J’ai achevé l’article de la semaine dernière sur les Chidoukhim en recommandant que les célibataires soient plus réalistes et apprennent à passer à la suite. De trop nombreux célibataires, avais-je remarqué, ne peuvent admettre cette réalité : bien qu’ils désirent se marier, ils insistent pour vivre dans le passé, en s’attachant à des visions désormais irréalistes et refusent d’aller de l’avant.

Ce concept de passer à autre chose pour les Chidoukhim a une source dans la Torah. La première personne chargée d’assumer le rôle d’entremetteur a été Eliézer, le fidèle serviteur de notre patriarche Avraham. Eliézer a pour mission de trouver un Chidoukh pour Its’hak. Avraham lui décrit spécifiquement les qualités requises de la future fiancée.

Miraculeusement, Eliézer trouve la jeune fille parfaite. Non seulement correspond-elle aux attentes d’Avraham, mais elle les dépasse même. Malgré tout, lorsqu’Eliézer propose le Chidoukh à la famille de Rivka, il leur déclare : « Dites-moi oui ou non, pour que je sache si je dois poursuivre à droite ou à gauche » (Genèse 24 :49).

C’est une leçon que la population des célibataires doit prendre à cœur. Oui, nous reconnaissons que vous avez en tête la vision d’un Chidoukh parfait, mais si cela ne fonctionne pas, inspirez-vous d’Eliézer et passez à la suite. Ne stagnez pas.

Lorsque mes propres enfants étaient en âge de commencer les Chidoukhim, à la recherche de leur âme sœur, mon saint père, le Rav et Gaon Avraham Halévi Jungreis zatsal, me recommanda de veiller à ne pas implorer Hachem pour un Chidoukh spécifique, quelles que soient les qualités de la personne envisagée.

« Personne ne sait, déclarait mon père, si c’est le "bon" ou non. C’est strictement entre les mains d’Hachem. » Alors, lorsque mes enfants rencontraient des candidats en vue du mariage, la Brakha de mon père était celle-ci : « G-tt zol feeren auf gittens – Que D.ieu te guide vers celui/celle qui sera bien pour toi. »

Donc, la première nécessité pour trouver « la bonne personne » est d’adresser une prière fervente à D.ieu, en particulier à Min’ha - la prière de l’après-midi -, car c’est après la prière de Min’ha que notre ancêtre Its’hak a rencontré Rivka Iménou.

Au fil des ans, grâce à D.ieu, j’ai organisé des rencontres pour des individus issus de tous les horizons, et j’ai gardé à l’esprit les propos de mon père. Dans notre société, cependant, lorsqu’il est question de Chidoukh, les gens se reposent sur deux termes importants : « la chimie » et « l’électricité ». Nous choisissons d’oublier que, même à New York, la ville la plus puissante au monde, une panne d’électricité peut survenir.

Quant à la chimie, il peut arriver un moment où la formule perd de sa magie et le mariage se désintègre. Malheureusement, notre société idéalise un mode de vie vide et dénué de sens, sans aucune substance. Pour l’illustrer, je voudrais vous raconter un incident qui a eu lieu il y a quelques années lors d’un cours de Torah que je donnais à Hinéni. J’ai raconté cette histoire plusieurs fois, car elle est tout autant pertinente aujourd’hui qu’hier et mérite d’être répétée, et les priorités illustrées dans cette histoire sont les fondations d’un bon mariage et ne doivent jamais faire l’objet d’un compromis.

Une jeune femme m’aborda à la fin de mon cours. C’était une personnalité de la télévision, une très jolie femme. « Je suis juive, m’annonça-t-elle en guise de présentation. Au fil des ans, j’ai eu de nombreuses relations, mais désormais, je suis prête à me marier et à avoir des enfants. J’ai cru comprendre que vous connaissiez de nombreux candidats de qualité, alors j’ai pensé vous consulter. »

Lorsque je la mis au défi d’expliquer exactement ce qu’elle entendait par « qualité », elle énuméra cinq must sur lesquels elle ne souhaitait pas faire de compromis.

