Bonjour, j'ai grandi dans un foyer où je n'ai jamais manqué de rien matériellement, mais en réalité, il s'agissait d'un foyer instable et conflictuel dont je vous passe les détails. J'ai grandi avec ce rêve enfoui d'un jour m'affranchir de tout ce que signifiait le mot “famille”. Aujourd'hui, j'ai 20 ans déjà, on me propose de me marier, car "rien ne sert de tarder". Je le sais bien, mais après avoir tant espéré fuir un schéma qui m'a déçue, j'ai l'impression que je dois déjà y retourner sans en avoir la moindre envie. Des conseils ?

Réponse de Mme Nathalie Seyman

Notre famille d’origine nous donne des schémas. Certains, heureusement, sont positifs. Certains, hélas, sont beaucoup plus difficiles et douloureux, voire toxiques. Et là se pose la question de la transmission. Comment transmettre à nos (futurs) enfants des valeurs qu’on ne nous a pas transmises et, pire encore, comment éviter de leur transmettre ce qui nous a tant fait souffrir durant l’enfance ? Est-on condamné à être prisonnier de son schéma familial et de le reproduire ? Ou a-t-on le pouvoir de s’en affranchir ?

Se marier ou pas ?

Tout d’abord, pas de mauvais suspense : je vais commencer par répondre à votre demande au sujet du mariage. Le fait déjà de vous poser cette question, et donc d’être consciente de cette problématique au sujet de votre schéma familial, peut vous apprendre deux choses sur vous-même : premièrement, d’une maturité étonnante à votre âge et deuxièmement, d’un recul très utile pour avancer dans la bonne direction. Je dis toujours que le fait d’être conscient du problème psychologique qui nous touche est le premier pas vers sa guérison. Mais au sujet du mariage, la véritable question à se poser est : l’homme que j’ai rencontré me donne-t-il envie d’être prête à fonder un foyer avec lui ? Car si vous vous posez la question juste par rapport à vous-même, la réponse sera toujours négative. On n’est jamais vraiment prête à être une épouse, à devenir une maman, etc. Mais c’est en le devenant qu’on y parvient. C’est toujours difficile de changer de vie et nous ne sommes jamais totalement prêts pour cela. Nous arrivons tous avec plus ou moins de névroses, de traumatismes, d’illusions et d’attentes. Mais c’est la personne avec laquelle nous allons nous unir qui va nous donner cette force d’aller au-delà de toutes les questions que nous nous posons. Donc ne cherchez pas plus loin la réponse à votre question, elle se trouve entre vos mains et celle de l’homme qui vous propose le mariage.

Se libérer du schéma familial

Nos parents sont notre premier modèle. Nous avons grandi en les observant. Nous nous sommes imprégnés, consciemment et inconsciemment, de leur façon de s'aimer, de nous aimer, de nous éduquer. Nous sommes les premiers spectateurs de leur justesse, de leur perspicacité, mais aussi parfois de leurs erreurs. Et il arrive qu’adultes, nous n'ayons pas envie de reproduire ce que nous considérons comme des erreurs.

Difficile pourtant de se libérer de ces schémas parentaux tant ils sont inscrits dans l'histoire psychique de chacun. Comment ne pas adopter avec son mari et ses enfants les mêmes attitudes que nous avions du mal à supporter lorsqu'elles venaient de nos parents ? Comment fonder sa propre famille sans y apporter le poids des conflits de celle d’où l’on vient ?

Ce qu’il faut impérativement comprendre, c’est que passer son temps à redouter de ressembler à la famille à laquelle on essaie à tout prix de se détacher, est une erreur, car c’est en réalité une façon de ne pas prendre son indépendance, de rester liée à elle. La solution se trouve encore et toujours dans le Chalom (paix). On résout le problème en faisant la paix avec ce modèle. La clé réside dans une certaine lucidité par rapport à ce que sont nos parents. Etre reconnaissant pour tout le positif qu’ils nous ont apporté et transmis, et il y en a forcément, et être en accord avec ce que nous ne souhaitons pas reproduire. L’important est d’accepter l'idée qu’on peut aimer ses parents tout en étant conscient de ce qui nous déplaît ou nous pèse dans leur façon d'être. Leur pardonner leurs erreurs, même si elles nous ont beaucoup touchés, est la meilleure façon de s’émanciper sainement de leur schéma familial et d’écrire librement le nôtre.

Mes conseils

Je ne connais pas tous les tenants et les aboutissants de votre histoire familiale, je vais donc vous donner des conseils un peu généraux, mais qui pourraient vous aider à avancer dans votre problématique.

- Pardonnez à vos parents, essayez de vous libérer de votre rancœur envers eux. Ce n’est pas facile, loin de là, mais c’est indispensable pour pouvoir s’en détacher et fonder sainement sa propre famille. Si vous avez besoin pour cela de leur exprimer ce qui vous a choquée durant votre enfance, faites-le au moyen d’une lettre, sans ton accusateur surtout. En tournant les phrases telles que : « Je sais que vous avez fait de votre mieux, mais voilà comment j’ai ressenti la chose… » Si vous n’arrivez pas à dépasser ce stade, alors demandez l’aide d’un thérapeute qui pourra vous y aider.

- Focalisez-vous sur tout le positif que votre famille vous a apporté.

- Lorsque vous aurez décidé de vous marier, n’hésitez pas à parler de vos craintes à votre futur mari. Il n’y aura pas de meilleur soutien. Votre époux arrivera lui aussi avec sa propre histoire, ses propres valeurs et parfois aussi ses propres traumatismes. Et c’est ainsi qu’ensemble, en prenant le meilleur de chacun, vous parviendrez à fonder VOTRE famille idéale.

- Ne renoncez pas à créer une famille, car c’est, au contraire, ce qui pourrait vous figer dans ce schéma. Alors qu’en fondant celle que vous avez toujours rêvé d’avoir, vous annulerez toute la négativité qui vous a été transmise.

- Ne doutez pas de vous. Vous avez le pouvoir de devenir la personne que vous voulez être ! Vous pouvez changer les choses, contrairement au passé sur lequel vous n’avez aucune emprise.

Hachem nous donne à toutes et à tous de nombreuses chances de rebondir sur ce que l’on a mal vécu et de le transformer en positif. N’ayez aucune crainte, vous allez écrire une nouvelle page de votre histoire, et ce sera une très belle histoire.

Béhatsla’ha !

Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.