réalité qui peut être à cet instant encore trop dure à supporter. Gardez bien en tête que, bien que vous le portiez, vous n’avez pas été la seule conceptrice de cet enfant, et donc pas la seule décisionnaire. Hachem décide de l’avenir de chaque être de ce monde, de la mouche à la baleine, et en passant bien évidemment par nous. Et de savoir que tout ne reposait pas entre vos mains vous fera vous sentir un peu moins coupable. Si cela ne vous soulage pas, parlez à d’autres mamans ayant vécu la même chose, car partager nos expériences peut nous ouvrir les yeux sur la différence entre la façon dont nous vivons la chose et la réalité de ce que l’on a vécu.
 

2. Je me sens triste, vidée :

Pourquoi je suis si malheureuse alors que je ne l’ai même pas connu ? Aurais-je d’autres enfants par la suite ?

On ne se sent pas le droit parfois de ressentir une telle tristesse, car, qui dit deuil, dit forcément perte d’une personne physique. Sachez que le fœtus à partir de 40 jours prend le statut d’un enfant à part entière dans la Torah, que ce soit pour le rachat des premiers-nés ou pour le statut de la femme qui a fait une fausse-couche au moment des jeûnes du 9 Av ou de Kippour. On ne fait pas comme si rien ne s’était passé. Vous devez faire le deuil de ce lien d’union que vous avez ressenti, de cet attachement, mais aussi de cette grossesse et de toutes les projections qui y ont été associées. Et ce n’est qu’à ce prix que vous pourrez dépasser votre peine, vous reconstruire, et envisager une autre grossesse sereinement.
 

3. Je ressens un sentiment d’injustice :

Pourquoi cela m’arrive à moi ? Pourquoi mon enfant ?

Il est difficile de ne pas avoir d’explications aux choses négatives qui nous arrivent. La majorité des fausses-couches viennent donc d’une anomalie génétique. En d’autres termes, c’est « la nature ». Mais qui est la nature sinon La Main d’Hachem ? Nous ne sommes pas dans les calculs d’Hachem, il est toujours difficile, voire impossible, de pouvoir trouver une cause à quelconque malheur qui nous frappe, mais certains ‘Hakhamim, dont le Ari zal, nous disent que l’âme que nous avons portée a pu réparer quelque chose (un Tikoun) qu’elle a, par votre mérite, avancé auprès d’Hachem. Parfois, cette réponse peut nous permettre d’avancer, parfois non.

Il s’agit d’une grande période de remise en question, où les causes de cette épreuve se bousculent dans notre tête. Mais il faut se demander si une réponse claire et nette nous permettrait vraiment de nous en remettre ?

Vous avez besoin d’une écoute empathique, patiente et rassurante. La guérison viendra de la parole : dites tout ce qui vous passe par la tête, laissez de côté le politiquement correct, à une personne qui ne vous jugera pas, quoi que vous disiez. Et vous sentirez que chaque parole qui franchira vos lèvres prendra la forme d’une réalité, vous mettrez des mots aux maux, vous les rendrez réels, et vous pourrez ainsi les soigner. Mais surtout, gardez la foi en Hachem, gardez quelque part en vous qu’à l’instant présent, vous ne comprenez pas pourquoi cela vous arrive, mais que viendra un jour la signification de ce que vous avez vécu. Gardez-en vous la confiance de la Bonté Infinie d’Hachem et éloignez de vous cette sensation de punition Divine !
 

Le plus important

Surtout ne pas mettre de côté le papa. L’homme aussi ressent la peine et la déception de ce qu’il s’est passé. Il se sent souvent impuissant face au désespoir de sa femme, d’autant plus qu’il ne le ressent pas dans son corps. C’est avec lui que vous avez créé cette âme et c’est avec lui que vous trouverez la force, le courage nécessaire d’en faire le deuil.

Je finirai par une histoire vraie d’une de mes connaissances : pour sa première grossesse, une femme a subi une fausse-couche et a essayé de dépasser sa tristesse sans y inclure son mari. Les mois passaient, et impossible de faire le décompte de ses jours de pureté tant les saignements ne s’arrêtaient pas. Le couple vivait des moments très difficiles, et, malgré les consultations chez le médecin qui lui assurait que tout était normal, les jours de pureté n’arrivaient pas. Le jour où enfin elle décida de parler à son mari de ce qu’il s’était passé, de pleurer ensemble, le lendemain, les saignements s’arrêtèrent et ils purent envisager l’avenir sereinement. Ils sont aujourd’hui, grâce à D.ieu, parents d’une famille nombreuse.

C’est l’écoute et le partage de ces sentiments négatifs à deux qui vous permettra de dépasser ce traumatisme, et c’est ainsi qu’une chose positive ressortira de cette épreuve : le couple en sortira plus fort et uni.
 

Conclusion

Tout ce que vous ressentez est normal, il faut en parler et ne surtout pas essayer de refouler !! Se donner le droit de pleurer, faire un vrai processus de deuil : il s’agit d’un travail psychique nécessaire et même fondamental. Ne pas minimiser l’évènement, se faire aider par notre entourage proche si nécessaire, et renforcer sa Émouna.

Si, après tout cela, vous n’arrivez pas à vous en remettre, n’hésitez surtout pas à consulter.

Béhatsla’ha !

Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante entrefemmes@torah-box.com. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.