La vérité de la Torah n’a pas à être démontrée. Reçue depuis plus de 3 millénaires au mont Sinaï, elle est, pour le peuple juif, la référence absolue, pour sa partie écrite, les 24 livres de la Torah, et pour son écho rabbinique, la Torah orale, le Talmud, qui éclaire, par l’intermédiaire des Sages, les textes écrits. Cette affirmation est la foi du peuple d’Israël, et c’est autour de cette définition que s’est maintenu le peuple, malgré les exils, les persécutions et les séductions étrangères. La croyance, incontournable, en une Autorité Transcendante, qui S’est révélée à Moché Rabbénou et aux prophètes d’Israël, a uni, à travers les siècles, les générations du peuple à travers l’étude du Talmud, grâce à la fidélité à l’observance.

Chaque époque a suscité aussi des antagonismes : ce furent les Saducéens à l’époque talmudique, Philon à l’époque alexandrine ; plus tard, le spinozisme est apparu comme un refus de la foi en une transcendance indépendante. Mais c’est surtout à l’époque des « Lumières », le 18ème siècle, avec l’apparition de la Haskala, en Allemagne essentiellement, que la critique s’est affirmée contre le judaïsme traditionnel. La Réforme, au 19ème siècle, puis le mouvement libéral, ont voulu créer un autre judaïsme, libéré de la tradition rabbinique. En Amérique, en Europe, la Réforme veut présenter un judaïsme éthéré, non lié à l’observance.

À Paris, actuellement, après la synagogue de la rue Copernic, dans le 16ème arrondissement, une synagogue libérale, à Beaugrenelle, attire l'attention médiatique, et une femme qui a étudié à New York pour faire des études religieuses dirige cette synagogue. Elle a pris le titre de « rabbin » et elle réussit à attirer du monde ainsi que le regard des médias pour un « pseudo-judaïsme ». Elle a un succès médiatique pour deux raisons : elle est moderne, sa façon de présenter le judaïsme plaît, parce qu’elle sait faire ce qui convient à un public qui s’intéresse au judaïsme, mais qui ne veut pas être contraint par l’observance. La deuxième raison est précisément que le judaïsme qu’elle offre est un FAUX judaïsme, falsifié. Ce n’est pas le judaïsme authentique transmis par les générations précédentes, mais un judaïsme modifié pour plaire au public. Un grand journal hebdomadaire, L’Express, la présente en face du Grand Rabbin de France, le Rabbin Korsia, qui est évidemment le porte-parole du judaïsme traditionnel orthodoxe (L’Express n° 3744 – Avril 2023). Cette confrontation mérite l’attention du public, car elle oppose clairement le TRADITIONNEL face à une apparence extérieure, traduite par l’homme, par la créature. Le judaïsme traditionnel n’est pas conservateur, il n’est ni moderne ni périmé. Il est éternel, car il porte le sceau de l’Éternel. Le Professeur Neher qui fut, il y a une trentaine d’années, Professeur à l’Université de la Bible, disait que le judaïsme libéral n’aime dans le judaïsme que ce qui plaît, dans la Torah, aux non-juifs (dans son livre sur « Moïse » paru en 1955). Le Grand Rabbin Korsia traduit, bien sûr, cette ligne de pensée.

Un autre aspect de la question mérite ici d’être souligné : si le judaïsme libéral a un tel succès aujourd’hui, c’est parce que le public ressent un vide idéologique, et cherche sur qui et sur quoi s’appuyer. On lui propose une solution assez facile, qui ne l’oblige à rien, qui ne le dérange pas trop dans son quotidien. Alors, assoiffé d’idéologie, il se rattache à une vision nébuleuse de la réalité. Le besoin de religiosité est clair. Alors, on s’attache à ce qui nous paraît un peu lié au passé (on est juif, après tout !) mais nous permet d’être malgré tout libre de nos actions. Cette modernisation reflète un besoin de notre époque, qui veut cependant une certaine attache au passé. C’est ici la raison du succès médiatique, lié à une personnalité qui sait parler à un public friand de spiritualité ! Mais, nous, tenants du judaïsme traditionnel, nous savons bien que ces propos (des réformés) s’inscrivent dans la série des opposants, périodiques, à la Torah. Cela a commencé avec Korah, Datan et Aviram, et a continué à chaque époque. Cela est peut-être nécessaire pour que l’on puisse voir plus clairement où se situe le « vrai » et où s’affirme le faux. La parole est donnée à l’Histoire ! Le Grand Rabbin Korsia, avec ménagement, mais avec fermeté, sait qu’il parle au nom d’une tradition qui nous dépasse, car la Torah divine est l’apport de la Transcendance qui, seule, peut répondre aux problèmes de l’époque. L’auteur de l’article, qui confronte les deux personnages, s’interroge à la fin de son article sur la possibilité de concilier le « traditionnel » et le « moderne ». « Repli religieux » ou « image moderne », demande-t-il, en concluant « Futur impossible ? ». Telle est notre réponse : à chaque époque, le judaïsme a connu une opposition interne, mais n’a pas développé un « repli religieux ». Il conclut « Futur impossible ? ». Pour nous, qui continuons la chaîne depuis le Sinaï, le futur n’est pas impossible, car la Torah nous a protégés, nous protégera, et prépare l’avenir messianique.