« Ze veux papa ! »

Ce sont les premiers mots qu’a prononcés Sara, âgée d’un an et demi, la plus jeune de la famille, et son père fond de tendresse…

« Ce sont les premières paroles de notre Acher ainsi que de Rivka, » se souvient sa femme, en évoquant des souvenirs vieux de vingt ans. Et je me rappelle comme si c’était hier comme tu rayonnais de bonheur lorsque les enfants te poursuivaient et t’empêchaient de sortir de la maison. Tu étais si content de voir combien ils t’étaient attachés. Et aujourd’hui également, comme jadis, une pensée me vient à l’esprit : "Comment cela se fait-il ?" Je me trouve pourtant avec eux presque toute la journée, je me démène chaque jour pour les coucher et pour les réveiller, les réconcilie quand ils se querellent, leur peigne les cheveux, écoute leurs histoires sempiternelles. Et pourtant, qui les met en joie ? Toi. Vers qui ils accourent ? Vers toi ! Et qui leur manque ? Toi ! »

« Mais maintenant, contrairement à cette époque, j’ai évolué. Je me réjouis qu’ils t’aiment… »

À l’écoute des propos de sa femme, il écarquille les yeux. « Comment t’en souviens-tu ? S’étonne-t-il. Tout ce qu’ont dit les enfants, mes réactions et tes pensées passagères, alors que tout ça s’est passé il y a plus de vingt ans ?! »

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Mia n’aime pas regarder l’album de photos du mariage de sa sœur aînée.

Elle avait alors dix ans et, jusqu’à ce jour, a horreur de se voir dans la robe verte que sa mère lui avait confectionnée. Ce qu’elle n’aime pas spécialement, ce sont les photos qui ont été prises à la fin du mariage. Chaque fois qu’elle les regarde, elle est envahie par des sensations pénibles, alors même que des années se sont écoulées, qu'elle a grandi, est devenue adulte et qu’elle a même fondé sa propre famille ; elle se rappelle encore les mots blessants que lui avait dit sa cousine à propos de sa tenue.

Elle sait évidemment que sa cousine ne les pensait pas et que c’était également une petite fille, mais que faire si ces paroles se sont incrustées profondément dans son cœur et dans sa mémoire et, depuis, refusent obstinément de s’en aller ?

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Voilà que le téléphone sonne chez les Benayoun.

Mamie Aliza est au bout du fil ; elle s’adresse à sa petite-fille d’un ton joyeux : « Mazal tov ! Bon anniversaire pour tes huit ans, ma Rina adorée ! Il y a exactement huit ans, je suis devenue grand-mère ! »

« Je me souviens de ce jour comme si c’était hier. C’était un jeudi ; j’étais en pleine préparation du Chabbath. Je portais mon tablier bleu avec des rayures vertes… et soudain, le téléphone se mit à sonner. J’étais grand-mère ! Je ne peux pas oublier comment j’ai sauté de joie ; dans la panique, j’ai lâché la louche qui est tombée dans la marmite. Je fus éclaboussée par le bouillon du couscous. Je me suis un peu brûlée et j’en garde, jusqu’à ce jour, quelques traces. Je ne me suis même pas nettoyé les mains. En un clin d’œil, je me suis habillée, j’ai pris mon porte-monnaie et ai voulu voir la nouvelle merveille, toi, ma chère Rina. Combien étais-je émue… Je me suis précipitée à la maternité et ai demandé aux infirmières qu’elles me laissent te voir. Mes yeux étaient embués d’émotion et ne pus voir à qui tu ressemblais. J’ai simplement hoché de la tête lorsqu’une infirmière m’a dit en souriant : "Elle vous ressemble, mamie". Tu entends, Rina ? Je t’ai acheté un cadeau que tu aimeras»

« Un instant Rina, ton grand-père se tord de rire ; je dois savoir pourquoi.

Pourquoi ris-tu, papy ? Qu’y a-t-il d’amusant dans le fait que notre Rina fête son anniversaire ?

Tu te demandes comment j’arrive à me souvenir de tous ces détails ? Tu as l’impression que je les ai inventés ? Toi, tu les as oubliés ? Je n’y crois pas ! Comment est-il possible d’oublier ces instants si émouvants ? »


L’homme

L’homme a tendance à oublier les détails secondaires qui, apparemment, ne sont pas importants.

La femme

La femme se souvient généralement de chaque petit détail, même s’il semble insignifiant.

Comme nous l’avons expliqué au début de l’ouvrage, la différence qui existe entre eux provient du fait que, dans le cerveau, l’amygdale qui est responsable de la sélection des données à intégrer dans la mémoire réagit différemment chez l’homme et chez la femme. Et ainsi que nous l’avons vu, l’homme se souvient du point central d’une expérience en fonction de la décision prise par la partie droite de l’amygdale qui est dominante chez lui, alors que la femme se souvient des détails de cette expérience et de la réaction sociale que celle-ci suscite, à cause de la partie gauche de l’amygdale, qui est plus forte chez elle.

Solution

Il vous est permis de rappeler à votre mari que votre anniversaire va tomber dans quelques jours… Vous ne vous couvrez pas de honte en le faisant ; ne vous attendez pas à ce qu’il s’en souvienne tout seul. (Il se peut qu’il se le rappelle, mais des espoirs qui ne se concrétisent pas sont source de déception ; pourquoi ne pas le lui rappeler ? Le principal est de recevoir ce dont vous avez besoin de lui.)

En ce qui concerne les souvenirs douloureux et les offenses passées, pourquoi les remémorer ? Ils ont été déjà oubliés et pardonnés. Laissez la vie s’écouler, ne ternissez pas l’atmosphère avec des sujets désagréables, révolus et dérangeants.

Au lieu de cela, rappelez-vous et évoquez les choses positives que votre mari a faites au cours de sa vie, gravez-les dans votre cœur, parlez-en et utilisez-les pour l’encourager. Sachez que nous avons dans nos mains le pouvoir de « censurer » les souvenirs qui sont dans notre cerveau.