L’une des personnalités les plus remarquables des Prophètes est le roi ‘Hizkiyahou. Les Prophètes mettent en valeur sa grande droiture et ses efforts pour répandre l’étude de la Torah, et dans le même temps, il a grandement réduit le culte des idoles qui prévalait à l’époque du règne de son mécréant père, A’haz. Parmi ses nombreuses vertus, il semble qu’il a excellé tout particulièrement dans un domaine plus que tout autre personnage des Prophètes.

Le texte dit : « C'est en l'Eternel, Dieu d'Israël, qu'il mit sa foi. Aucun ne l'égala parmi les rois de Juda qui lui succédèrent ou parmi ceux qui l'avaient précédé. »[1] Les commentateurs se demandent si d’après une interprétation simple du verset, ‘Hizkiyahou a été supérieur aux deux rois considérés comme les plus remarquables : David et Chlomo. Le Rinat Its’hak répond que ce verset met particulièrement en relief son trait de Bita’hon, la confiance en D.ieu, et dans ce domaine, ‘Hizkiyahou a en effet surpassé David et Chlomo, mais dans d’autres domaines, il n’a pas été à leur niveau. [2]

Nos Sages vantent les mérites du niveau de Bita’hon de ‘Hizkiyahou qui a dépassé d’autres rois vertueux. Le Midrach[3] explique qu’il y a eu quatre rois, et que chacun d’eux a surpassé le précédent par son niveau de confiance en D.ieu. Ces quatre rois ont été David, Assa, Yéhochafat et ‘Hizkiyahou ; lorsque David est parti en guerre, il a déclaré vouloir poursuivre ses ennemis, et croire en Hachem qui lui donnerait la victoire ; Hachem a alors dit qu’Il lui permettrait de réussir. Assa déclara qu’il n’avait pas le pouvoir nécessaire pour attaquer et qu’il se contenterait juste de poursuivre ses ennemis, sans même les attaquer, et Hachem déclara qu’Il se chargerait du reste. Yéhochofat affirma n’avoir pas assez de pouvoir pour poursuivre ses ennemis, donc il se contenta de réciter la Chira (cantique) et Hachem se chargea du reste. Mais ‘Hizkiyahou les a tous surpassés : lorsque l’immense armée assyrienne menaça de l’attaquer, ‘Hizkiyahou déclara qu’il n’avait pas suffisamment de force pour réciter la Chira, il se contenterait d’aller dormir et se reposerait sur Hachem ; Hachem répondit en envoyant un Malakh, un ange pour éliminer les Assyriens.[4]

‘Hizkiyahou n’a pas seulement excellé dans le trait de Bita’hon, mais a également influencé le peuple juif à accroître sa confiance en D.ieu. Par exemple, il existait à l’époque un livre de traitements des maladies sur lequel le peuple se reposait pour guérir, sans compter sur Hachem. ‘Hizkiyahou dissimula ce livre, afin que le peuple se tourne vers Hachem pour sa guérison[5].

