La Paracha se termine par l’histoire tragique du Mékalel – l’homme qui maudit Hachem quand il ne fut accepté dans aucune tribu par le Beth Din, parce que son père n’était pas juif. La Torah révèle que sa mère était Choulamit Bat Dibri, de la tribu de Dan. Nos Sages énumèrent plusieurs causes à ses actions terribles et le Daat Zékénim en explique certaines. La Guémara (Pessa’him 4a) affirme que si quelqu’un cherche constamment à aller résoudre ses problèmes au Beth Din, il est probablement issu de la tribu de Dan, dont le nom signifie « jugement ». Rachi explique : « C’est celui qui dit "viens au Beth Din" dans toutes ses relations interpersonnelles, n’écoute l’autre que par l’intermédiaire d’un juge. »

Le ’Hidouché Lev[1] discute de cette Guémara et du lien entre l’explication du Da'at Zékénim et l’histoire du Mékalel. D’après le Da'at Zékénim, la Guémara critique le fait de toujours aller en jugement. Pourquoi est-ce si grave – cette personne semble être un homme de vérité, prêt à faire ce qui est juste selon la loi ? En réalité, ce genre d’attitude n’est pas louable, car elle peut souvent conduire à la Ma’hloket (dispute). Lorsqu’une personne n’est pas disposée à faire des compromis ou à renoncer, il y a de fortes chances que ses actions engendrent de la négativité et provoquent des discordes. Le Da'at Zékénim explique que ce défaut fut à l’origine du conflit entre le Mékalel et ses compatriotes juifs, et a finalement provoqué sa terrible action de maudire Hachem.

Le ’Hidouché Lev pose une autre question sur l’interprétation du Da'at Zékénim. La Guémara estime que depuis la bénédiction donnée par Ya'acov à son fils Dan, les descendants de ce dernier aiment aller en jugement « Dan Yadin Amo K’echad Michivté Israël – Dan jugera son peuple, comme l’une des tribus d’Israël. » [2]  Selon le Da'at Zékénim, ce verset est la source du défaut de Dan d’aller en jugement, mais la simple compréhension des paroles de Ya'acov n’a rien de négatif. Au contraire, il bénissait la tribu de Dan pour qu’elle mérite d’avoir un juge qui dirige le peuple juif. Cela s’est d’ailleurs concrétisé chez le personnage de Chimchon. Pourquoi le Da'at Zékénim interprète-t-il le verset de façon négative ?

Le ’Hidouché Lev répond que Ya'acov a bien béni la tribu de Dan pour son adhésion à la vérité et à la justice. Ce sont d’excellentes qualités, car elles permettent à l’individu de suivre le droit chemin et de s’éloigner des fautes. Cependant, ce même trait positif risque d’être mal utilisé si la personne refuse de renoncer à ses opinions ou de se montrer conciliant sur sa conception des choses. Cela peut entraîner des péchés dans le domaine du Ben Adam La’havéro, car la haine et la discorde peuvent facilement être provoquées. Les membres de la tribu de Dan étaient censés utiliser ce trait de la bonne manière, mais le type de personne décrit par la Guémara comme allant toujours au Tribunal, et le Mékalel en particulier, ont abusé de cette caractéristique, ce qui eut des conséquences désastreuses. 

Le ’Hidouché Lev enseigne un principe important sur les Middot en général. Même en ce qui concerne les traits de caractère généralement considérés comme positifs, l’individu doit faire attention et éviter de se laisser entraîner vers la faute. Certaines personnes ont une tendance naturelle à la rigueur ; ils veulent tout régler selon la justice et la vérité. Comme le souligne le ’Hidouché Lev, ce sont des traits admirables, mais en même temps, si une personne ne contrôle pas ses Middot et ne les canalise pas vers la 'Avodat Hachem, celles-ci peuvent facilement le conduire à traiter les autres trop strictement et à éviter les compromis nécessaires. 

Dans cet ordre d’idées, la Guémara enseigne que le Beth Hamikdach fut détruit, parce que les Juifs étaient Makpidim (rigoureux) les uns envers les autres et traitaient les autres selon la stricte de loi.[3] Cela prouve la gravité de la rigueur. Une autre Guémara affirme que le deuxième Beth Hamikdach fut détruit pour une raison différente – la Sinat ’Hinam (haine gratuite) – il semble que ces deux Guémarot se complètent ; les Juifs étaient si rigoureux que cela provoqua des ressentiments et des discordes. 

Puissions-nous tous mériter de nous servir du jugement et de la vérité de la bonne manière.

 

[1] ’Hidouché Lev, Vayikra, p.152.

[2] Béréchit 49,16.

[3] Baba Metsia, 30b.