C’était un soir de décembre, pendant ‘Hanouka, où les lumières nous inondent de joie et nous éclairent… Après dix-huit mois durant lesquels les doutes m’assaillaient insidieusement, mes yeux se sont ouverts. Le miracle de ‘Hanouka, pour nous, aura consisté à admettre que le développement de notre enfant n’était pas celui d’un enfant de son âge et qu’il nécessitait une prise en charge.
Rabbi Israël Salanter disait qu’un « peu de lumière repousse beaucoup d’obscurité », encore faut-il déceler cette lumière. Les bougies de ‘Hanouka déclenchent en nous cette force et nous permettent d’y voir plus clair... 

Combien de temps peut-on éviter l’évidence ? À quel stade doit-on s’alerter ? Lorsqu’on s’aperçoit que notre bébé ne joue pas à cache-cache ? Qu’il ne chante pas avec nous « Ainsi font font » ? Qu’il n’applaudit pas ? Qu’il ne pointe pas du doigt ? Qu’il ne marche pas encore à l’âge « limite » ? Qu’il ne babille pas et continue inlassablement de mettre à la bouche tous les nouveaux jouets qu’on lui propose ?

Il est probable que si vous vous reconnaissez dans l’une de ces craintes, vous entreprendrez ou avez entrepris de consulter un médecin ou de prendre un second avis pour être rassuré, pour entendre de la part des professionnels que vos craintes étaient vaines et que votre enfant « prenait juste son temps ». Il s’agit là du processus que nous avons suivi pour notre enfant. La consultation s’est déroulée dans le calme, la pédiatre a procédé à un examen clinique, puis, elle a « testé » notre enfant quant à ses aptitudes en fonction de son âge. Elle nous a ensuite demandé, sur un ton sérieux, de nous asseoir, pour être prêts à entendre ce qu’elle avait à nous annoncer. La scène a pris des allures de mauvais film. Il fallait qu’elle nous parle à nous, parents, mais pour nous rassurer, avait-elle besoin de mettre tant de formes ?

C’est, dans ce cabinet médical, que notre épreuve a débuté... « Retard de développement », « analyses médicales », « rendez-vous à l’hôpital », « diagnostic », « prise en charge », autant de mots lancés comme des pierres dans un lac et moi qui restais incrédule…

Après quelques semaines à jongler entre l’espoir et le désespoir, à soulever des montagnes pour obtenir des diagnostics et tenter de mieux comprendre ce qu’il nous arrivait, nous nous sommes rendus auprès d’un Tsadik de notre génération pour y chercher une Brakha (bénédiction). Ses paroles résonnent en moi jusqu’à ce jour : « Étais-tu présente à Matan Torah (don de la Torah) ? », m’a-t-il demandé ? “Bien sûr”, balbutiai-je, tout en m’interrogeant dans mon for intérieur sur le message que cela comportait. Que voulait-il insinuer par ce message ? Les nuits à pleurer, les « Pourquoi moi ? Pourquoi mon enfant ? », les « De quoi sera fait l’avenir ? »...
Toutes ces réflexions étaient en réalité dénuées de sens, car dénuées de Émouna (foi en D.ieu). En effet, au moment où l’épreuve surgit dans notre vie, il nous est difficile d’adhérer pleinement à l’expression selon laquelle « Hakol Létova » (“Tout est pour le bien”). Et pourtant… nombreux sont les parents d’enfants extraordinaires qui affirment qu’élever ce type d’enfants les a transformés et leur a conféré des forces qu’ils n’auraient jamais suspectées.

Une fois le choc passé, j’ai entrepris de parler au Maître du monde, comme l’on parlerait à son Papa, quelques minutes par jour, en Lui avouant, dans un premier temps, que j’étais triste et certainement aussi, bien qu’en ayant honte, un peu en colère contre Lui. De là, j’ai repris plaisir à communiquer avec Hachem, j’ai chéri ces précieux instants que m’offrait la « Hitbodédout », ces discussions avec Hachem me soulageaient d’une certaine manière. C’est grâce à ce processus que j’ai pu éloigner peu à peu le désespoir qui m’habitait et mettre en place de grands projets, pour mon enfant, pour moi, pour notre famille, mais toujours avec le Maître du Monde comme partenaire. Grâce à mon enfant extraordinaire, j’ai débuté une introspection, appris à relativiser chaque situation et me suis tout simplement rapprochée d’Hachem. J’ai également appris ce qu’impliquait la notion de ‘Hessed, en proposant de l’aide aux mamans empruntant un chemin similaire.

Chaque Juif se doit d’accomplir une mission sur cette terre, or, parfois… souvent… il ne s’agit pas de la mission à laquelle nous nous attendions au départ. S’occuper de son enfant extraordinaire au quotidien, c’est travailler à chaque instant sur ses Middot (traits de caractère), en diminuant sa colère, en améliorant sa patience, en donnant encore et encore, en se surpassant dans le ‘Hinoukh (éducation) des autres enfants de la fratrie, pour leur apprendre la différence et le respect de l’autre. 

Ainsi, l’épreuve permet, une fois le choc encaissé, de progresser en Torah, moi qui hésitais depuis si longtemps à me couvrir la tête au quotidien (ayant pris sur moi de me couvrir la tête durant Chabbath et les fêtes), j’ai pris plaisir à mettre un Kissouï Roch (couvre-chef) une fois de plus dans la semaine, jusqu’à ce jour où j’ai estimé que le moment était venu de me couvrir la tête chaque jour, Baroukh Hachem

Devenir maman d’un enfant extraordinaire, c’est réaliser que nos efforts, notre Hichtaldout est indispensable pour les faire progresser, mais que RIEN n’est possible sans qu’Hachem n’y mette Sa main.

Devenir maman d’un enfant extraordinaire, c’est comprendre qu’Hachem « appelle nos Téfilot (prières) » et que nos Téfilot ont une force incommensurable ! C’est pourquoi, il nous faut prier, pour trouver les meilleurs praticiens, pour croiser la route des bonnes personnes qui partageront avec nous les témoignages qui nous renforceront, pour aider nos enfants à atteindre le meilleur de leurs capacités et au-delà.

Devenir maman d’un enfant extraordinaire, c’est également et surtout, se remémorer à chaque instant qu’Hachem « Rofé ‘Holé ‘Amo Israël », qu’Il souhaite que l’on se rapproche de Lui et que c’est certainement là, la manière qu’Il a trouvée pour nous permettre d’y arriver. 

Témoignage reçu de Johanna Bensoussan

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