Nos Sages critiquent néanmoins ‘Hizkiyahou à plusieurs reprises, mais même dans l’une de ses erreurs les plus importantes, sa grande confiance en D.ieu ressort. Après le grand miracle au cours duquel l’armée assyrienne a été éliminée, tout en étant très reconnaissant, ‘Hizkiyahou n’a pas entonné de Chira pour saluer ces grands miracles. Son attitude a été très louable au point que d’après nos Sages, Hachem voulut faire de lui le Machia’h, mais comme il n’a pas chanté de cantique après ce miracle, il n’a pas mérité de devenir le Machia’h.[6] Les commentateurs s’efforcent de répondre à la question de savoir pourquoi il n’a pas chanté de Chira en réaction à un miracle si merveilleux. [7] Le Ets Yossef[8] explique que la raison pour laquelle ‘Hizkiyahou n’a pas entonné de cantique de louange tient au fait que l’on récite la Chira lorsqu’on vit dans la peur ou la grande difficulté et qu’on ne s’attend pas à être sauvé. Mais lorsqu’au final, on est sauvé, on est tellement reconnaissant que l’on est inspiré à louer Hachem par la Chira. Cela a été le cas lors de l’ouverture de la Mer des joncs, lorsque le peuple juif redoutait fortement d’être rattrapé par les Egyptiens devant la mer, et très inspirés par l’immense miracle de son ouverture, ils entonnèrent la Chira. Or, ‘Hizkiyahou se trouvait à un niveau tellement élevé de Bita’hon que même au moment qui paraissait le plus désespéré, lorsque la massive armée assyrienne menaçait de les attaquer, il était parfaitement calme et s’attendait à être sauvé en raison de sa grande droiture. En conséquence, il ne ressentit aucun besoin de réciter la Chira au moment où il a été sauvé, car il n’a absolument pas ressenti de peur au départ ! Il a été néanmoins critiqué : il n’aurait pas dû se reposer sur sa vertu pour le sauver et aurait dû se tourner vers Hachem, en ne se reposant sur aucun mérite.

On relèvera avec intérêt un autre épisode dans lequel nos Sages reprochent à ‘Hizkiyahou d’avoir fait trop de Hichtadlout, d’efforts concrets, alors qu’il aurait dû manifester plus de confiance en D.ieu. Alors qu’il avait été menacé par les Assyriens à un moment antérieur, il tenta de les apaiser en leur offrant des cadeaux. Dans ce cadre, il offrit notamment aux Assyriens les portes du Temple.[9]Nos Sages [10] affirment qu’il a fait erreur dans cette démarche, mais la question se pose de savoir pourquoi dans ce cas le Bita’hon lui a fait défaut et il a jugé bon d’offrir aux Assyriens un présent de si grande valeur. Le ‘Hida explique qu’il a estimé que s’il pouvait apaiser les Assyriens par des cadeaux, il devait le faire afin d’éviter la guerre afin que lui et son peuple puissent se concentrer sur l’étude de la Torah en toute sérénité, sans devoir se consacrer à la guerre. Mais les Sages ne sont pas d’accord avec ce raisonnement ; en effet, s’il n’avait pas offert les portes du Temple et s’était appuyé sur la protection de Hachem, il aurait enseigné au peuple une immense leçon de Bita’hon qui aurait été en soi une leçon de valeur qui dépassait son raisonnement d’éviter le Bitoul Torah.

Nous avons vu que la grandeur de ‘Hizkiyahou se manifesta principalement dans son remarquable niveau de Bita’hon. C’est important, dans le sens que le Bita’hon n’est pas une simple vertu. En effet, le Gaon de Vilna explique que le but du don de la Torah au Mont Sinaï consista à enseigner au peuple le trait de Bita’hon. En effet, dit le Gaon de Vilna, « tout revient à acquérir un Bita’hon parfait qui inclut toutes les Mitsvot. » [11]Ceci signifie que si un homme est doté d’une confiance en D.ieu parfaite, tout son service divin se mettra en place. ‘Hizkiyahou est un exemple exemplaire de l’acquisition d’un véritable Bita’hon.

 

[1]Rois II, 18:5.

[2] Cité dans Michbétsot Zahav, Rois II, p.423. Voir ibid, pp.422-423 pour d’autres approches de cette question de savoir si le verset signifie que ‘Hizkiyahou a été supérieur à David et Chlomo.

[3]Ekha Rabba, Hakdama, Piska 30.

[4]Rois II, 19:35.

[5]Brakhot, 10b.

[6]Sanhédrin, 94a.

[7]Voir Michbétsot Zahav, Mélakhim II, pp.474-475 pour une discussion complète sur cette question.

[8] Commentaire du Chir Hachirim Rabba, Chapitre 4, Piska 20.

[9]Rois II, 18:16.

[10]Brakhot, 10b.

[11] Gaon de Vilna, commentaire sur Michlé, chapitre 22.