« Jugez les membres de votre peuple avec équité. »[1]

La plupart des commandements dont nous avons discuté jusqu'ici impliquent des paroles ou des actions envers d'autres personnes, mais ils ne nous informent pas nécessairement de nos pensées. Le commandement de juger les autres rompt équitablement cette tendance - la Torah nous oblige à développer certaines attitudes à l'égard du comportement de nos semblables.

Il existe quatre catégories de base de personnes envers lesquelles il nous est commandé d'adopter des attitudes différentes.

Nous parlerons aujourd’hui de deux d’entre elles :

1. La personne décrite comme un "Tsadik" (un homme juste) : il s’agit d’une personne qui se comporte toujours de manière très morale. Si nous voyons un Tsadik commettre apparemment une action négative inhabituelle, il nous est demandé de lui donner le bénéfice du doute et de rechercher une justification à ses actions. Par exemple, Jonathan voit son rabbin orthodoxe entrer dans un restaurant non-Cachère. Jonathan sait que son rabbin est strict quant à l'observation des lois de la Torah. Jonathan doit présumer que son rabbin avait un motif valable d'entrer dans le restaurant, par exemple, il aurait peut-être eu besoin de se soulager et c'était l'endroit le plus proche pour lui. Cependant, l'obligation de juger équitablement va encore plus loin. Même si Jonathan voyait son rabbin mettre dans sa bouche une nourriture non-Cachère, il devait néanmoins tenter de trouver une justification à ses actions. Dans ce cas, l'explication la plus commune est que son rabbin a un problème de santé et doit parfois manger la première nourriture disponible, sans quoi, il pourrait se mettre en situation de danger de mort.[2]

2. La personne décrite comme un "Bénoni" (une personne normale) : il s’agit d’une personne qui s’efforce d’être une bonne personne et qui, généralement, réussit, mais qui, de temps à autre, échoue. Si elle se comporte d'une manière qui pourrait également être interprétée comme étant autorisée ou interdite, il nous est demandé de présumer qu'elle a agi d’une manière autorisée. Par exemple, si nous connaissons une personne qui fait généralement attention à ne pas parler négativement d’autres personnes (Lachone Hara’ - médisance), mais échoue parfois et que nous la voyons chuchoter à son ami des propos qui pourraient comporter des choses interdites, mais également autorisées, il nous est ordonné de lui accorder le bénéfice du doute et de présumer qu'elle avait parlé de manière permis. Cependant, si cette personne a commis une action qui penche fortement vers une interprétation négative, le spectateur n'a pas l’obligation de la juger favorablement. Cependant, s’il le fait, cela est digne de louanges.

Le concept sous-jacent à ce commandement est de voir les gens d'un point de vue juste, logique et équilibré. Le juste qui agit toujours de manière positive mérite d'être jugé favorablement même s'il semble commettre un péché, du fait qu'il est logique de croire qu'il ne s'est pas totalement écarté de son comportement habituel. De même, une personne qui agit généralement de manière positive, mais parfois non, mérite d'être jugée favorablement lorsqu'elle commet une action qui penche à la fois vers le bien et vers le mal. En effet, le plus souvent, elle agit avec justice, et il est donc logique et juste de présumer qu'il en est de même cette fois-ci. Cependant, si elle fait quelque chose qui penche fortement vers une interprétation désapprobatrice, on peut alors présumer qu'elle a agi négativement, car il est effectivement plus probable qu'elle ait agi ainsi.

 

[1] Kédochim 19,15

[2] Dans une situation où la vie d’une personne est en danger, la Torah lui impose de ne pas respecter les 613 commandements, à l’exception de trois : s’il s’agit du meurtre, du culte des idoles et des relations interdites.