Est-il vrai que le mariage juif se concrétise par “l’achat” ou “l’acquisition” de la femme par son époux ? Qu’en est-il de l’amour dans tout ça ?

Cela paraitrait effectivement troublant de réduire le mariage à une simple transaction. Pourtant, c’est bien ce que semble nous dire le Talmud (Kidouchine 2a) qui décrit le mariage comme un acte d’acquisition. Le mariage se réduirait-il à une simple transaction ? Lorsque l’on peut voir l’émotion inouïe qui caractérise les mariages juifs, cela ne manque pas de nous étonner davantage.

Une explication nous est donnée par le Rav David Fohrman dans un commentaire sur Béréchit.

L’histoire d’amour entre Adam et Eve commence de la façon la moins romantique qu’il soit !

En effet, lorsque Hachem constate qu’il “n’est pas bon que l’homme soit seul” (Béréchit 2,18), Il décide alors de créer une partenaire pour Adam. Pourtant Il ne crée pas Eve tout de suite. Au départ, Hachem lui propose tous les animaux, un à un, afin qu’Adam choisisse parmi eux un partenaire. Mais au bout du compte, Adam constate qu’il n’est satisfait par aucun d’entre eux… Ce n’est qu’à ce moment-là qu’Il décide de créer Eve : Il endort Adam, prend une partie de lui, et crée la femme à partir de cette partie. “Et l’homme dit : Celle-ci, pour le coup, est un membre extrait de mes membres et une chair de ma chair.” (Béréchit 2, 23)

Ces deux versets parlent, l’un à la suite de l’autre, de la relation homme/animal, puis de la relation homme/femme, pour les opposer et nous apporter une leçon. Pourquoi le lien avec l’animal laisse Adam insatisfait, tandis que lorsqu’il voit Eve, il s’extasie littéralement ?

Contrairement à Eve, l’animal n’a pas été extrait de l’homme, mais a été créée de façon autonome. Les animaux, ayant été créés indépendamment d’Adam, resteront toujours extérieurs à lui. Tandis que pour Eve, c’est totalement différent : elle représente la partie de lui-même qu’il avait perdue. Lorsqu’il s’unit à elle, il va enfin pouvoir parvenir à la complétude de son être.

Or, comme nous le dit le Zohar, tous les couples sont modelés sur le modèle d’Adam et Eve.

Ainsi, si les célibataires se sentent encore inaccomplis, c’est bien parce qu’ils ressentent qu’il leur manque une partie essentielle d’eux-mêmes… jusqu’au jour du mariage où ils vont enfin pouvoir aboutir à la complétude de leur être à travers la relation avec leur épouse.
C’est en quelque sorte comme s’ils réintégraient une partie d’eux-mêmes...

C’est de cette acquisition dont nous parle le Talmud.

Le problème vient du fait que nous pensons que “acquérir” signifie “posséder” ou “contrôler”.

En ce qui concerne les objets matériels, c’est peut-être le cas. Mais il existe des acquisitions auxquelles la Torah fait référence qui n’ont rien à voir avec la possession et le contrôle. Par exemple, le Talmud nous parle de Kinyane Hatorah, l’acquisition de la Torah : peut-on vraiment posséder la Torah ? Peut-on la contrôler ? Au contraire, c’est elle qui va nous contrôler et influencer tous les domaines de notre vie ! Car, contrairement aux objets matériels, le lien que j’entretiens avec la Torah va venir compléter mon intériorité. Tout comme mon épouse va également venir compléter mon intériorité.

Cela requiert une responsabilité de la part de l’homme : la Torah, on doit l’aimer, la chérir, et prendre soin d’elle.  C’est pareil pour la femme ! Il se doit de l’aimer, la chérir, et prendre soin d’elle, car elle est une partie de lui-même.

Contrairement aux objets matériels, que l’on peut certes contrôler mais qui ne peuvent et ne pourront jamais venir compléter notre intériorité, l’épouse vient remplir ce rôle. Elle vient compléter son mari en lui apportant cette partie essentielle et qu’il lui manquait tant.

En d’autres termes, le mariage n’a rien à voir avec le contrôle, ni la possession. Il s’agit de l’aboutissement d’un être incomplet venant rechercher la complétude avec son alter ego. Par conséquent, rien d’étonnant à ce que les cérémonies de mariage nous émeuvent aux larmes…

Et souhaitons que cela continue toujours ainsi !