Question d’une internaute : je me retrouve face à un grand problème ; un problème qui perdure et avec lequel je ne sais plus trop quoi faire… J’aime mon mari mais il a des comportements que je ne supporte pas. Il crie sans cesse sur nos enfants, n’a aucune patience avec eux, ne prend jamais le temps pour les sortir… Mais le pire, c’est que j’ai l’impression qu’il ne supporte pas notre fils aîné et cela devient de plus en plus dur. Il lui dit non à tout, l'ignore quand il lui parle, etc. Je sais pourtant qu’il adore nos enfants mais il leur parle très souvent avec mépris et fait des différences, à l’égard d’une en particulier qu’il affectionne plus. Je ne sais pas quoi faire car j’ai peur de perdre mon amour pour lui. J’ai l’impression que tout peut amener à des frictions ou des disputes. C’est surtout son approche trop stricte dans l’éducation que je déteste : on dit non à tout ! Et surtout je n’ai pas envie que nos enfants grandissent comme ça. Merci de votre aide précieuse.

Réponse de Mme Nathalie Seyman

Dès qu’une femme apprend qu’elle est enceinte, le processus de la maternité se déclenche : avant l’arrivée du bébé, elle est déjà mère. Il faudra évidemment des ajustements, mais elle a la capacité de ressentir les besoins de son enfant de l’intérieur du fait de ses neuf mois de proximité avec lui. Pour un homme, c’est bien plus difficile. Il agit un peu plus en « aveugle ». Il ne devient père que progressivement, par la pratique et guidé par l’amour qu’il porte à ses enfants et son envie de bien faire. Comment réagir en tant que maman face à ses erreurs ? Comment l’aider à se parfaire ?

Le rôle du père

À l’arrivée d’un enfant, les pères se sentent souvent maladroits, ne trouvant pas forcément tout de suite leur place entre la mère et l’enfant. Par la suite, ils puisent dans leur expérience personnelle afin de se positionner : leur modèle étant leur propre père. Modèle ou bien contre-modèle… Quoiqu’il en soit, son influence sera très forte, qu’elle soit consciente ou non-consciente. Dans nos textes (Sota 34a), il est d’ailleurs explicitement écrit : « Les actes des pères sont un repère pour les fils ». On comprend donc bien l’importance d’être un excellent modèle pour ses enfants en tant que père. Dans le comportement mais aussi dans l’apprentissage. Car si c’est la mère qui transmet la judéité, c’est pourtant le père qui transmet la Torah.

Parfois avec les soucis du quotidien, le rôle éducatif qu’ont les parents se perd pour faire place à une exaspération envers les demandes répétées de leurs enfants et cela peut évidemment se comprendre, car qui n’a jamais été dans ce cas ? Mais l’important est de savoir se remettre en question et de se réajuster sans cesse pour ne pas perdre de vue cet objectif initial.

Autorité contre autoritarisme

Un père doit être la figure de l’autorité de la maison. Car une mère, même si elle est autoritaire, fonctionnera toujours plus avec ses sentiments. Elle a donc besoin de ce soutien « extérieur » que lui apporte le père de ses enfants.

Mais avoir de l’autorité, ce n’est pas forcément être autoritaire. Il faut savoir dissocier l’autorité de l’autoritarisme. Exiger quelque chose d’un enfant pour sa sécurité, c’est de l’autorité. Exiger pour exiger, c’est de l’autoritarisme. Il est très facile de déborder et ce n’est pas toujours simple de trouver le juste milieu. Le père et la mère doivent avoir deux rôles bien différents l’un de l’autre pour que l’enfant s’y retrouve. Et chacun des parents doit aider à réguler l’autre. L’important à retenir est qu’il est essentiel d'instaurer un vrai dialogue au sein d'une famille. Rien n'est pire que les non-dits et les silences provoqués par la peur d’une crise de la part de l’un des parents. Tout d’abord parce que c’est le rôle des enfants de sans cesse demander de l’aide à leurs parents sur tous les sujets de la vie, et s’ils ne le font pas par peur de la réaction de leurs parents (mépris, indifférence, colère) alors les conséquences peuvent être désastreuses. Ensuite, parce que cela peut générer un climat familial étouffant qui fera fuir les membres de la famille.

Mes conseils

- Tout d’abord, ne lui jetez pas trop la pierre. C’est un père qui aime ses enfants mais qui les éduque de manière maladroite. Il n’y a rien qui ne peut être redressé car c’est ce qui est merveilleux avec les enfants : ils nous permettent sans cesse de nous parfaire et nous avons mille chances avec eux de faire toujours mieux.

- Ne renoncez pas jamais à vous faire entendre, ayez le courage de parler à votre mari lorsque vous trouvez qu’il n’a pas bien réagi. Mais évidemment jamais en présence de vos enfants. Lorsque vous êtes tous les deux, sans un ton accusateur mais en mode « débriefing », exprimez-vous sur la meilleure façon à réagir selon vous et débattez ensemble.

- Proposez-lui d’aller consulter ensemble un coach en éducation. C’est très instructif et permet de bien progresser en se posant les bonnes questions. Cela peut vous éclairer sur différentes méthodes éducatives à mettre en place afin de faciliter la vie familiale.

Conseils à votre mari

Monsieur, je n’ai pas votre version des faits mais si je me base sur les dires de votre femme, il est important pour vous de réaliser qu’il faudrait une autre méthode de transmission des valeurs à vos enfants. Je suis persuadée que c’est en voulant bien faire que vous agissez ainsi, pour que vos enfants, en particulier votre fils aîné pour lequel vous avez de grands projets, deviennent des êtres humains accomplis et épanouis. Or la fin ne justifie pas les moyens car les méthodes pour parvenir à cet objectif sont bien plus importantes que l’objectif lui-même. Il est impératif d’instaurer un climat familial harmonieux afin que les enfants puissent suivre votre voie, non dans la peur mais dans l’amour. Peut-être faut-il fouiller dans votre passé pour comprendre d’où vous vient cette colère ? Cela vous permettra de mieux vous comprendre et ainsi de réajuster votre comportement vis-à-vis de vos enfants. Rabbi Na’hman de Breslev disait : « Quand le père est coléreux, les enfants sont stupides ».

N’hésitez pas à vous remettre en question en ce qui concerne l’éducation. Et je vais vous rassurer : nous en sommes tous là, chacun à son niveau et avec ses défauts !

Béhatsla’ha !

Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme