« D.ieu dit : "Faisons l’homme à Notre image, à Notre ressemblance." »[1] À la fin de la création du monde, Hachem voulut créer l’élément pour lequel tout l’univers fut élaboré : l’être humain. Le Midrach[2] raconte que la création de l’homme fut sujette à débat parmi les Malakhim. Certains soutenaient cette cause (comme le ’Hessed et le Tsédek, qui arguaient que l’homme prodigue des bienfaits et pratique la charité) et d’autres étaient contre (comme le Émet et le Chalom affirmant que l’être humain est plein de mensonges et provoque des disputes). À la suite de cette discussion, Hachem – Qui souhaitait manifestement créer l’homme – renvoya le Émet des Cieux et le plaça sur terre. Par conséquent, le Chalom resta seul contre deux opposants (le ’Hessed et le Tsédek). Et ainsi, Hachem put lancer la création de l’humanité.

Plusieurs questions peuvent être soulevées sur ce Midrach, mais l’on se concentrera sur deux d’entre elles.[3] Pourquoi renvoyer précisément le Émet des Cieux et non le Chalom ? Et puis il semble qu’Hachem n’approuva pas l’argument du Émet et du Chalom. Qu’avait-il d’incorrect et en quoi le renvoi du Émet permit-il de ne pas tenir compte de sa position ?

Rav Yaacov Kamenetsky explique le raisonnement des antagonistes. Le Émet affirmait qu’il n’existe qu’une Vérité, qui fut le pilier du monde. Donc, toute autre opinion est Chéker (fausse), puisqu’elle contredit l’unique Émet. En créant les êtres humains, la diversité entraîne automatiquement des divergences d’opinions et de croyances. L’Homme est donc plein de mensonges ; il ne mérite pas d’être créé. Et l’argument du Chalom dérive de ce même raisonnement ; l’avis contraire d’autrui mène à des différends entre êtres humains. La création de l’homme risque donc d’avoir des conséquences négatives.

Pour répondre à ces arguments, Hachem envoya le Émet sur terre. Il voulait par-là changer la conception du Vrai. Cela signifie qu’Il accorda à l’homme la capacité de définir le Émet selon son propre raisonnement. Même si elles diffèrent de la définition réelle de la Vérité, si les intentions de l’homme sont bonnes et qu’elles restent bien cadrées, ses opinions peuvent entrer dans la catégorie du « Émet ».[4] Une fois que l’idée d’une seule Vérité est éliminée, l’argument du Chalom n’existe plus ; on peut accepter la conception de l’autre, sans querelles.[5]

Cet enseignement concernant l’existence de plusieurs vérités est très pertinent dans notre vie. Tout d’abord, nous devons prendre garde à ne pas disqualifier les approches du judaïsme qui diffèrent de la nôtre. Tant qu’elles calquent les conceptions de la Torah, elles constituent des formes correctes de Avodat Hachem. Si un membre d’une famille choisit une voie différente dans son service divin, nous devons l’accepter, si elle reste dans le cadre voulu par Hachem. Et une même personne qui a été élevée de manière orthodoxe peut développer sa Avodat Hachem différemment, favoriser certains aspects…

Puissions-nous tous mériter de trouver le chemin qui nous mène à une réelle exploitation de notre potentiel.


[1]  Béréchit, 1:26.

[2] Voir Béréchit Raba, 8:5.

[3] Voir les commentaires sur le Midrach pour les autres questions et réponses.

[4] Il est évident que le Émet se définit selon certaines limites bien claires. Seule une personne savante en Torah et inspirée de Crainte de D.ieu peut affirmer avoir un avis conforme au Émet. Inutile de préciser que la Torah rejette complètement l’idée de vérité relative, où chacun peut définir celle-ci selon sa propre logique. L’histoire a montré que c’est parfaitement faux et extrêmement dangereux. On parle ici de limites spécifiques et bien définies d’opinions correctes ; on peut alors émettre différents avis.

[5] Il est toutefois possible – voire inévitable – que certaines personnes adoptent certaines approches qui sont proscrites par la Torah. Il faudra alors rejeter ces raisonnements.