Gabriel s’est admirablement comporté aujourd’hui et je sais pourquoi.

C’est l’heure du déjeuner, un enfant apeuré entre dans la cuisine, une feuille froissée à la main.

Je l’observe. Je comprends qu’il s’agit de son examen… Mais j’essaie de gagner un peu de temps et je ne réagis pas de suite.

La feuille est presque blanche, excepté deux ou trois questions auxquelles mon fils a réussi à répondre. Seulement, à côté de ces lignes, le professeur a rédigé une remarque en rouge : « Pourquoi as-tu copié ? J’exige la signature de tes parents ! » Je me mords les lèvres pour garder mon calme !

Je lui demande :

-      « As-tu véritablement triché ? »

-      « Oui ! » me répond mon fils rouge comme une pivoine.

Après un échange assez dur, je prends mon stylo et signe son examen.

Il se dirige vers sa chambre avec un sourire qui en dit long.

Je sens la moutarde me monter au nez. Il ne regrette même pas ce qu’il a fait… Soudain, je saisis que je ne joue qu’un rôle secondaire dans la mise en scène de mon fils.

J’avale ma salive et je l’appelle :

-      « Gabriel ! »

D.ieu soit loué, il est encore éveillé !

J’entre dans sa chambre, je m’assois sur son lit et l’embrasse. Il est surpris de ma réaction. Je lui assène rapidement ces mots :

-      « Je veux te dire que malgré tout, je t’aime ! Tu es vraiment un enfant merveilleux. Même si cette fois-ci tu as trébuché, tu parviendras à te relever, avec l’aide de D.ieu !
 

Je ne sais pas si c’est mon imagination qui me joue des tours ou si j’ai réellement décelé une lueur d’espoir dans ses yeux !

Les enfants ne sont pas toujours une source de joie, de tranquillité et de satisfaction. Parfois, ils échouent et nous causent des soucis et de grandes déceptions.

Lorsqu’un enfant qui a déçu ses parents reçoit d’eux de sévères réprimandes, il sent que son devoir est de leur plaire et de se conformer à leurs exigences sans quoi ils ne l’aimeront pas véritablement. C’est la raison pour laquelle les parents doivent donc toujours manifester de l’amour sans aucun rapport avec l’échec ou les mauvaises actions de leurs enfants.

Dans un deuxième temps, les parents s’attèleront à éduquer avec patience et de façon plaisante.

La réelle difficulté se situe lorsque les faux pas des enfants se multiplient…
 

Tamar était un nourrisson adorable, mais dès le quatrième jour après sa naissance, elle a commencé à pleurer sans discontinuer.

Je suis mère de quatre enfants et je ne sais plus quoi faire.

Quelquefois, elle s’endort après une heure de cris puis elle se réveille et repart de plus belle.

J’essaie de lui donner à manger, à boire, de la prendre dans les bras de lui taper sur le dos de la tenir dans toutes les positions possibles. Toutes mes tentatives sont vaines.

Je décide de l’amener chez le pédiatre, je suis complètement désespérée. Je la pose sur le lit et lui demande :

-      « Docteur, qu’a-t-elle ? »

     Il ne trouve rien d’anormal, il me prescrit quelques médicaments à base de plantes et me renvoie chez moi, face aux pleurs incessants de ma fille…

Il a fallu beaucoup de temps avant de découvrir le fond du problème…

C’était juste avant que je ne m’écroule moralement, éprouvant le besoin urgent d’être aidée…

’Haïm ne pleure pas et ne crie pas, mais ses réactions violentes me font peur.

Il est déjà assez âgé et pourtant, il mord et frappe chaque enfant qui ne trouve pas grâce à ses yeux et le Rav m’a signifié qu’il faut s’en occuper.

A la maison, il réagit aussi avec agressivité envers ceux qui n’obéissent pas à ses ordres. Il semble que rien ne peut l’arrêter !

Les diagnostics médicaux révèlent ce que je craignais : ’Haïm souffre de dysfonctionnements dans beaucoup de domaines et il faut absolument lui porter secours et s’armer de patience.

J’essaie de prendre soin de lui au mieux ! Mais quand il a arraché les cheveux de mon bébé et s’est apprêté à les couper avec ses ciseaux en petits morceaux, j’ai perdu mon courage ! A cet instant, j’ai eu envie de le donner à une autre famille.

Je n’éprouve plus un brin d’amour à son égard !
 

Il est facile d’aimer nos enfants lorsqu’ils sont mignons, endormis ou calmes.

Il est d’autant plus aisé de les complimenter lorsque les enseignants font leurs louanges dans les réunions de parents d’élèves !

C’est un plaisir de peiner pour eux quand ils se comportent convenablement !

Mais combien est-ce pénible d’agir ainsi envers un enfant qui ne comprend pas, qui se rebelle, qui se noie dans son problème !

Comment est-ce possible de le combler d’amour et de lui manifester plus de tendresse qu’aux autres, quand au fond de nous, une voix crie : « Ce n’est pas pour cet enfant que j’ai prié ! » ?

Existe-t-il une formule magique ?

La réponse est donnée par le Rav Dessler dans son livre Mikhtav Mééliahou (Première partie).

L’amour est engendré par le don.

Plus tu t’investis et tu te dévoues corps et âme à cet enfant « difficile », plus tu l’aimeras !

S’il en est ainsi pour des problèmes de comportements, à plus forte raison lorsqu’il s’agit d’un enfant qui se cherche !

La douleur est incroyable, redoutable et ardente.

Une réaction appropriée permettra de renverser la vapeur et de l’inciter à retourner aux sources. Les parents veilleront à ne pas prononcer des phrases vexantes comme :

« Tu nous fais souffrir, tu nous fais honte ou tu nous occasionnes beaucoup de peine ! »

Lorsque l’enfant capte ce type de réaction, il sent que ses parents ne parlent pas pour son bien ou parce qu’ils l’aiment.

Leur amour-propre et leur fierté sont mis à l’épreuve du fait que leur fils ne suive pas les sentiers de la vertu et ne réponde pas à leurs attentes.

En pointant du doigt « celui qui déshonore la famille », il décidera de s’éloigner encore plus et de continuer à leur faire honte.

C’est un dilemme pour les parents : doivent-ils tenir compte du bien de l’enfant ou de leur fierté personnelle ?

L’unique façon de rétablir des liens de confiance mutuelle avec l’enfant est de se soucier de lui sans relâche de lui montrer notre intérêt, sans rappeler ce que nous ou les membres de la famille traversons à cause de lui.

Lui dire des phrases telles que : « Nous nous inquiétons pour toi. Où étais-tu ? Il fait froid dehors… Tu nous as manqué ! » l’aide beaucoup plus que de lui assener des remarques acerbes comme : « Oh ! Tu as un drôle d’air, quelle honte pour nous ! »

Pour réussir à éduquer tout type d’enfant difficile, nous devons croire que cette situation a été décrétée par D.ieu. Se culpabiliser n’a pas lieu d’être !

L’un des onze enfants d’un grand Talmid ’Hakham a dévié du bon chemin. Son illustre père avait du mal à supporter cette douleur indicible et refusa donc de sortir de chez lui pendant deux semaines entières.

Lorsque son maître, le Rav Chakh, eut vent de l’affaire, il lui rendit visite. Il écouta avec empathie tout ce qu’il avait subi et toute la peine que lui et sa famille avaient éprouvée. Puis, il lui a demanda :

-      « Qu’en est-il des autres enfants ? »

Un sourire de satisfaction se dessina sur son visage :

-      « D.ieu soit loué, ils me procurent beaucoup de joie ! »

Le Rav Chakh lui déclara alors :

-      « De la même façon que D.ieu est loué pour ces enfants, D.ieu doit être loué pour cet enfant aussi ! Vous n’êtes pas responsable de la réussite comme de l’échec de votre descendance… Les deux sont dans les mains de D.ieu ! »