Question d'une internaute : "Je vous écris, car moi et mon mari sommes désemparés ! Mon fils a décidé de laisser tomber toute la religion. Pourtant, nous l'avons mis à l'école juive et l'avons envoyé en colonie de vacances juive toute sa vie. Mais, tout d'un coup, au bout de sa troisième année d'étude de comptabilité, il nous a dit qu'il est dégoûté de la religion, que c'est "dogmatique" et qu'il veut vivre sa vie tranquillement. Alors, il est parti de chez nous, il vit en coloc avec deux copains que je ne connais pas du tout et qui ne sont bien sûr pas du tout religieux. Il vient chez nous le vendredi soir et aussi me déposer du linge à repasser, mais, à part ça, on ne sait plus trop ce qui se passe dans sa vie. Nous sommes très tristes, son père et moi, nous avons l'impression d'avoir mal fait les choses et que c'est trop tard pour tout rattraper. On assiste passifs à sa dégringolade spirituelle. Que doit-on faire ???"

Réponse de Mme Nathalie Seyman

En tant que parents, nous éduquons nos enfants selon les valeurs qui nous paraissent les plus justes afin d’en faire des adultes accomplis, équilibrés et heureux. La transmission de la Torah prend une grande place dans l’éducation, si ce n’est la place principale, étant donné qu’elle englobe toutes les valeurs qui font qu’un adulte en devenir se trouvera dans le droit chemin. Mais, lorsque nous n’avons plus les rênes et que l’enfant, qui a grandi, décide de suivre son propre chemin, quelle est la meilleure attitude à adopter ? Réfléchissons ensemble.

Ce qui se passe en lui

Votre fils est parti de chez vous et, de ce fait, a entamé le long processus qui fera de lui un adulte. Il se trouve à un moment de sa vie où il se pose des questions. Et le fait de n’avoir pas pu, pour maintes raisons, obtenir les réponses à son questionnement a très certainement provoqué cet écart du chemin de la Torah. Ce cheminement le mène ainsi à rejeter les valeurs que ses parents lui ont transmises pour essayer de trouver ses propres réponses, acquérant ainsi une autonomie de pensée. Tout ceci n’est pas négatif, car cela fait partie des embûches de la route qui mène à une vie d’adulte. Il est toujours sain de se poser des questions. Le plus important est d’avoir sur sa route les meilleures personnes possibles pour y répondre. Et qui d’autres que ses parents ?

Le Sur-moi parental

À présent, je vais vous rassurer en vous déclarant que l’on peut partir le plus loin possible de ses parents et que cela ne change rien : on emporte papa-maman partout avec nous ! Et cela, grâce à notre Sur-moi, qui est un terme de Freud pour « la conscience morale ». Toute l’éducation que vous avez donnée à votre fils, toutes les valeurs de la Torah que vous lui aviez transmises se trouvent en lui, il les a intériorisées et elles ne le quitteront jamais. Aujourd’hui, il semble les rejeter à vos yeux, mais elles sont présentes et elles reviendront comme un boomerang. « La pomme ne tombe jamais loin de l’arbre », et c’est lorsqu’il trouvera l’harmonie entre les réponses aux questions qu’il se pose et les valeurs que vous lui avez inculquées qu’il reprendra le même chemin que celui de ses parents.

Conseils

- Dites-vous bien qu’il ne s’agit pas de « dégringolade spirituelle ». Il s’agit d’une absence de pratique, certes, mais, spirituellement, votre fils a gardé toutes ses valeurs juives.

- Surtout, ne lui reprochez rien et multipliez au contraire les preuves d’amour. Montrez-lui que votre porte est toujours ouverte.

- Il connaît les règles, donc, s’il ne les pratique pas chez vous, c’est sciemment. Je vous conseillerais de ne pas faire trop cas de cela. Continuez votre pratique des Mitsvot devant lui, comme à votre habitude. L’exemple vaut toujours plus que mille discours.

- Répondez à toutes ses questions sur la religion. Et si vous ne connaissez pas la réponse, ne répondez pas au hasard et ne fermez pas la discussion, mais osez dire que vous ne savez pas et que, s’il le souhaite, vous irez ensemble demander à quelqu’un qui aura probablement la réponse. La Torah nous enseigne que toute question mérite d’être posée.

- Ne l’obligez pas à parler de ce qu’il vit, mais faites-lui comprendre que vous êtes présente s’il en a besoin.

Un grand Rav avait un fils qui avait décidé de ne plus faire Chabbath. Un jour, il arriva chez ses parents un vendredi soir, alors que ces derniers avaient des invités pour Chabbath, en voiture et avec son téléphone portable en main. Les invités en étaient choqués. Son père, le Rav, se leva et, tout heureux de voir son fils, le fit assoir à côté de lui sans aucun reproche, mais, au contraire, avec un grand sourire. Et il en fut de même à chaque fois que le fils rebelle revenait chez lui. Plus tard, il reprit le chemin de la Torah en avouant que c’était grâce à son père, à l’absence de reproches et à la joie qu’il manifestait à chaque fois qu’il le voyait.

Il faut garder en tête que chaque enfant est un don d’Hachem, et que nous, parents, n’en sommes que les gardiens. Hachem compte sur nous pour l’élever de façon à en tirer le meilleur de lui. Mais l’enfant ne doit pas à tout prix ressembler à ses parents ou suivre leur chemin, il doit satisfaire Hachem avec son propre potentiel. Son devenir une fois adulte n’est pas en notre pouvoir et le chemin par lequel Hachem le conduit non plus. Un enfant n’est pas un résultat de nos désirs personnels, mais nous devons toujours agir seulement et uniquement pour son bien. Vous avez réussi votre éducation en transmettant à votre fils les valeurs juives. Et même s'il est rebelle aujourd'hui, ne doutez pas qu’il se rapprochera de vous demain s'il sent que vous l’aimez tel qu'il est et non tel que vous voudriez qu’il soit.

Béhatsla’ha !

Si vous avez une question à poser à la psy, envoyez un mail sur l'adresse suivante [email protected]. Mme Seyman essaiera d’y répondre et la réponse sera diffusée de façon totalement anonyme.