Dans la Paracha de cette semaine, la Torah affirme : «Car cette Mitsva que Je t’ordonne aujourd’hui ne t’est pas cachée et n’est pas lointaine. Elle n’est pas dans les cieux pour dire : "Qui montera au ciel pour nous et la prendra pour nous et nous la fera entendre, afin que nous l’accomplissions ?" Et elle n’est pas non plus de l’autre côté de la mer pour dire : "Qui passera de l’autre côté de la mer pour nous et la prendra pour nous, et nous la fera entendre, afin que nous l’accomplissions ?" »[1]

Il y a un grand débat sur le mot « Mitsva ». Rachi explique qu’il fait allusion à toute la Torah. Cependant, le Ramban et le Sforno expliquent qu’il s’agit de la Mitsva de Téchouva. Le Natsiv[2] pense que cela fait référence à la Téchouva, mais plus particulièrement à la Téchouva faite par amour — qui est d'un niveau beaucoup plus élevé que le repentir par la peur. Ainsi, selon lui, la Torah affirme que la Téchouva par amour serait facilement accessible.

Le repentir par amour semble être très difficile, comment peut-on nous garantir qu’il peut être effectué avec facilité ? Une autre question peut être soulevée : on ne peut aimer une personne que si l’on apprend à la connaître. Les gens s’apprécient et se comprennent et, de ce fait, se sentent attachés, étroitement liés. Or, on ne peut pas vraiment connaître Hachem ; il est impossible de réellement Le saisir. Alors, comment espérer L’aimer et revenir vers Lui « par amour » ? Et, là aussi, pourquoi est-ce si facile ?

Le Natziv répond en se référant au principe Kabbalistique qu’Israël et le Saint, béni soit-Il, ne font qu’un. Cela signifie qu’un Juif et Hachem sont intrinsèquement liés, même sans aucune connaissance réelle. Prenons l’exemple d’un parent avec son enfant : un parent peut aimer un enfant même s’il ne le connaît pas et même s’il ne le voit jamais. La première fois qu’ils se rencontrent, ils seront immédiatement attirés l’un vers l’autre. Le lien naturel entre le parent et l’enfant comble tout fossé qui pourrait exister.

Rav Issakhar Frand raconte l’histoire suivante, qui illustre bien cette idée.

Ce n’est que quand elle eut 49 ans, que l’on annonça à une dame de Californie, qu’elle avait été adoptée et qu’à l’origine, elle venait d’Israël. Cette femme avait toujours remarqué qu’elle semblait différente de ses parents. Elle se doutait bien qu’ils n’étaient pas ses parents naturels. Elle commença donc à faire des recherches sur son passé. À peu près au même moment, un journaliste israélien écrivit un article sur le scandale impliquant les Juifs marocains arrivés en Israël au début des années 1950. De nombreuses femmes marocaines, qui ne parlaient pas bien la langue et n’avaient ni famille, ni connaissances dans le pays, apprirent que leurs enfants étaient morts pendant l’accouchement. En réalité, ces enfants avaient été volés et vendus pour adoption, tantôt en Israël et tantôt à l’étranger. La femme adoptée de Californie voyagea en Israël et y rencontra le journaliste en question. Ils consultèrent certains documents et se rendirent à l’hôpital où elle était née. Des tests ADN lui permirent de retrouver sa mère marocaine — à qui l’on avait dit que son bébé était mort peu de temps après l’accouchement, 49 ans plus tôt.

Comme l’explique Rav Frand, il s’agissait de deux femmes issues de cultures complètement différentes. Elles n’avaient eu aucun lien pendant près d’un demi-siècle, ce qui signifie pendant toute l’existence de la fille ! Et pourtant, quand elles se rencontrèrent pour la première fois, elles tombèrent dans les bras l’une de l’autre, s’embrassèrent et pleurèrent de manière incontrôlable. La mère ne connaissait pas la fille et la fille ne connaissait pas la mère. Aucune d’entre elles ne comprenait la langue de l’autre et elles ne pouvaient communiquer que par leurs larmes, leurs baisers et leurs câlins. Pourquoi ont-elles réagi de cette façon ? Tout simplement, parce que c’était une mère et sa fille.

C’est ce que dit le Natsiv. Quand un père et son fils se rencontrent — même s’ils ne se sont jamais vus —, ils sont attirés l’un vers l’autre presque immédiatement, et cela se fait naturellement.

Le Natsiv parle de la façon dont chaque Juif se lie davantage à Hachem par le biais de la Torah. Il semble que de la même façon qu’il existe un lien intrinsèque entre le Juif et Hachem, il en va de même entre un Juif et la Torah, qui est le moyen de se connecter à Hachem. Ceci est confirmé par la célèbre Guémara qui affirme qu’un fœtus apprend toute la Torah dans l’utérus, et avant sa naissance, un ange le frappe au-dessus de la lèvre et lui fait oublier la Torah. Toutefois, celle-ci ne quitte pas la personne, elle s’incruste au plus profond d’elle-même. Le travail de l’homme, tout au long de sa vie, est d’apprendre la Torah par un travail acharné et assidu, mais le lien avec la Torah qu’il étudie est naturellement présent, parce qu’elle est ancrée au plus profond de son âme. Rav Noa’h Weinberg avait l’habitude d’expliquer, sur la base de cette Guémara, que chaque Juif est profondément convaincu de la véracité de la Torah, donc quand il entendra la vérité, il s’y liera automatiquement, même s’il a été éduqué selon des valeurs qui contredisent la Torah.

Ainsi, la Téchouva et la Torah sont toutes deux « facilement » atteintes en raison du lien intrinsèque entre chaque Juif, Hachem et Sa Torah. Notre travail, en cette période de l’année, est d’essayer de puiser dans cette connexion naturelle, de rechercher ce qui nécessite un nettoyage spirituel qui bloquerait ce lien, mais qui ne le coupera jamais totalement.

Puissions-nous tous mériter de nous rapprocher d’Hachem et de Sa Torah. 

 

[1] Dévarim 30,11-13.

[2] Emek Davar, Ibid. Cité par Rav Issakhar Frand.