Voici un exemple concret d'un cas traité par des tribunaux rabbiniques, afin d'apprendre à voir et assimiler peu à peu le "Daat Torah", le fait d'avoir un esprit et une réfléxion de plus en plus en accord avec la Torah.

Question : 

Joëlle étudie en Israël et elle doit se marier dans trois mois. Elle a acheté des tissus pour confectionner sa robe de mariée mais elle est encore indécise sur le modèle. Elle sait qui sera sa couturière, Esther, et elle va chez elle afin de consulter avec elle, des catalogues et prendre une décision.

En feuilletant les pages de mode, Joëlle s’émerveille devant un modèle très difficile à réaliser. Esther lui assure qu’elle est capable de le faire. Joëlle ne prend cependant aucune décision. Elle part à Paris pour faire ses dernières courses et deux semaines après, revient avec une meilleure idée de robe moins excentrique et vraiment à son goût.

En attendant, Esther a coupé le tissu pour coudre la robe qu’elles avaient vue ensemble et elle lui propose déjà un premier  essayage. Joëlle se refuse, en toute honnêteté, à porter cette robe. Elle exige d’Esther de lui rembourser ses tissus et de garder la robe qu’elle a confectionnée. A-t-elle raison ?

Psak et explications :

Joëlle n’a pas raison selon tous les avis. Car en prenant ces tissus sans intention de les voler, Esther n’est pas considérée comme une gazlane (voleuse) – Tossafote baba kama 95b et Chakh 306, 6. (voir Chakh qui rapporte l’avis de Maharchal qu’ici aussi c’est un vol mais comme Nétivot opte pour l’avis de Chakh, c’est donc ainsi que nous avons retenu).

Si cela avait été le cas, elle aurait été propriétaire des tissus et donc de la robe et aurait du les rembourser à Joëlle (c’est en effet ce qui se passe pour un voleur qui effectue un changement dans un objet volé : il en devient propriétaire et doit le rembourser  selon son prix initial avant le changement). Mais cela n’est pas le cas.

Les tissus et ensuite la robe sont donc restés la propriété de la jeune fiancée. Celle-ci se retrouve donc normalement avec une plus value, si la robe est vendable. Que revient-il à Esther ? Selon le Ktsot Hahochen (306 6) Esther va recevoir toute la plus value et Joëlle va l’obliger à lui rembourser le prix du tissu même si la robe lui appartient encore.  Mais selon Nétivot (306, 7), il faudra payer Esther selon le salaire minimum de l’heure de travail dans ce corps de métier et ses frais, mais non pas toute la plus value (si toutefois ce salaire ne dépasse pas la plus value).

La Halakha aurait été plus simple si Esther avait reçu une commande de la part de Joëlle. Elle serait restée son ouvrière quand bien même elle aurait changé de modèle. Dans ce cas aussi elle ne serait pas devenue propriétaire du tissu et de la robe.  Au niveau du salaire aussi, Esther aurait reçu selon le minimum de l’heure de travail dans ce corps de métier et ses frais à condition que cela ne dépasse pas la valeur de la plus-value (Choul’han ‘Aroukh 306,3).

Rav Reouven Cohen
 

Cette rubrique propose de vous faire partager des cas traités, couramment ou non, dans les baté-din. L’unique but est de faire prendre conscience de la possibilité que donne la Torah de régler n’importe quel conflit financier selon des logiques très réglementées. Nous vous recommandons donc de ne pas tirer de conclusions personnelles de ces enseignements, car un détail et une parole peuvent changer toute l’issue du psak-din.

Bet-Din francophone "Michpat Chalom"
sous la direction du Rav Baroukh Chraga est actif à Jerusalem, Nathania et Ashdod
Dayanim : Rav Réouven Cohen, Rav Itshak Bellahsen, Rav Yossef Chaynin, Rav Dov Rozman, Rav Yehouda Levy et Rav Ellia Yafé.
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