La Paracha de la semaine poursuit la description des principes de pureté rituelle de la Torah. Elle s’attache notamment à insister sur les règles propres aux Cohanim qui ont vocation à effectuer le service du Temple. Comme toujours, plus un homme est titulaire de droits et d’honneurs particuliers, plus il a des responsabilités et des devoirs.

La législation des Cohanim n’y fait pas exception, et s’il est vrai qu’ils ont le privilège exclusif de pouvoir servir Hachem, notamment en pénétrant dans le Saint des Saints le jour de Kippour, ils doivent en contrepartie observer des règles plus exigeantes que celles du peuple en matière de préservation de leur pureté : ne pas s’approcher d’un mort (à quelques exceptions près), épouser uniquement certaines femmes etc.

Comme nous le comprenons dans notre Paracha, le Cohen incarne la « grandeur », la « sagesse » et la « majesté ». Au-delà du Cohen, une partie des commentaires et des descriptions que nous lisons dans notre Paracha a vocation de s’appliquer à tous ceux qui sont amenés, au cours de leur vie, à exercer de telles responsabilités.

Aussi, dès le début de la Paracha, Rachi écrit un commentaire qui présente les enjeux du problème. Il commente notamment la triple répétition du terme « dire » dans le premier verset : « L'Éternel dit à Moïse : dis aux pontifes, fils d'Aharon, et dis-leur : Nul ne doit se souiller par le cadavre d'un de ses concitoyens » (chap. 1, verset 1)

Dis aux pontifes : « Dis […] tu leur diras » : pour que les adultes en avertissent les enfants (Yébamot 114a).

Rachi énonce ici l’un des fondements des devoirs de l’homme dans ses relations sociales et le cœur de la notion de responsabilité. En effet, il évoque la responsabilité des adultes vis-à-vis des enfants, en l’occurrence celle qui incombe aux Cohanim de veiller à s’éloigner de toute forme d’impureté, non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour leurs enfants.

Les adultes doivent ainsi « avertir » les enfants, c’est-à-dire leur enseigner les lois pour leur éviter de fauter, et les familiariser, dès leur plus jeune âge, aux notions de sainteté et au chemin juste que l’homme doit adopter au cours de sa vie.

Mais au-delà des adultes et des enfants au sens propre du terme, cette mise en garde vaut également pour tous ceux qui disposent d’une maturité supérieure à leur prochain dans un domaine. En effet, ils ont le devoir d’éclairer ceux qui n’ont pas la même maturité et leur donner les moyens à eux aussi d’accéder à plus de lumières, à plus de sagesse, et en l’occurrence, à plus de proximité avec Hachem.

La sagesse n’est pas une prérogative que l’homme doit vivre seul. Elle doit d’une part lui permettre de s’ouvrir à ses prochains, et d’autre part lui permettre d’avoir à cœur de la leur partager pour que la lumière puisse s’étendre au plus grand nombre, et emplir progressivement la terre.

Comme nous l’avons vu la semaine dernière, l’homme ne gagne rien à vivre sa sainteté de manière solitaire et à la protéger jalousement. La sainteté est un projet collectif qui rejaillit sur chacun.

Il convient d’être attentif également au choix du verbe Emor/dire employé dans ce verset à trois reprises. En effet, il y a essentiellement deux manières de s’adresser à son prochain : à travers le verbe Emor/dire ou par le verbe Daber/parler. Le premier évoque un langage de douceur, alors que le second est plus sévère. Ici, le choix, martelé à trois reprises, s’est porté sur le verbe Emor qui donne son nom à notre Paracha.

Cela nous enseigne une règle précieuse en matière d’éducation : pour être entendu de son prochain, il faut commencer par parler la langue de la douceur, lui témoigner de l’affection, de la sollicitude. Ce rappel est d’autant plus important que notre Paracha évoque des notions très importantes, les plus importantes peut-être pour un Cohen : les notions de pureté et de sainteté. Or, pour des notions aussi importantes, l’homme peut être tenté de signifier l’exigence qui leur sied à travers un langage plus sévère et plus impératif.

Au contraire, notre Paracha vient nous rappeler qu’en matière d’éducation, seul un langage de douceur et d’affection est susceptible d’entrer véritablement dans le cœur de nos interlocuteurs, et peut les amener à évoluer dans la bonne direction.

Nos Sages nous mettent en garde notamment contre les excès de zèle, et plus particulièrement contre la colère ou la peur que l’on peut susciter chez ceux que l’on souhaite éduquer. Dans le meilleur des cas, ces comportements peuvent produire des résultats à court terme, mais ils n’offrent aucune garantie sur le maintien de la pratique et la conviction que l’on crée chez ceux à qui l’on s’adresse. Le Talmud exhorte ainsi l’homme à ne jamais « faire régner une crainte excessive dans sa maison ».

Comme nous l’enseignent nos Sages, Hachem recherche avant tout l’expression du cœur. Celui-ci se manifeste, dans ce premier verset, d’une part à travers le souci de partager la connaissance et de diffuser la sagesse auprès de nos proches, et d’autre part dans la capacité à employer un langage de douceur et d’affection.