Nous avons expliqué la semaine dernière comment l’honneur dû aux parents nous inculque la qualité de gratitude. L’une des raisons pour lesquelles nous devons honorer nos parents tient à ce que nous devons ressentir une immense gratitude pour les nombreuses bonnes actions qu’ils ont effectuées pour nous. Et surtout, ils nous ont offert le plus beau cadeau possible : celui de la vie.

Cette semaine, nous espérons pousser cette idée plus loin ; nous savons que l’injonction d’honorer nos parents est l’un des Dix Commandements donnés au peuple juif sur le Mont Sinaï. Ces commandements ont été gravés sur deux tables en pierre, portant chacune cinq commandements. Nos maîtres expliquent que les commandements sont divisés en deux catégories générales : les lois régissant les relations entre l’homme et D.ieu et l’homme et son prochain.

Parmi celles entre l’homme et D.ieu, on trouve l’obligation de manger Cacher et de respecter le Chabbath. Le but de ces commandements est de développer notre relation à D.ieu, et ils concernent peu notre relation avec autrui[1].

En revanche, les commandements entre l’homme et son prochain sont destinés à nous permettre d’améliorer nos relations avec ceux qui nous entourent. Par exemple : « Aime ton prochain comme toi-même » et « Tu ne voleras point. »

D’après la tradition de nos maîtres, la première table a été gravée avec les cinq premiers commandements qui sont tous dans la catégorie de l’homme et D.ieu. Or, la difficulté apparaît dans le cinquième commandement de ce groupement de l’homme et D.ieu : « Honorer tes parents ». A priori, ce commandement nous aide simplement à développer notre relation avec notre prochain, et n’a pas de lien direct avec l’amélioration de notre relation à D.ieu. Mais si on approfondit notre analyse, nous constatons que respecter correctement ce commandement contribuera à rehausser notre relation à D.ieu.

Le Séfer Ha’hinoukh que nous avons cité la semaine passée sur l’importance d’être reconnaissant envers nos parents, continue de développer ce thème. Il explique que ce sentiment de gratitude doit nous conduire à apprécier tout ce que Hachem a fait pour nous. Voici ses termes :

« En développant ainsi en lui-même les sentiments de reconnaissance envers ses bienfaiteurs, l’homme reconnaîtra finalement que c’est D.ieu qui est la source de tous ces bienfaits, Lui qui est la cause première de notre existence, de celle de nos ancêtres et de celle du premier homme, Adam Harichon[2]. Il réalisera que c’est D.ieu qui lui accorde la vie, qui subvient à ses besoins…enfin que c’est D.ieu qui en lui donnant l’âme, lui a permis de comprendre et de raisonner ; car sans âme, l’homme ne se distinguerait pas de l’animal ! Ainsi, il réalise à quel point il faut veiller à servir D.ieu correctement.[3] »

En se concentrant sur tout ce que nos parents ont fait pour nous, nous en arrivons automatiquement à la prise de conscience que Hachem nous a prodigué encore plus de bien. Par exemple, même après avoir quitté la maison de nos parents pour accéder à une vie indépendante, Hachem veille constamment sur nous et nous guide. En conséquence, de la même manière que notre gratitude envers nos parents doit nous pousser à les honorer, ainsi notre gratitude envers Hachem doit nous pousser à donner le meilleur de nous-mêmes pour suivre Ses voies. De plus, nous devons réaliser que Sa bonté infinie est un signe de Son amour immense pour nous et que tout ce qu’Il nous demande de réaliser est pour notre propre intérêt.

Nous abordons maintenant les lois liées à ce commandement. En vérité, il y a quatre commandements distincts liés à la conduite d’un enfant envers ses parents.

-« Honore ton père et ta mère afin que tes jours se prolongent sur la terre que l'Éternel ton Dieu t'accordera. »[4]

- « Révérez, chacun, votre mère et votre père, et observez Mes sabbats : Je suis l'Éternel votre D.ieu. »[5]

- « Celui qui frappera son père ou sa mère sera mis à mort. »[6]

- « Celui qui maudit son père ou sa mère sera puni de mort. »[7]

Dans les prochaines semaines, nous analyserons chaque commandement en détail.

Nous commencerons par le commandement d’honorer nos parents (en hébreu : Kiboud Av Vaèm). La Guémara nous enseigne qu’honorer se réfère au fait de pourvoir aux besoins de nos parents ; ceci inclut spécifiquement de s’assurer qu’ils ont suffisamment de nourriture, de boisson et de vêtements. Par exemple, lorsqu’un parent demande à son fils de lui apporter à boire, l’enfant est obligé par la Torah d’obéir. Cette obligation inclut également la nécessité de s’occuper des parents s’ils ont des problèmes de santé, s’ils sont âgés et ont besoin qu’on s’occupe d’eux.

La question se pose lorsqu’aider nos parents se fera aux dépens de l’argent ou du temps de l’enfant.[8] Un enfant a-t-il l’obligation de soutenir ses parents sur le plan financier ? D’après la Loi, il n’y est pas tenu. Par exemple, l’enfant ne doit pas payer pour les frais de santé de ses parents, mais le parent doit s’en acquitter lui-même. Le problème se pose lorsque le parent n’a pas d’argent : dans un tel cas, l’enfant a l’obligation de l’aider financièrement, dans le cadre de son obligation générale de donner la charité, mais non en vertu de la loi d’honorer ses parents. D’après les lois de la Tsédaka, on est tenu de donner à ceux qui nous sont le plus proches avant de donner à des étrangers. En conséquence, pourvoir aux besoins de nos parents est la priorité numéro 1. Même dans un tel cas, il y a une limite à la somme que l’on doit débourser pour combler les besoins des parents - on n’est pas tenu de donner plus d’1/5ème de notre argent.

De même, il n’est pas forcément nécessaire de consacrer énormément de temps pour s’occuper de nos parents. Par exemple, on n’est pas tenu de renoncer à notre travail pour prendre soin d’eux.

Ces lois nous enseignent qu’honorer nos parents ne revient pas simplement à faire preuve de politesse avec eux. Au contraire, une partie de notre dette de gratitude envers eux doit se traduire par des efforts concrets pour pourvoir à leurs besoins.


[1] Il faut relever que même les commandements de la catégorie de l’homme et D.ieu peuvent néanmoins grandement améliorer notre relation aux autres. Le respect du Chabbath, par exemple, offre une occasion excellente (par ailleurs rare) pour les membres de la famille de passer du temps de qualité ensemble, sans être distraits par la télévision, l’Internet ou les téléphones.     .

[2] "Richon" signifie premier.

[3] Séfer Ha’hinoukh Mitsva 33.

[4] Chémot, Parachat Yitro, 20:12. Ce passage se trouve dans les Dix Commandements.

[5] Vayikra, Parachat Kédochim, 19:3.

[6] Chémot, Parachat Michpatim, 21:15.

[7] Ibid, 21:17.

[8] Il existe de nombreuses situations variées relatives à l’obligation de s’occuper des parents et de leur procurer une assistance financière. Nous nous contentons ici de dresser les grandes lignes générales de ces lois. Pour des cas spécifiques, il faudra s’adresser à une autorité rabbinique compétente pour savoir comment procéder.