Le paradoxe du titre de cette chronique explique le destin du peuple juif parmi les nations. Quand ils sont victimes de persécutions, on a un peu pitié des Juifs : au lendemain de la Shoah, à la découverte de l’extermination de 6 millions de Juifs, l’O.N.U. ratifia rapidement l’existence d’un État juif sur la Terre d’Israël. Après la Guerre des Six Jours, l’opinion internationale blâma Israël pour ses succès stratégiques. Le Général de Gaulle, qui était loin d’être antisémite (au moins trois personnages d’origine juive ont eu de l’influence sur lui : le colonel Meyer, avant la guerre, René Casson pendant la guerre, et plus tard Michel Debré, petit-fils de rabbin) a défini les Juifs comme « un peuple d’élite sûr de lui, et dominateur ! » (en 1967).

Une caricature, parue au lendemain de cette définition, présente dans « Le Monde » un Juif, habillé de vêtements rayés de prisonniers, enfermé derrière des barbelés, dessin accompagné de la légende : « dominateur ». Telle est, à peu près, l’histoire d’Israël. Cela se répète aujourd’hui. Au lendemain du 7 Octobre, après cette invasion brutale, cruelle, de terroristes du 'Hamas, qui ont tué en quelques heures plus d'un millier de victimes, blessé plus de 2.000 et enlevé plus de 250 otages (encore détenus aujourd’hui, depuis plus de 5 semaines), immédiatement après ces crimes contre l’humanité, c’est maintenant Israël qui est blâmé, parce qu’il attaque Gaza et refuse de s’arrêter tant que les otages ne sont pas libérés. La victime, aux yeux de l’humanité, est devenue le bourreau. Israël n’a pas le droit de vaincre : s’il le fait, il suscite la réprobation mondiale, alors que ce n’est pas Israël qui a déclenché ce déroulement. Morale internationale, totalement immorale.

Et cependant, ce paradoxe reflète en tous points la conscience de l’humanité et s’inscrit dans une logique implacable : le peuple juif ne peut être compris, ou accepté dans un cadre quelconque. L’histoire d’Israël est incompatible avec l’Histoire de l’humanité.

Cela, Théodore Herzl ne l’avait pas compris, car il était persuadé que, si Israël s’inscrivait comme une nation parmi les autres nations, la haine des Juifs disparaîtrait. Assimilé à l’Occident, il croyait que les valeurs occidentales triompheraient. Ce fut son erreur ! Un philosophe allemand, Heidegger, l’avait, lui, mieux compris car il pensait que le « caractère sémite » était distinct, et inférieur au caractère humain général. Pour cette raison, il fut nazi, encouragea la solution finale afin que ce paradoxe soit éliminé de l’humanité. Ce refus de l’humanité, aujourd’hui, de permettre au peuple juif d’exister normalement fait partie de cette optique ! « Faible, oui, cela on peut l’accepter ! Fort, puissant, en aucun cas, cela dérange l’ordre humain ». Telle est la morale universelle face à Israël, et c’est ce qui se passe aujourd’hui. Ne nous étonnons pas des reproches adressés aujourd’hui à Israël. Cependant, il importe de voir d’où provient cette impossibilité d’intégrer Israël normalement parmi les nations. Le but idéal poursuivi par l’humanité – jouissance animale avec satisfaction matérielle – existe aussi dans la perspective de la Torah, c’est une évidence. La différence est que ce but, dans la perspective juive religieuse, n’est qu’un moyen pour se rapprocher de la spiritualité, de la sainteté. Le dernier verset du Chéma' qui invite le croyant à reconnaître le Créateur dans tous les domaines de la création, le dernier verset est : « Et vous serez saints ». Pour l’humanité, l’objectif est la satisfaction des sens ; pour le fidèle juif, c’est l’élévation, la reconnaissance du Créateur, à travers la création, assurément, mais en se donnant un autre idéal.

À partir de ces données, les voies sont différentes. Le Juif dérange, car il va ailleurs, alors que l’humanité reste statique. Il ne s’agit pas de dire, ici et maintenant, que cette optique justifie l’injustifiable, mais quand les voies sont opposées, elles ne peuvent que se heurter. « Que les Juifs souffrent, c’est normal pour la morale universelle, qu’ils triomphent, cela dérange et il ne faut pas le permettre ! », telle est l’explication évidente de la réaction mondiale à ce qui se passe aujourd’hui à Gaza. On l’a écrit ailleurs : « Les Juifs errent dans l’espace, pour témoigner du Créateur, alors que l’humanité se trouve dans l’espace, mais erre dans le temps pour rechercher une référence, un Auteur du créé. Israël doit témoigner de Celui qui a fait l’univers, mais l’humanité recherche, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, quoi faire pour profiter ! » Pour les non-Juifs, bon gré mal gré, l’État d’Israël, donc les Israéliens, représentent l’identité juive, et c’est cette identité qu’ils cherchent à détruire !

Notre devoir est d’être conscients et dignes de ce qu’Israël représente vraiment depuis la Révélation du Sinaï, et seulement ainsi nous rapprocherons la Guéoula.