Dans la Halakha, le jour du 15 Av ne se distingue pas par de nombreuses Halakhot. La seule coutume est de s’abstenir de réciter les Ta’hanoun. Mais dans la Michna, il apparaît que ce jour a une signification plus large.

Dans la dernière Michna du traité de Ta’anit, nous lisons : « Rabban Chimon ben Gamliel a dit : il n’y a pas eu de jours meilleurs pour le peuple juif que le 15 Av et Yom Kippour, au cours duquel les jeunes filles de Jérusalem sortent, vêtues de tenues blanches empruntées, pour ne pas faire honte à celles qui n’en possèdent pas ».

Le Talmud s’était déjà étonné du rapprochement entre ces deux jours, on peut l’entendre pour Yom Kippour, où la dimension du pardon est présente, et les deuxièmes Tables ont été données ce jour-là, indiquant le pardon du Saint béni soit-Il pour la faute du veau d’or ; mais que s’est-il passé le 15 Av pour qu’il devienne un jour de fête, l’un des plus particuliers de l’année ? De plus, d’après l’ordre énuméré par la Michna, le 15 Av précède Yom Kippour, ce qui indique qu’il est plus important que lui, pourquoi ?

Que s’est-il passé le 15 Av ?

Pour la première question - les événements du 15 Av - divers Amoraïm donnent 5 réponses différentes :

1. Le jour où les tribus ont été autorisées à se marier entre elles : A la génération du désert, les tribus avaient l’interdiction de se marier ensemble, pour éviter de transférer les héritages d’une tribu à l’autre. Plus tard, suite à l’épisode de « Pilgach Baguiva », la tribu de Binyamin a été exclue, et lorsqu’il s’est trouvé au bord de la destruction, cette excommunication a été annulée, et les tribus ont eu le droit de se marier avec eux.

2. Le jour marquant la fin des morts du désert : Après la « faute des explorateurs », chaque année, le soir du 9 Av, les Bné Israël creusaient dans les tombes et y pénétraient, et le matin, on recouvrait ceux qui étaient morts. La dernière année, lorsqu’ils se levèrent le matin, ils s’aperçurent que personne n’était mort. Ils pensèrent s’être trompés de date, et se glissèrent dans les tombes également le lendemain. Lorsqu’ils virent qu’à nouveau, personne n’était mort, ils recommencèrent les nuits suivantes, jusqu’au 15, et en voyant la pleine lune, ils comprirent que ce décret avait été annulé et qu’il n’y aurait désormais plus de morts.

3. Jour de l’annulation des barrières entre le royaume d’Israël et celui de Yéhouda : Lorsque Yéroboam fils de Nébat provoqua le schisme entre le royaume de Ré’havam et se saisit du pouvoir dans le royaume d’Israël, il fit installer un mur de séparation entre le royaume d’Israël et celui de Yéhouda, pour éviter des infiltrations d’individus vers le royaume de Yéhouda. Au bout d’une dizaine d’années, le roi d’Israël, Hocha fils d’Ela, annula ces mesures et ouvrit la voie vers le Beth Hamikdach, pour toutes les personnes intéressées.

4. Le jour où les morts de Bétar ont été inhumés : Suite à l’échec de la révolte de Bar Kokhba, le César Adrien commit un massacre parmi les habitants de Bétar. Dans sa cruauté, il n’autorisa pas les morts à être inhumés selon la Loi juive, mais s’en servit comme barrières devant ses vignes. Au bout de plusieurs années seulement, l’autorisation fut accordée de les enterrer, et malgré le temps écoulé, les corps étaient restés intacts.

5. Le jour où l’on cesse de couper des bois pour le Beth Hamikdach : A partir du 15 Av, le pouvoir du soleil se met à diminuer et le climat se refroidit à l’approche de l’hiver. Les jours commencent à se raccourcir et les nuits, à s’allonger, ce qui laisse à l’homme plus de temps chez lui pour étudier la Torah et se retrouver en famille dans son foyer.

La Michna précédente dans le même chapitre du traité de Ta’anit décrit cinq événements qui ont touché nos ancêtres le 9 Av. Les sages du Talmud trouvent cinq événements ayant eu lieu le 15 Av.

15 Av face au 9 Av

Il y a une comparaison intéressante entre ces deux jours-là.

En contrepartie du décret de ne pas entrer en Israël le 9 Av, le phénomène des morts du désert a cessé le 15 Av.

En parallèle à la destruction du Premier Temple, anéanti en raison de trois fautes majeures, à compter de ce jour-là, il est possible d’étudier plus de Torah et d’approfondir le lien entre l’homme et le Saint béni soit-Il.

En contrepartie de la destruction du second Temple en raison de la haine gratuite, les tribus ont été autorisées à se marier entre elles et le peuple juif à s’unir davantage.

En parallèle à la destruction de Bétar, les morts de cette ville ont été inhumés.

En contrepartie du labourage de la ville, et des liens coupés entre le peuple juif et Jérusalem, les barricades ont été annulées entre le royaume d’Israël et Jérusalem, et toute personne désirant servir D.ieu en avait désormais le droit.

Le 15 Av et Yom Kippour

Il ressort de là que le jour du 15 Av constitue une Kapara, une expiation des fautes et des malheurs survenus le 9 Av. On comprend dès lors pourquoi Raban Chimon ben Gamliel l’a placé sur le même plan que Yom Kippour. Alors que Yom Kippour est un jour de pardon pour les fautes individuelles du peuple d’Israël, le 15 Av est le jour de pardon des fautes nationales du peuple juif. C’est pourquoi Rabbi Chimon ben Gamliel a mentionné le 15 Av avant Yom Kippour.

Le sentiment de ce jour est identique : à l’instar du sentiment d’expiation personnelle ressenti le jour de Yom Kippour, les jeunes filles sortaient dans la nature, entre les vignes, et les jeunes hommes s’y rendaient pour espérer construire une famille, et ce sentiment se ressentait également le jour du 15 Av.

Et la Michna de conclure : « "Sortez et admirez, filles de Tsion, le Roi Chlomo dans sa splendeur, orné de la couronne dont le ceignit sa mère, au jour de son hyménée, au jour de la joie de son cœur." L’hyménée, c’est le jour du Don de la Torah. Et la joie de son cœur, c’est la construction du Beth Hamikdach, qu’il soit reconstruit bientôt et de nos jours. Amen. »