Le Tsadik Rabbi Arié Lévine marchait en ville en plein Chabbath, échangeant des mots de Torah avec Rabbi Moché Aharon Stern. Tout en marchant, ils remarquèrent un Juif qui ne respecte pas la Torah et les Mitsvot avancer devant eux, fumant une cigarette en plein Chabbath, que D.ieu préserve. Rabbi Arié s’approche de lui, s’adressant à lui avec affection et un grand sourire : « Gut Shabess ! Chabbath Chalom, le Chabbath, on ne fume pas… », lui dit-il en le réprimandant avec un amour infini. Mais son interlocuteur se durcit : « Laisse-moi tranquille, Chabbath ou pas Chabbath. Monsieur, je ne suis pas juif, je veux fumer maintenant… tout comme hier et demain. Je suis non-juif et je fume le Chabbath ! » dit-il sur un ton sec et glacé.

« Oh, mon cher frère bien-aimé ! Que D.ieu préserve, ne parle pas comme ça ! Tu es juif, tu es notre frère, tu es une partie de mon cœur ! » le reprit Rabbi Arié avec le même amour pour autrui qui brûlait en lui et faisait fondre tout le monde. « Regarde-toi, ton regard trahit ta judaïté, tu es un fils bien-aimé du Roi, mon frère bien-aimé. »

Soudain, le Juif se redressa, paralysé. Un court silence régna, puis il demanda à Rabbi Arié à voix basse : « Éteindre, éteindre la cigarette ? »

« Que D.ieu préserve, c’est Chabbath ! Il ne convient pas à un Juif comme toi d’éteindre des cigarettes en plein Chabbath… Pose-la et c’est tout… », lui indiqua Rabbi Arié, en posant une main chaleureuse sur son épaule. L’homme, embarrassé et les yeux humides, posa la cigarette, avec un sentiment de repentir, pendant que Rabbi Arié lui tapait sur l’épaule : « Bravo, tu es héroïque, tu es Juif. On voit que tu possèdes une vraie force mentale, » le complimenta Rabbi Arié avec une bienveillance infinie et le quitta avec amitié…

Rabbi Arié ne renonça pas à la réprimande, mais il la fit à sa manière, par des mots aimables qui font fondre le cœur. Il a ainsi réussi à le rapprocher de D.ieu et non à l’éloigner, que D.ieu préserve ! Cette histoire renferme une belle découverte : comment pouvons-nous avoir de l’influence sur les autres, les rapprocher, créer un changement en eux ? Lorsque nous sommes tentés d’émettre une critique, de reprendre autrui par des paroles sévères, d’exprimer vivement notre opposition, Rabbi Arié présente une nouvelle approche :

Au contraire, il ne faut employer que des propos aimables, de vrais compliments, des mots qui touchent le cœur et prennent racine dans l’esprit. Inutile d’employer des termes acérés, qui n’atteignent pas le but désiré. Les mots gentils sont un outil bien plus puissant, et offrent à celui qui les entend l’admiration ressentie à son égard, il accepte la critique avec le sentiment qu’elle est formulée avec empathie, amour, avec un réel souci pour son avenir !

Cette découverte est dévoilée dans l’ouvrage du Chla Hakadoch sur le verset : « Ne morigène pas le railleur, car il te haïrait ; fais des remontrances au sage, et il t'en aimera davantage. » Le Chla Hakadoch donne une indication importante à un homme qui veut réprimander son prochain et le critiquer : ne réprimande pas un homme en lui disant que c’est un « railleur » - par des termes acérés et blessants, car dans ce cas, il « te haïrait », ton but ne sera pas atteint, l’homme se renfermera et se durcira, et la critique le poussera à s’éloigner et à haïr…

Il y a lieu de « faire des remontrances au sage » : dis-lui à quel point il est intelligent, emploie des termes positifs, reprends-le avec amour et complimente-le, et tu parviendras ainsi à l’influencer « et il t’en aimera davantage. » Le meilleur moyen d’influencer l’autre, de l’élever, et même de le réprimander, consiste à employer des termes positifs, uniquement des mots gentils !

Adoptons cette formulation positive, entre nous, avec nos amis et notre famille. Disons toujours un mot gentil, lorsqu’ils le méritent, et même lorsque ce n’est pas le cas. Car même la critique, lorsqu’elle est émise sous un angle positif, construit des mondes, et un mot gentil est susceptible de faire revivre des hommes et de les construire.

Nous avons tous tant besoin d’un mot gentil, donnons-en en abondance et de tout cœur !

(portrait du Rav Arié Lévine par Haya Berkowitz)