“Ma belle-sœur m’énerve à toujours tout critiquer !”, “Mon mari exagère, il ne m’écoute jamais !”, “Mais qu’est-ce que j’ai fait au bon D.ieu pour mériter un enfant pareil ?!”

La médisance, malheureusement, qui n’en a jamais dit ?! Parfois, on a l’impression que ça nous libère, mais en vérité, plus on parle du défaut d’une personne, plus ce défaut devient insupportable à nos yeux. Plus on parle d’un problème relationnel avec un proche, plus cette relation nous pèse. Plus nous allons parler en négatif d’une personne, moins nous arriverons à trouver quoi que ce soit de positif chez elle.

Alors, comment sortir du cercle vicieux de la médisance ?

La Paracha de cette semaine, Métsora, nous parle la Tsara’at, une maladie de peau qui, à l’époque du Temple, était provoquée par la médisance. C’était une maladie spirituelle qui n’existe plus de nos jours (en tous cas, pas de façon visible) et qui stoppait la personne dans ses élans de médisance. En effet, si une personne contractait cette maladie, elle devait être mise en quarantaine en dehors du camp pour s’isoler, et, à l’issue de cet isolement, cette personne venait naturellement à se remettre en question et ainsi à ne plus médire.

De là, nous apprenons que parfois la solitude est le meilleur remède contre la médisance. Pourquoi ? Parce que lorsque nous nous trouvons seuls, nous pouvons de nouveau considérer nos proches sous une meilleure perspective. Nous pouvons de nouveau valoriser les qualités que nous ne voyons même plus à force de les fréquenter. Tout d’un coup, ils ne paraissent plus sous un mauvais jour tel que nous avions tendance à les dépeindre.

Vous connaissez Tonton Jacquot ? Tonton Jacquot qui énerve toute la famille parce qu’il se moque de tout le monde et qu'il fait des blagues un peu cocasses ! Et là, soudain, le jour où il décède, les discours changent du tout au tout : on commence enfin à penser du bien de lui et à parler en bien de lui : “Il avait tellement bon cœur”, “Il avait toujours le mot pour rire”, “Il était tellement optimiste Tonton Jacquot”. On a tous un Tonton Jacquot dans notre entourage : cette personne qui nous agace, jusqu’au jour où cette personne n’est plus… et que nous comprenons à quel point elle était extraordinaire et à quel point elle nous manque...

C’est exactement ce que veut nous dire cette Paracha : la proximité nous rend aveugles aux qualités de l’autre. La distance est parfois nécessaire pour nous permettre de mieux apprécier nos proches et de les considérer sous un meilleur jour.

La suite de la Paracha est étonnante, car elle nous parle de la femme qui devient Nidda suite à l’apparition de son cycle. Quel est le rapport avec ce que nous venons d’expliquer ?

Le Talmud nous explique le bien-fondé de la Nidda : D.ieu a créé la Nidda parce que l'homme vient naturellement à s'habituer à sa femme et finit par s’en lasser. La Torah a dit de compter sept jours afin que la femme devienne désirable comme le soir du mariage[1] (et réciproquement).

En effet, lorsque l’on vit côte à côte, en tant que mari et femme, on finit par s’habituer aux qualités de l’autre et à ne se concentrer que sur les défauts. On a des petites frictions et des sujets qui reviennent souvent au cours de nos discussions et qui finissent par prendre des proportions insurmontables. Lorsqu’on se sépare et qu’on prend du recul par rapport à l’autre, on peut enfin le voir sous une perspective positive. Tout d’un coup, les qualités prennent le pas sur les défauts et l’image qu’on avait de l’autre s’inverse totalement. Lorsqu’on a expérimenté le manque et que la chose nous est de nouveau accessible, alors cette chose prend un goût encore meilleur. On expérimente chaque année ce phénomène en goûtant une pizza après 8 jours de Pessa’h, en mangeant de la viande après Ticha’ Béav ou en écoutant de la musique après Lag Ba’omer ! N’est-ce pas qu’après une période de restriction, ces choses-là prennent une dimension extraordinaire pour nous ?

De même, dans le couple, lorsque les retrouvailles arrivent, l’amour est au rendez-vous et c’est le point d’orgue du couple juif. Mais surtout, au delà du côté purement physique, pendant douze jours d'absence, on a l’occasion de reconstruire l’estime de l’autre, tel que l’on avait lorsque l’on se trouvait sous la ‘Houppa[1] .

Aujourd’hui, la Tsara’at n’existe plus, et ces lois ne sont plus applicables en tant que telles. Néanmoins, la leçon reste éternelle. Lorsque l’on sent qu’on ne voit plus que les côtés négatifs d’un proche, alors, la meilleure solution est de prendre du recul et de se poser les bonnes questions : “Est-ce que je ne suis pas en train d'exagérer ses défauts et d’amoindrir ses qualités?”, “Si un jour, que D.ieu préserve, elle quitte ce monde, ne vais-je pas regretter les paroles que je m'apprête à dire ?”. Si on prend du recul, on en viendra naturellement à penser du bien de cette personne, et si on pense du bien on en dit du bien et on finira par ne vivre que du bien avec cette personne.
Comme le dit David Hamélèkh : “Lirot Tov Nétsor Léchonekha Méra”, ce qu'on peut lire ainsi : “De voir le bien chez l'autre, c'est ce qui nous protège de dire de la médisance”. En d'autres termes, tout commence par un regard positif. Si notre regard sur l'autre est positif, alors, forcément, nos paroles le seront aussi !

Que nous ayons le mérite de toujours apprécier le bien chez nos proches et chez tous ceux qui nous entourent.


[1] Talmud Nidda 31b