Comme beaucoup de nos Mitsvot, Pessa’h est régi par des commandements positifs comme la consommation de la Matsa, l’explication de la Haggada etc., mais aussi par des commandements négatifs – l’interdiction de posséder ainsi que celle de consommer du ‘Hamets.

Essayons d’en savoir plus sur notre “ennemi” annuel - le ‘Hamets. Qui est-il vraiment ? Que représente-t-il pour que l’on soit obligé de l’éradiquer jusqu’à la dernière miette ? 

Concrètement, c’est quoi du ‘Hamets ?

Beaucoup d’explications ont été données, beaucoup d’allusions ont été trouvées pour définir le ‘Hamets, mais essayons de comprendre le sens simple des choses. Comment obtient-on du 'Hamets ?

On laisse fermenter la pâte tout simplement. Une fois qu’on a bien pétri notre pâte – on attend. Cette attente, c’est la fermentation – c’est le ‘Hamets. La Matsa, quant à elle, est une pâte à qui on n’a pas laissé le temps de « monter ». Le ‘Hamets est donc obtenu par le temps. Le temps d’attente…

Il y a un autre endroit où à Pessa’h, le temps n’est pas le bienvenu. C’était lorsque les Hébreux sortirent de l’exil de Pharaon. Le texte les mettait en garde : « Et ainsi, vous le mangerez : vos hanches ceintes, vos chaussures sur vos pieds, et votre bâton dans votre main, vous le mangerez Bé’hipazon : à la hâte, c’est Pessa’h pour Hachem » (Exode 12, 11) Rachi explique : « le mot ‘Hipazon désigne l’empressement et la hâte. »

Là aussi, nous devions braver le temps. Pourquoi faire la guerre au temps à Pessa’h ?

D.ieu se trouve au-delà du temps

Le mathématicien autrichien Kurt Gödel, avec sa preuve ontologique, démontra que tout système logique qui est défini par des limites circonstancielles telles que le temps ou encore l’espace comme notre univers, doit son origine à une source qui serait affranchie de ses limites mêmes. Donc, le monde matériel dont la principale caractéristique est le temps et l’espace, est l’œuvre d’un Être au-delà des limites de Sa création. Le philosophe René Descartes, dans « Méditations métaphysiques », exprima la même idée.

Nous pouvons plus amplement comprendre cette notion avec le physicien Albert Einstein qui dévoila au monde entier en 1915 une règle fondamentale : celle que le temps est la définition du mouvement de la matière. Plus la matière est dense et donc soumise aux lois de la gravitation, plus le temps s’écoule lentement. Le temps est variable suivant les endroits. Cela s’appelle la dilatation du temps.

L’écoulement du temps est donc relatif suivant l’endroit où nous nous tenons. Il a été mesuré par exemple (grâce aux fréquences du rayonnement lumineux qui constituent le mécanisme de l’horloge de l’univers) concernant le Soleil, dont la gravité est trente fois supérieure à celle de la Terre, qu’au cours d’une année terrestre, les horloges sur le soleil indiquent un an moins soixante-sept secondes. 

La longueur des ondes de lumière-ondes du Soleil est supérieure de 2,12 millionièmes à celles des ondes similaires générées sur Terre. Cet étirement des longueurs d’onde lumineuse signifie que le rythme avec lequel elles nous atteignent est ralenti de 2,12 millionièmes. Cette diminution de la fréquence lumineuse sert à mesurer le ralentissement du temps. Tous les millions de secondes, l’horloge du Soleil perd 2,12 secondes par rapport à nos horloges terrestres, ce qui correspond à 67 secondes par an. 

À l’inverse, moins il y a de gravité plus le temps s’écoule vite, jusqu’à disparaître lorsqu’il n’y a plus de matière…

Telle est la raison pour laquelle D.ieu est au-delà du temps, car n’étant pas matière, le temps n’a pas d’emprise sur Lui, Béni Soit-Il.

À Pessa’h, nous nous sommes élevés au-delà de la matière

La Guémara, dans Bérakhot page 17, cite Rabbi Alexandri qui disait après avoir prié «  Maître du Monde, Tu sais que nous voulons faire Ta volonté. Par quoi sommes-nous empêchés ? La levure qu’il y a dans le pain. » Le temps. 

Le temps n’a d’emprise uniquement sur la matière, que ce soit d’un point de vue physique ou spirituel. Plus l’homme est ancré dans les plaisirs de ce monde, dans la matière, loin du monde de l’esprit et de l’âme, plus il est « empêché par le temps ». C’est-à-dire que les vicissitudes du temps, le freine. Les expressions telles que « pas la force », « pas l’envie », sont tous des vêtements du temps, qui est lui-même dépendant de la matière. 

Sur les Tsadikim, il est dit « Avraham se hâta vers la tente, vers Sarah, il dit : Vite, (prend) trois mesures de fleur de farine, pétris et fais des gâteaux ! » (Genèse 18, 6)

De même pour Rivka « Elle se hâta, vida sa cruche vers l’abreuvoir, courut encore vers le puits pour puiser. » (Ibid. 24, 20)       

À Pessa’h, nous nous sommes extraits de la matière pour nous rapprocher de D.ieu, nous avons, nous aussi, sauté au-delà de notre condition humaine. D.ieu nous a donné la recette en nous disant « à la hâte ». Nous avons compris que pour vaincre notre nature, il nous faudrait du zèle dans les Mitsvot. Une rapidité du mouvement dans le service divin qui nous détacherait de la matière, ancrant dans nos cœurs que notre but est l’élévation vers le Tout-Puissant.

C’est ce que le Messilat Yécharim nous enseigne : « Médite et tu verras, de même que le zèle est le résultat de l’enthousiasme intérieur, par le zèle, l’enthousiasme intérieur s’obtient ». 

C’est ce que nous traquons de toutes nos forces à Pessa’h, ce temps qui est lié à la matière, pour nous extraire d’elle et nous sanctifier.