La haftara de Tetsava est issue du livre d’Ezéchiel, un des trois grands prophètes dits « scripturaires » de la tradition juive. Notre passage évoque la vision qui lui a été offerte de la reconstruction du Troisième Temple, ses mesures, son agencement, mais aussi les modalités de son inauguration.

Cette haftara a une puissance symbolique très forte. Elle porte avec elle l’espoir millénaire du peuple juif de l’avènement messianique et de la reconstruction du Temple, que nous espérons très proche avec l’aide d’Hachem.

Liens entre la Haftara et la paracha

La haftara et la paracha de cette semaine évoquent des thématiques très proches, notamment la description des cérémonies d’inauguration du mizbeah (l’autel des sacrifices) dans le Sanctuaire pour la paracha et dans la futur Beth Hamikdach (Temple) pour la haftara. Les champs lexicaux de nos deux textes sont très proches. Ces cérémonies se déroulent selon la tradition à la même période : du 23 Adar au 1er Nissan.

L’échos de la haftara

La haftara de cette semaine peut se prêter à différents niveaux de lecture. En nous détachant du sens premier du texte, nous pouvons y trouver des enseignements éternels pour les hommes.

En effet, nos Sages nous enseignent que le Temple et l’homme ont ceci en commun qu’ils représentent tous deux un « monde » en miniature. C’est ainsi que nos Sages nous enseignent que Betsalel, le maître d’œuvre du mishkan, connaissait les « lettres avec lesquelles le Ciel et la Terre avaient été créés ». C’est précisément cette connaissance intime du monde qui l’autorisait à créer le mishkan.

Aussi, les enseignements relatifs à la construction du Temple et sa sainteté peuvent donner à l’homme lui-même, de manière allusive, des indications sur la manière de « se construire » et de développer en lui des dispositions spirituelles élevées.

Une des premières phrases de la haftara est surprenante car elle insiste sur le terme « Torat haBayit » « la loi relative au Temple » qui ouvre et ferme le verset 12, chapitre 43 : « Voici la règle relative au Temple, qui sera situé au sommet de la montagne. Tout le domaine alentour est éminemment saint. Telle est la règle relative au Temple ».

Par ailleurs, notons que le verset précédent invitait l’homme à « avoir honte de ses fautes » pour ensuite pouvoir examiner le plan précis du Temple : ses entrées, ses sorties, ses mesures…

Ces éléments amènent donc nos Sages à nous suggérer que ces versets n’évoquent pas seulement la construction du Temple, mais ils évoquent également la construction de l’homme.

Tout d’abord, « le sommet de la montagne » évoqué par Ezéchiel invite l’homme à créer dans sa vie des hiérarchies, et des priorités. L’homme peut être tenté parfois de penser pouvoir concilier plusieurs priorités : la spiritualité d’une part, sa vie professionnelle d’autre part, ses autres activités matérielles etc… Or nos Sages nous ont averti depuis longtemps qu’il n’est pas possible à l’homme de profiter pleinement des plaisirs du « olam haze » (le monde matériel), et de profiter pleinement du « olam haba » (le monde futur). L’homme doit faire des choix, fixer ses priorités, placer sur le « sommet de la montagne » un objectif, une valeur suprême qui lui servira de cap tout au long de sa vie. (Rav Rozenberg)

Cela ne signifie pas que l’homme doit s’échapper du monde, se réfugier dans une tour d’ivoire spirituelle. Bien au contraire, nous savons combien la Torah est attachée à ce que l’homme habite le monde pour le parfaire, notamment dans sa relation à ses prochains. Mais simplement, l’homme doit essayer d’avoir les idées claires sur ses priorités afin de ne pas être tentés par des projets de vie concurrents de ceux proposés par la Torah.

Pour y parvenir, le prophète nous invite à créer autour de notre vie spirituelle et matérielles des barrières protectrices à travers la référence au « domaine alentour » au Temple qui doit aussi être sanctifié. Cet environnement de sainteté que l’homme construit autour de lui, ces « zones de sécurité » (Rav  Rozenberg) grâce auxquelles l’homme se protège des dangers, lui permettent précisément de faire preuve de vigilance et de s’éloigner des fautes.

Nous comprenons également mieux le verset précédent qui invitait l’homme à avoir honte de ses fautes avant d’examiner les mesures du Temple, ses entrées, ses sorties. Nos Sages nous invitent à y voir également une allusion à la vie spirituelle de l’homme, notamment à tout ce qui « entre en lui » (par sa bouche, ses oreilles, ses yeux), mais aussi tout ce qui sort de lui (s’interdire toute médisance, raffiner son langage, élever ses prières…) (Rav Rozenberg).

Pour maintenir son ambition spirituelle, son aspiration à la sainteté, l’homme doit être en éveil permanent pour trier et filtrer ce qu’il fait entrer en lui, ou dans sa maison, mais aussi ce qui émane de lui. Notre génération mesure tout particulièrement à quel point, protéger ses yeux, son esprit, ou encore les références qui s’invitent dans nos foyers est un enjeu fondamental.

La construction de soi, tout comme l’édification d’un foyer harmonieux, requièrent un travail d’orfèvre et une vigilance de tous les instants. La sanctification du « domaine alentour » pour reprendre la belle phrase de la haftara est effectivement déterminant dans cette entreprise.

C’est ainsi que l’homme parviendra, avec l’aide d’Hachem, à être digne non seulement d’assister à la construction du Troisième Temple, mais aussi de faire de lui-même un Temple afin que D. puisse résider dans son cœur.

(La première version de ce texte avait été diffusée en 5777. Torah-Box a décidé de vous le proposer à nouveau cette année en raison de certaines références à un cours de l’année 5768 du Rav Rozenberg zatsal qui nous a quitté cette semaine. Puisse ce texte être conforme à l’enseignement du Rav, et constituer un modeste hommage face à la dette immense que nous avons à son égard. Puisse son souvenir être une source de bénédictions pour l’ensemble du ‘Am Israël. Le cours est disponible sur le site du Rav, www.ahavatorah.com)