Le calendrier juif regorge de fêtes aussi magnifiques et profondes les unes que les autres. Pessa’h, le symbole de la liberté, Roch Hachana, le jour du jugement, ‘Hanouka, la fête des lumières, Souccot, le moment où nous nous détachons de tout confort matériel, Pourim et son message de renversement de situation, où tout devient possible, et évidemment, la journée de Yom Kippour, journée de recueillement, de pleurs, de supplications, pour arriver, en fin de journée, à l’expiation de nos fautes. Chaque fête véhicule un message fort, chaque fête raconte notre histoire.

Yom Kippour représente, sans aucun doute, la fête respectée de tous les Juifs, du plus orthodoxe au plus laïc, du plus jeune au plus vieux. Qui renoncerait à une journée où tous les compteurs sont remis à zéro, une journée de miséricorde, de seconde chance, une journée où l’on peut tout simplement se rapprocher de notre essence et de Celui qui nous a créés ?

Étonnamment, le Talmud relie à cette journée unique une autre journée dont la plupart des personnes ne connaissent même pas l’existence, sans parler de sa signification : Tou Béav.

Au mieux, pour ceux qui ont entendu parler de cette journée, ils l’associent à la « Saint-Valentin » des Juifs, la fête des amoureux.

Tou Béav est tellement plus, Tou Béav est tellement merveilleuse, qu’il n’est pas étonnant qu’elle soit mise sur le même piédestal que Yom Kippour, en matière de spiritualité.

Le Talmud écrit « les filles sortiraient parées de vêtements de lin empruntés et danseraient dans les vignobles… et quiconque n’avait pas d’épouse, viendrait en choisir une là-bas ». (Talmud, Ta’anit 31a)

Cette journée était consacrée à la quête de l’âme sœur. Loin de toutes ces fausses valeurs véhiculées par la société où l’apparence prime sur l’intériorité, loin de cette obsession à tout miser sur le paraître, loin de ces unions de magazine qui font rêver les personnes banales par un étalage de beauté, Tou Béav était une journée animée par l’authenticité. Personne ne faisait semblant, personne ne voulait impressionner, les vêtements que les filles portaient étaient non seulement simples, mais elles devaient les emprunter, de façon à ne faire prévaloir aucune fille par rapport à une autre, de façon à ne pas donner plus de chance à une fille qui détenait des possessions, par rapport à une autre fille plus simple. Il s’agissait de trouver sa moitié, son futur conjoint, avec une profonde honnêteté, et ainsi, ces futures unions seraient vraies et solides.

Lorsque nous y réfléchissons, le judaïsme nous demande de servir le ciel, et les sphères hautement spirituelles, tout en gardant les pieds sur terre. Hachem veut de nous que nous profitions des plaisirs de ce monde, tout en gardant une juste mesure. Nous ne sommes ni une religion de privation ni une religion d’anarchie où il n’existe aucune limite.

Le mariage juif respecte également cet esprit. Deux personnes qui paraissent être différentes en tous points, vont s’unir afin de fonder une famille, dans la joie et le respect d’autrui, dans le but unique de servir D.ieu.

Tou Béav véhiculait un message magnifique et tellement terre à terre. Il régnait une ambiance de bonheur et de sainteté profonde dans ces champs, lorsque les jeunes hommes venaient à la rencontre des jeunes filles. Ils devaient choisir leurs futures épouses sans être aveuglés et trompés par de beaux habits ou de belles parures. L’atmosphère était pure et transparente de tous ces filtres qui nous empêchent de voir comme on devrait voir. Un amour sain voyait le jour de façon évidente et harmonieuse.

Ainsi, nous comprenons mieux le parallèle entre Yom Kippour et Tou Béav. Ce sont deux journées où nous abandonnons nos besoins corporels, nos priorités physiques, deux journées où nous nous adonnons corps et âme à notre service spirituel. Aussi dur soit-il de ne pas manger ni boire durant 24 heures, imaginez la force et surtout l’abnégation dont il faut faire preuve pour ne pas s’apprêter et se faire jolie, alors que nous allons à la rencontre de l’homme de notre vie. Tellement contre-nature pour une femme.

Tou Béav est un magnifique symbole de Émouna (foi en D.ieu). Peu importe ce à quoi je ressemble, je ne crains pas le fait qu’une autre fille me « vole » ma moitié. Je fais ce que j’ai à faire le cœur léger, et Hachem guidera mes pas et mon cœur vers ceux de mon futur époux, et ceux de mon futur époux vers moi.

Il est temps que nous redonnions à Tou Béav la place d’honneur qu’elle mérite. Cette journée est évidemment l’occasion d’accroître notre amour conjugal, mais pas seulement. Cette journée est le moment propice pour retirer le bandeau que nous avons sur les yeux toute l’année et regarder le monde et ses créatures tels qu’ils sont vraiment, un monde parfait créé avec tant de sagesse, des enfants débordant d’énergie qui nous procurent tant de joie et un but sur terre malgré le bruit et le désordre, un mari aimant et travailleur même si ça implique beaucoup d’absences, une maison qui nous permet de se sentir en sécurité, même si elle n’est pas aussi grande qu’on l’aurait espérée.

Ne laissons plus la société penser à notre place et nous dicter ce dont nous avons besoin pour être heureux. Retirons toutes ces couches superficielles de nos vies et permettons aux vraies valeurs intérieures de rayonner dans nos foyers.