Les fêtes de Tichri culminent avec la journée de Chémini Atséret. ’Hazal[1] ont également instauré la fête de Sim’hat Torah ce jour-là, lorsque nous terminons le cycle annuel de la lecture de la Torah. Les commentateurs se demandent pour quelle raison ’Hazal ont décidé de faire coïncider la fin du cycle des Parachiot avec cette fête en particulier. Pour répondre à cette interrogation, penchons-nous tout d’abord sur l’essence de Chémini Atséret.

Nos Sages proposent une analogie pour faire la différence entre Souccot et Chémini Atséret. Ils comparent Souccot à un grand festin, auquel tous les serviteurs du roi sont conviés. À la fin du banquet, le roi invite ses amis les plus intimes à un dernier repas. De la même manière, pendant Souccot, nous approchons soixante-dix vaches à Hachem, en parallèle aux soixante-dix nations, tandis qu’à Chémini Atséret, nous n’en apportons qu’une, pour le peuple juif – ceci, afin de montrer notre lien unique avec Lui.[2] En donnant Ses instructions, Hachem dit au peuple juif : « Il M’est difficile de Me séparer de vous, restez encore un jour. »[3] Chémini Atséret est donc un jour supplémentaire dédié entièrement à notre relation avec Hachem.

Rav ’Haïm Friedlander soulève une question. La raison qu’Hachem donne au jour de Chémini Astéret est Sa « difficulté » à se désunir du peuple juif. Mais en quoi la douleur de la séparation va-t-elle être amoindrie – n’est-elle pas uniquement ajournée ? Et ce jour supplémentaire ne va-t-il pas la rendre encore plus difficile ?[4]

Pour expliquer ceci, le Sifté ’Haïm ajoute une différence entre Soucot et Chémini Astéret. Il rapporte le Séfer Ha’hinoukh qui affirme que Souccot est un moment de joie naturelle, car c’est la saison où l’on engrange la récolte. Hachem désire que nous canalisions cette joie et que la rendions spirituelle. Ceci se fait par le biais des nombreuses Mitsvot de la fête, comme les Arba Minim (les quatre espèces)[5] ou le fait de résider dans la Soucca. Ces actes physiques dédiés à Hachem sont censés nous rapprocher de Lui.

En revanche, le jour de Chémini Atséret, il n’y a ni Mitsva de Arba Minim, ni Mitsva de Soucca, parce que ces « outils » ne sont pas nécessaires pour nous sentir proches d’Hachem, le lien est intrinsèque.[6] Après les deux jours de Roch Hachana, Yom Kippour et les sept jours de Souccot, l’individu est censé s’être rapproché d’Hachem au point qu’il n’a pas besoin d’éléments extérieurs pour développer et ressentir cette proximité. C'est pourquoi il n’est pas nécessaire de rajouter des Mitsvot à Chémini Atséret.

On peut à présent comprendre pourquoi le jour supplémentaire de fête soulage la douleur causée par la séparation entre Hachem et le peuple juif. Le Sifté ’Haïm explique que cette journée sans aucun outil extérieur nous montre qu’il n’y a en réalité aucune séparation. Par ce lien privilégié avec le Klal Israël, Hachem nous montre qu’il ne faut pas que les Mitsvot de Soucca ou de Arba Minim soient effectuées en permanence, pour pouvoir être proches de Lui. Nous sommes constamment liés à D.ieu et Il souhaite que nous nous rapprochions de Lui.

Il existe un « outil » indispensable pour préserver ce lien avec Hachem – c’est la Torah. Sans elle, il est impossible de construire une relation avec D.ieu. En effet, la Torah est l’intermédiaire par lequel Hachem communique avec nous, c’est grâce à elle que l’on peut savoir ce qu’Il veut de nous, comment Il voit le monde. On comprend donc pourquoi ’Hazal ont choisi de faire coïncider la fin du cycle de lecture de la Torah avec la fête de Chémini Atséret. C’est le jour qui nous prouve que nous ne sommes jamais séparés d’Hachem. Nous pouvons être liés à Lui à tout moment, à travers la Torah. Ainsi, nous exprimons notre joie de la Torah en ce jour, pur nous rappeler qu’en continuant de l’étudier, nous maintenons notre proximité avec Lui, toute l’année durant.

On peut, pour développer notre amour pour la Torah, chercher les domaines ou les manières d’étudier qui nous attirent le plus. Chacun doit étudier d’une façon qui lui plaît, afin de pouvoir investir le maximum d’efforts et en profiter au mieux.

Sim’hat Torah est le jour où l’on montre notre joie intense d’avoir la Torah. Puissions-nous développer cette allégresse et l’expérimenter tout au long de l’année.



[1] Terme communément utilisé pour décrire les Sages.

[2] Soucca 55b.

[3] Parachat Pin’has, Rachi, 29:36.

[4] Voir Sifté ’Haïm, Moadim, 1er ’Hélek, p. 334-348 pour plus de détails à ce propos.

[5] Les quatre espèces sont le Loulav, le Étrog, les Hadassim et les Aravot.

[6] Séfer Ha’hinoukh, Mitsva 324.