La Paracha de Béréchit inaugure un nouveau cycle de lecture, d’étude et de renouvellement de la Torah. Elle prend le relais des fêtes de Tichri et du mois de Eloul qui ont insufflé un vent puissant de Kedoucha dans le monde, invitant l’homme à réaliser son introspection, à mesurer les richesses qui sommeillent en lui afin de les actualiser.

Durant ce cheminement spirituel, l’homme a pu mesurer combien il est faillible, et combien il peut parfois se laisser détourner de la sagesse. Ce constat invite à l’humilité, à comprendre que la faute est certes inhérente à la nature humaine, mais qu’elle n’est pas inévitable et qu’elle n’est pas le dernier mot de l’histoire. Après la faute, il y a la Techouva, le repentir, la capacité à s’amender, à se corriger, à se parfaire. En réalité, nous pourrions même dire que la Techouva préexiste à la faute, comme nous le disent nos Sages, la Techouva a été créée avant même la création du monde (Nedarim 39b) !

C’est précisément ce message d’espoir dont est porteur la Paracha de cette semaine et qui nous rappelle une vertu cardinale, peut-être la mère de toutes les vertus : l’humilité.

Tout d’abord, lord de la création de l’homme, la Torah stipule « D.ieu dit : « Faisons l’homme ! » ». Et Rachi de s’interroger : pourquoi employer la première personne du pluriel alors que c’est D.ieu, tout Seul, qui a créé le monde ? Rachi répond à cette interrogation légitime en nous rappelant que « le texte n’a pas voulu manquer l’occasion de donner une leçon de savoir-vivre et d’enseigner la valeur de la modestie : le supérieur doit prendre l’avis de son subordonné et lui demander son autorisation (Beréchit Rabba 8, 7). »

C’est ainsi que D.ieu, Lui-même, qui n’a besoin d’aucun conseil et d’aucune aide, a sollicité l’avis de son « Beth Din », des anges, de l’armée Céleste comme Rachi le rappelle dans son premier commentaire sur ce même verset.

Il vient ainsi nous rappeler que l’exercice solitaire, autoritaire, abrupte du pouvoir n’est jamais une marque de grandeur ou de puissance, et encore moins une marque de sagesse aux yeux d’Hachem. Seul celui qui sait consulter autour de lui, se pencher vers ceux qui lui sont subordonnés, vers ceux qui sont plus « petits » que lui, est digne d’incarner et d’exercer véritablement et durablement le pouvoir et la puissance. Cette capacité à écouter celui qui est plus petit témoigne d’une capacité d’ouverture à l’autre, d’une capacité à concilier différents points de vue et à prendre en compte la complexité des situations, la multiplicité des points de vue. Cette capacité est la garantie la plus sure d’un exercice apaisé et sage du pouvoir.

En outre, la modestie témoigne également d’une capacité à se remettre en cause, de questionner ses choix, ses idées, ses décisions. Or, cette faculté n’est pas toujours naturelle, car l’homme s’entête parfois dans ses erreurs et refusent de les admettre. Ce faisant, il perd l’opportunité de s’améliorer, de se parfaire qui représente pourtant l’un des objectifs de la vie humaine.

C’est précisément ce message que nous transmet la Paracha lors de l’épisode de Cain et Abel. EN effet, après avoir vu son offrande refusée, Cain en conçoit une profonde déception, l’Eternel s’adresse alors à lui en ces termes : "Pourquoi es-tu chagrin, et pourquoi ton visage est-il abattu ? Si tu t'améliores, tu pourras te relever, sinon le Péché est tapi à ta porte: il aspire à t'atteindre, mais toi, sache le dominer ! » (Genèse, 4.6)

En quelques mots concis mais définitifs, le texte de la Torah livre aux hommes, dans ses premières pages, le secret de la vie morale et de l’aventure humaine : une quête permanente de perfectibilité, d’amélioration, et de dépassement de soi.

La Torah nous rappelle ainsi que les erreurs ne doivent pas être vécues comme des échecs définitifs révélateurs de notre petitesse, elles doivent, au contraire, servir de tremplin pour nous parfaire. Ayant pris conscience d’une faute, je suis en mesure de prendre des résolutions, des décisions qui me permettront, avec l’aide de D.ieu, de ne plus les recommencer.

Et, ainsi, progressivement, étape par étape, l’homme s’engage dans une quête permanente de perfectibilité, d’amélioration, et de dépassement de lui-même. C’est peut-être là, dans cette démarche modeste et laborieuse, que l’homme trouve

ra l’expression de plus haute dignité et qu’il parviendra à justifier l’œuvre de la Création et l’espoir placé en lui par le Créateur.