Chabbath est un jour différent des autres. Mais comment faire apprécier à ses enfants la beauté de ce jour si saint ?

Un jour de congé ?

Un vendredi, de retour des dernières courses avant Chabbath avec mes deux garçons, nous avons rencontré notre voisine de palier et entamé la discussion. En voyant nos sachets dans nos bras, elle a deviné qu’on avait fait des achats pour Chabbath et avec beaucoup de tendresse, elle a demandé aux enfants ce qu’ils aimaient le plus dans ce jour si particulier. Je dois dire que je m’attendais à tout sauf à leurs réponses : « On mange des bonbons ! », « C’est le seul jour où l'on n’a pas de devoirs à faire. »

Si la vieille dame a souri, manifestement satisfaite des réponses, moi j’accusai le coup et la saluai en lui souhaitant Chabbath Chalom. De retour à la maison, je me répétais en boucle les phrases de mes fils. Comment pouvaient-ils résumer Chabbath à un jour sans école ? Pourtant, ils grandissaient dans un foyer respectueux des jours saints et de la Cacheroute et ils étudiaient dans une école religieuse. Alors qu’est-ce qui leur manquait pour apprécier la beauté du Chabbath ?

La flamme du Chabbath

Quand j’étais une jeune fille, c’est justement la flamme du Chabbath qui avait allumé en moi l’étincelle de la Téchouva. À l’époque, je vivais dans une résidence étudiante loin de ma famille et j’étais souvent invitée par les familles de la communauté locale. Et dans toutes les maisons où je me rendais, je m’émerveillais de ces repas de fête. Il y avait une joie si pure qui venait des chants et des paroles de Torah sur la Paracha de la semaine. Moi-même, je ressentais une dimension particulière, comme si le temps s’arrêtait et que d’un coup, tout était plus beau ; tout avait un sens.

C’étaient là des émotions si pures et fortes qu’elles m’ont accompagnée jusqu’à ce jour et de ce fait, ma peine était encore plus grande de réaliser que je n’avais pas réussi à les transmettre à mes enfants !

Quelques jours après cet épisode, je me suis rendue à un cours de Torah et « comme par hasard », le Rav nous a raconté ce soir-là une anecdote qui faisait directement écho à ce que je vivais : Le Rav Chakh avait un fils qui, contre toute attente, n’a pas marché dans les voies de son père et s’était écarté d’une vie juive religieuse. Lorsqu’un de ses disciples demanda au Rav quelle était selon lui la raison, il répondit simplement : « Je pense que je n’ai pas assez chanté à la table de Chabbath. »

Je dois vous avouer qu’il m’a fallu un moment avant de comprendre la portée du message du Rav Chakh : un enfant peut grandir avec l’image d’un père absorbé dans son étude, mais est-ce qu’il percevra cette joie de la Torah ressentie intérieurement ?

Un plan d’action

Maintenant, je comprenais mieux la situation : oui, j’adorais le moment si fort du Chabbath mais si je ne l’exprimais pas, comment mes enfants pourraient le ressentir eux aussi ? Je pris alors la décision de créer un événement spécial autour du Chabbath et j’allais le faire savoir à voix haute.

Le jeudi suivant, j’ai commencé par faire quelque chose de nouveau : je me suis mise à parler à voix haute devant mes marmites : “Hachem, regarde les bons plats que je prépare en l’honneur du Chabbath, j’espère que nous allons nous régaler.”

La première réaction de mon fils aîné a été de me regarder comme une alien, mais je ne me suis pas laissée atteindre et j’ai continué à décrire à Hakadoch Baroukh Hou tout le menu en détails que j’avais prévu de préparer.

Le lendemain, toujours sur ma lancée, j’ai fait participer ma fille aux préparatifs de ce jour tant attendu : nous avons pris de longues minutes pour choisir ensemble la plus belle tenue dans son armoire qu’elle pourrait porter le jour de Chabbath. Avec le plus grand sérieux, on a comparé des serre-têtes pour voir lequel serait le mieux assorti à sa robe. Pari gagné ! Elle m’a dit : « J’ai trop hâte car je vais me faire toute belle pour Chabbath ! »

Même mon mari prit part à l’exercice : je lui demandai d’une voix forte (pour que tout le monde m’entende) s’il pouvait sortir la plus belle nappe et poser les beaux couverts de fête, tout cela en l’honneur du Chabbath. Il se prit au jeu et décida de lui-même de choisir des serviettes de table de couleur flashy pour un résultat… original !

Au moment d’allumer les bougies de Chabbath, je réunis les enfants autour de moi, je partageai avec eux mon émotion d’allumer les bougies et je leur confiai que j’allais prier pour qu’Hachem nous donne un beau Chabbath, plein de joie.

Avant de passer à table ce soir-là, j’ai demandé à tout le monde d’attendre une minute avant de s’assoir (juste pour que nous puissions tous admirer la belle table que tout le monde avait aidé à composer).

Comme nos Sages nous enseignent : « Chabbath est une “invitée” d’honneur, comparée à une reine, dans tous les foyers juifs. Par conséquent, la table dressée pour une invitée si importante et aimée devra refléter l’honneur, la joie et la satisfaction que les membres de la famille ressentent en recevant une telle convive dans leur maison. De par sa beauté et sa dignité, la table soigneusement posée nous fait comprendre la grandeur et la sainteté du jour de Chabbath. »

Me croirez-vous si je vous dis qu’à la fin de Chabbath, mes fils sont venus me voir pour me dire : « C’était trop bien Chabbath maman, vivement la semaine prochaine ! » Pari gagné pour cette semaine... Depuis, je n’ai qu’une hâte : transmettre la joie du Chabbath à mes enfants semaine après semaine.