1. Un physique attirant : « L’allure est importante, m’expliqua-t-elle. Il faut une certaine alchimie. »

2. L’intelligence: « Quelqu’un de bien éduqué, mais qui a aussi une "expérience de la rue". »

3. La richesse : « Il doit me soutenir dans mon mode de vie auquel je me suis habituée. A ce stade, je ne peux plus revenir en arrière. »

4. Une super personnalité et un bon sens de l’humour: « Je n’ai pas la patience pour les lunatiques. Je cherche un homme drôle, avec lequel je peux rire de bon cœur. »

5. Un homme athlétique : « J’aime le tennis. »

« Bonne chance, lui répondis-je. Il faudrait cinq types différents en un. Mais surtout, vos cinq must sont un assemblage de zéros, et ne se résument à rien de conséquent. »

« Pourquoi ? », me demanda-t-elle.

« C’est simple - les zéros ne s’additionnent pas les uns aux autres, à moins d’avoir un chiffre devant. »

Elle me lança un regard étrange, alors je répétais : « Cinq zéros sans chiffre devant, c’est ce qu’on appelle en yiddish Gurnisht mit Gurnisht - rien avec rien. »

« Je ne pense pas être obtuse, mais je ne vois toujours pas où vous voulez en venir. A quel chiffre vous référez-vous, Rabbanite ? »

« Un chiffre de la Torah. La première lettre de la Torah est le Beth, et la dernière lettre est Lamed. Ces deux lettres forment ensemble le terme de Lev, le cœur. S’il n’a pas bon cœur, son physique attirant peut devenir repoussant en une soirée, son esprit tranchant et son humour seront employés pour vous dénigrer, sa fortune pourra vous contrôler et vous manipuler, et sa « super personnalité » vous éclipsera et vous suffoquera. Quant au tennis, vous pouvez toujours lui trouver un entraîneur. Mais comment l’initier à avoir un bon cœur ? »

« Je n’ai jamais pensé de cette façon, m’avoua-t-elle. Alors comment fait-on pour acquérir un bon cœur ? »

« Trouver une personne possédant un bon cœur n’est pas une mince affaire. Nous voudrions penser qu’au fond, nous sommes tous bons, possédant quelques défauts ici et là, mais en réalité, nous ne sommes pas si bons et nous devons apprendre la bonté. Comme il est dit dans Bérechit : "Le cœur de l’homme est pervers depuis son enfance".

Depuis notre naissance, nous ne voyons que nos propres besoins et nous devons apprendre à être sensibles aux préoccupations des autres. Cet entraînement doit commencer à un âge tendre. Déjà jeunes, les enfants doivent être conditionnés à donner, à être patients, à faire preuve de considération et de gentillesse. Même de simples mots comme « merci » et « s’il vous plaît » ne doivent pas être considérés comme allant de soi - la preuve en est son absence dans le vocabulaire de si nombreux adultes.

Malheureusement, dans de nombreux foyers, ces valeurs ne sont jamais inculquées. Souvent, les parents considèrent une conduite répréhensible comme "mignonne" ou passagère. Certains parents n’ont aucune idée de ce que constitue un "bon cœur" ; ils élèvent leurs enfants sans leur enseigner les disciplines qui cultivent la bonté. C’est la raison pour laquelle nous trouvons tant d’adultes odieux. »

« Mais ne peut-on acquérir ces disciplines à un moment ultérieur dans l’existence? », me demanda-t-elle.

« Bien entendu, vous le pouvez, lui assurai-je, mais il est très difficile de se défaire de traits de caractère bien ancrés. Et pour un conjoint, il est quasiment impossible de se corriger. Personne ne doit se marier dans l’espoir de changer l’autre. Le mieux que nous pouvons faire, c’est nous changer nous-mêmes. »

La seule qualité indispensable, sur laquelle on ne doit pas faire de compromis, est de trouver un conjoint possédant un bon cœur ; si cela vient à manquer, l’ensemble s’effondrera.

A suivre…