"Écoutez Rav, dit calmement le chauffeur. Autant en Torah, vous me surpassez, autant en matière de football, c’est moi qui pourrais vous donner des cours…". Mais le Rav n’en démordit pas : "Non, non, c’est bien la Grèce qui a battu Israël 2-0". Face à la mine incrédule du chauffeur, le Rav s’expliqua… 

Il y a plusieurs dizaines d’années de cela, en Israël, une demi-finale de football opposa la Grèce à Israël. Au terme du match, Israël sortit vainqueur 1 à 0. Au moment où le match prenait fin, le Rav Chalom Chwadron, que l’on surnommait le Maguid de Jérusalem, se trouvait dans un taxi, coincé dans un bouchon géant. Le Rav demanda au chauffeur la raison de cette affluence, ce à quoi ce dernier répondit : "Comment, vous n’êtes pas au courant ? Israël vient de gagner 1-0 contre la Grèce au football !" "Vous devez vous tromper, rétorqua le Rav. C’est Israël qui a perdu 2-0 contre la Grèce."

Une victoire ? Un échec !

"Écoutez Rav, dit calmement le chauffeur. Autant en Torah, vous me surpassez sans doute largement, mais en matière de football, c’est moi qui pourrais vous donner des cours… Nous venons de gagner 1-0 contre la Grèce". Mais le Rav n’en démordit pas : "Non, non, c’est bien la Grèce qui a battu Israël 2-0". Face à la mine incrédule du chauffeur, le Rav poursuivit : 

"Laissez-moi vous expliquer le fond de ma pensée. Il est vrai que nous venons de battre la Grèce. Cependant, la Grèce vient de remporter contre nous deux victoires : la première, c’est de nous faire participer à ce type d’activités. En effet, la Torah n’interdit pas le sport ; au contraire, lorsque le sport est pratiqué pour se maintenir en bonne santé ou pour décompresser, il est même recommandé. Cependant, c’est lorsqu’il devient une finalité, un but en soi, que cela devient problématique. Notre but ultime en tant que Juifs est l’étude et la pratique de la Torah, et non le sport ou autre.

- Vous dites vrai", reconnut le chauffeur de taxi. "Mais pourquoi affirmez-vous que la Grèce a gagné 2-0 contre nous, quel est ce deuxième point marqué ?

- La seconde victoire de la Grèce, c’est de nous avoir laissé gagner le match, continua le Rav. Le fait que nous ayons gagné est en soi un échec. En effet, le Midrach explique que si un Juif quitte la Yéchiva pour se lancer dans les affaires, sa réussite dans ce domaine serait un grave échec. À l’inverse, Hachem ferait une très grande faveur à ce Juif en faisant échouer ses entreprises. En effet, lorsque Hachem souhaite témoigner son amour à quelqu’un, Il le guide dans la voie de la Vérité. Au contraire, s’Il laisse la personne se fourvoyer dans des voies tortueuses, il ne s’agit pas d’une preuve d’amour… Il en est de même avec notre prétendue victoire sur la Grèce. Il ne s’agit de rien d’autre que d’un échec cuisant."

Tout dépend des priorités

Puisque notre sujet est ‘Hanouka, il serait bon de rappeler que l’Empire grec qui existait il y a 2000 ans subsiste encore de nos jours, quoique sous une autre forme. Le monde occidental et tout ce qu’il a à proposer est l’Empire grec moderne. Les médias, la technologie, les réseaux sociaux, la mode, le sport sont autant d’éléments érigés en nouvelles idoles à aduler. Les diktats du monde occidental ont envahi l’espace public au point qu’il est extrêmement difficile de s’en démarquer. Or, notre rôle en tant que Juifs est justement de prendre du recul par rapport à ces valeurs pour pouvoir redéfinir nos priorités dans la vie.

Je me souviens qu’il y a plus de 30 ans, Israël gagna l’Eurovision deux années consécutives. L’une de ces victoires eut lieu précisément le soir du Séder de Pessa’h. L’une de mes connaissances avait d’abord regardé l’émission, puis seulement ensuite s’était attablé pour le Séder... Sans le savoir, il venait de révéler quelles étaient ses priorités !

