Dans la Guémara Méguila, il est question d’une liste de sept prophétesses : Sarah, Myriam, Déborah, ‘Hanna, Avigayil, ‘Houlda, et Esther. C’est plutôt impressionnant de découvrir que, dans notre peuple, il y a eu sept femmes qui ont accédé à la prophétie.

En nous intéressant aujourd'hui plus particulièrement  à 'Hanna, nous pouvons réfléchir sur le niveau particulièrement élevé de sa prière, tant pour ce qui est des termes qu’elle emploie, que pour la ferveur qui l’anime.

‘Hanna n’est pas seulement prophétesse, elle est femme. En tant que femme, elle aspire à devenir mère, à mettre au monde un enfant ; or, pendant très longtemps, elle se voit privée de ce bonheur.

Sa prière, dans son aspiration à devenir mère, comporte des accents prophétiques. Dans la Guémara Brakhot, nous apprenons comment ‘Hanna a formulé sa prière. Elle a dit à Hakadoch Baroukh Hou : « De toutes les armées que Tu as créées dans Ton monde, ne peux-Tu pas m’accorder un fils ? »

Dans la Haftara du premier jour de Roch Hachana, 'Hanna donne à Hachem le titre de Hachem Tsévaot (D.ieu des armées)[1]. La Guémara nous précise que, depuis la création du monde jusqu’à cette prière de ‘Hanna, personne n’avait jamais honoré Hachem en Lui décernant ce titre de « D.ieu des armées ».

Le Midrach (Pessikta Rabati) nous détaille encore davantage l’insistance de ‘Hanna, disant dans sa prière : « Maître du monde, il y a une armée au ciel, et une armée sur terre. Je me demande au juste à laquelle des deux j’appartiens. Si je faisais partie de Ton armée céleste, je ne devrais ni manger, ni boire, ni enfanter, ni mourir. Je devrais vivre éternellement. Et si j’appartiens à l’armée qui est sur terre, je devrais non seulement manger et boire, mais aussi enfanter. » Hachem l’a exaucé en lui disant : « Puisque tu as évoqué la grandeur de Mes armées, Je proclame à Mon tour la grandeur de tes armées, celle de ta descendance. »

‘Hanna est prophétesse, et elle est femme. L’objet de sa requête est celui d’une femme : mettre au monde un enfant. Mais d’abord, ‘Hanna approfondit la notion de l’infinie grandeur d’Hachem, découvrant dans le Créateur du ciel et de la terre Celui qui mérite d’être appelé Hachem des armées d’en-haut (anges) et d’en-bas (le monde humain). C’est cette démarche initiale qui a eu pour effet qu’elle fut exaucée.

Dans les lois de la ‘Amida, nous trouvons que c’est de la prière de ‘Hanna que nous apprenons qu’il faut prononcer les mots et ne pas donner de la voix, comme elle l’a fait elle-même. Les hommes et les femmes apprennent comment prier par l’exemple que donne une femme, ‘Hanna.

En plus de cela, les deux citations des paroles de nos Sages nous permettent aussi de comprendre un autre aspect de notre démarche lorsque nous prions. Généralement, nous trouvons normal de nous étendre dans nos paroles de prières, et surtout dans notre ferveur, sur ce que nous sollicitons d’Hachem. Or, par ces deux textes de nos Sages, nous pouvons réaliser que, lorsque nous prions, lorsque nous demandons quelque chose à Hachem, nous ne devons pas entièrement centrer notre pensée sur ce que nous demandons ; nous devons plutôt axer notre pensée et nous étendre abondamment sur une réflexion concernant la Grandeur et la Bonté d’Hachem, et plus brièvement exprimer notre demande.

Le Midrach Chmouel dit que ‘Hanna avait attendu très longtemps avant d’être exaucée, puisqu’elle était âgée de cent-trente ans lorsqu’elle a mis au monde son fils Chmouel. Logiquement, elle aurait pu, par désespoir, se résigner à rester sans enfant lorsqu’elle a constaté qu’elle avait déjà largement dépassé l’âge où les femmes enfantent. Mais sa foi, sa confiance en Hachem étaient telles qu’il lui était évident qu’Hachem pouvait lui faire un miracle. Prophétesse, sa vision des possibilités de miracles était plus concrète, et d'autant plus constructive, que celle d’autres personnes.

En général, une femme qui désire devenir mère envisage le plaisir qu’elle aura à voir grandir un être qui s’est formé dans son corps, comme une partie d’elle-même. À ce niveau, lorsque l’enfant, en grandissant, doit s’écarter de sa mère, il passe des heures entières au jardin d’enfants, plus tard au ‘Hédèr, puis à la Yéchiva, chaque étape de ces éloignements pèse à la maman. Mais chez ‘Hanna, nous apprenons un comportement inverse. ‘Hanna donne son fils au Beth Hamikdach. Dès qu’il est sevré, il est au service du Kohen Gadol, Eli. Ce rôle auquel ‘Hanna l’a destiné fait son bonheur. Car son fils, elle ne l’a pas voulu par égoïsme ; elle l’a voulu pour le donner à Hachem.

À notre tour, sachons être heureuses d’être les glorieuses mamans d'enfants qui étudient la Torah d’Hachem au ‘Héder, à la Yéchiva, puis au Kollel. Alors, notre comportement sera véritablement digne de notre qualité de mamans juives.

‘Hanna est également merveilleuse dans la manière dont elle exprime sa gratitude envers Hachem pour le miracle qu’Il lui a offert. C’est un hymne exalté qui s’étend sur les dix premiers versets du deuxième chapitre de Chmouel Alef, et qui fait aussi partie de cette Haftara du premier jour de Roch Hachana.

Savoir remercier, voilà encore une leçon précieuse que nous pouvons apprendre de cette personnalité admirable qu’était ‘Hanna.


[1] Chmouel Aleph (1,3)