‘Hanouka, hier comme aujourd’hui

Aujourd’hui, notre situation n’est malheureusement pas si différente de celle de l’époque de la domination grecque. L’esprit matérialiste qui prédomine dans nos sociétés modernes menace notre identité juive, exactement comme à l’époque de ‘Hanouka. Or, que faire pour repousser ces influences extérieures ? L’heure n’est plus au combat physique, comme à l’époque de ‘Hanouka. Mais notre rôle consiste plutôt à redéfinir notre système de valeurs et nos priorités. Interrogeons-nous : qu’est-ce qui a réellement de la valeur à nos yeux ? D’entendre parler d’une nouvelle découverte scientifique ou d’accomplir une Mitsva ? Et lorsque les deux mondes sont confrontés, celui de la matérialité et celui de la Torah, lequel allons-nous privilégier ?

Toute une symbolique

Dans la Torah, l’huile d’olive est toujours symbole de sagesse. Or, lorsque nos Sages rapportent qu’à l’époque de ‘Hanouka, toutes les huiles du Temple avaient été rendues impures par les Grecs, cela signifie en réalité que l’esprit juif s’était retrouvé souillé par l’influence matérialiste grecque. Nombre de Juifs avaient abandonné leur croyance pour adopter les valeurs hellènes. Seule une fiole d’huile pure, soit la Néchama juive jamais entachée par la faute, était encore intacte. C’est cette fiole qui permit de rallumer le flambeau et de perpétuer notre identité juive, à l’instar de cette parcelle divine pure qui anime notre être et nous rattache inéluctablement à D.ieu, quelles que soient les circonstances ou les péchés que nous avons commis. 

Du reste, selon la Halakha, la ‘Hanoukia ne peut être placée à plus de dix Téfa’him de hauteur (environ un mètre). Or, nos Sages enseignent dans le Midrach (Yalkout Chim’oni sur Téhilim 115) que "la Chékhina ne descend jamais plus bas que dix Téfa’him" (Soucca 5a). ‘Hanouka fait exception : a priori, la flamme doit être allumée à une hauteur de moins de dix Téfa’him car en effet, durant cette fête, la Chékhina descend même en dessous de cette mesure. Ceci pour nous enseigner que ‘Hanouka a le pouvoir d’illuminer les âmes les plus meurtries, celles qui sont tombées au plus bas de la faute. À ‘Hanouka, la Chékhina atteint même ces âmes-ci, faisant entorse au principe susmentionné en descendant en-dessous de son seuil habituel. La ‘Hanoukia est allumée la nuit, qui représente les ténèbres spirituelles. ‘Hanouka est justement cette lueur venant éclairer notre âme aux tréfonds de l’obscurité.

‘Hanouka et le Or Haganouz

La preuve que les huit jours de ‘Hanouka sont particulièrement propices à l’élévation dans l’étude et dans la prière est visible à travers un autre symbole de la fête. En effet, pendant ‘Hanouka, nous allumons en tout 36 flammes (une le premier soir, deux le second soir etc.), sans compter le Chamach qui n’est pas une lumière de ‘Hanouka à proprement parler. Or, ces 36 flammes représentent les 36 heures de Or Haganouz

Le Or Haganouz (littéralement "lumière dissimulée") est une lumière spirituelle intense, sans commune mesure avec la lumière matérielle que nous connaissons, qui fut créée au moment de la création du monde. Cette lumière rayonna sur le monde durant 36 heures puis, suite à la faute d’Adam Harichon, fut "confisquée" par D.ieu Qui la dissimula au sein de la Torah. Afin de retrouver cet éclat spirituel intense, il faut se plonger corps et âme dans l’étude de la Torah. Or, pendant les huit jours que dure ‘Hanouka, cette lumière intense rejaillit et est à portée de main ! C’est dire la puissance extraordinaire contenue dans ces jours. Sachons donc exploiter ces journées de miracles et d’aide divine de la meilleure façon possible !