Il n'est pas né au sein de la 'Hassidout Breslev et pourtant, il a contribué à rapprocher des milliers de Juifs de cette grande communauté fondée par Rabbi Na'hman. À quelques jours de Roch Hachana et du célèbre pèlerinage d'Ouman sur la tombe de l'arrière-petit-fils du Ba'al Chem-Tov, qui attire toujours plus d'Israéliens issus de toutes les franges de la société, le rav Chalom Arouch, a accepté de répondre aux questions du journal Hamodia.

Le rav qui préside les institutions 'Hout Chel 'Hessed, (fil de bonté) a insisté sur l'importance de passer Roch Hachana à Ouman, sur la notion de Téchouva, sur la prière mais aussi sur la nécessité de rapprocher les différentes composantes au sein du peuple juif...


Rav Arouch, nous sommes à quelques jours de Roch Hachana. Quelle importance le voyage à Ouman revêt-il pour la 'Hassidout Breslev ?

Roch Hachana, à Ouman, revêt une importance pour l'ensemble du peuple d'Israël, pas seulement pour les 'Hassidim de Breslev. Lorsque Rabbi Na'hman était encore de ce monde, il disait à ses élèves qu'un jour viendrait où il n'y aurait presque plus de 'Hassidim de Breslev. Et en effet, lorsque j'ai fait Téchouva, les élèves de Rabbénou (notre maître, c'est ainsi que les 'Hassidim de Breslev parlent de Rabbi Na'hman. ndlr) étaient très rares.

Mais, ajoutait Rabbénou, un jour viendra, juste avant la venue du Machia'h, où tout le monde voudra s'approcher de moi. Sa prophétie s'est réalisée. Chaque année, nous sommes de plus en plus nombreux à participer au ''Kibboutz'', à la réunion de dizaines de milliers de Juifs à Ouman. J'étais encore il y a quelques jours chez Rabbi David Abou'hatsira, à Nahariya. Il m'a affirmé qu'alors que 40 000 Israéliens se rendraient cette année sur le tombeau de Rabbénou, ils étaient au moins 200 000 à vouloir le faire.


Pour quelle raison Rabbi Na'hman était-il si attaché à Roch Hachana ?

Pour Rabbénou, Roch Hachana était le cœur de l'année, son épicentre, à tel point qu'on a parfois l'impression que pour lui, le reste de l'année n'est qu'un ''pont'' entre deux Roch Hachana. Il l'a d'ailleurs affirmé très clairement dans un de ses enseignements lorsqu'il a déclaré avoir reçu Roch Hachana en cadeau d'Hachem. Rabbénou a promis que toute personne qui se rendrait sur sa tombe la veille de Roch Hachana, y réciterait le Tikoun Haklali (corpus de 10 psaumes. ndlr) et donnerait une pièce pour la Tsédaka, alors ''peu importe la gravité des péchés de cette personne, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour la sauver, même si je dois parcourir la totalité de la Création, dans toute sa largueur et dans toute sa longueur. Je nettoierai cette personne et je la protègerai.…S'il le faut, je la tirerai par ses Péot et je la ferai sortir du Guéhinom (l'enfer).''

Roch Hachana, comme son nom l'indique, est la ''tête'' de l'année. Et lorsque la tête est saine, alors tout le corps est sain. Le Rambam lui-même nous enseigne qu'un homme qui a transgressé la Torah durant toute sa vie mais a fait Téchouva même un jour avant Roch Hachana voit toutes ses fautes effacées. Je crois qu'une personne qui n'est jamais venue à Ouman pour Roch Hachana ne comprendra pas ce que je veux dire mais tous ceux qui ont vécu cette expérience vous affirmeront haut et fort : Ouman est une véritable usine de Téchouva !

Mais justement, est-ce que cette Téchouva n'est pas uniquement fondée sur le Réguech, sur le ressenti, sur l'émotion ? Est-ce que son effet se poursuit après avoir quitté l'Ukraine ou bien s'estompe-t-il dès que le quotidien reprend le dessus ?

Vous avez tout à fait raison ! Obtenir un visa pour l'année prochaine ne suffit pas, encore faut-il prendre la décision de voyager ! Certaines personnes considèrent le voyage à Ouman comme une Ségoula, une espèce de formule magique qui leur assurera la bénédiction d'Hachem sans qu'elles aient le moindre effort à fournir tout au long de l'année. Cette conception est totalement erronée. Le processus de Téchouva ne se cantonne pas à Roch Hachana ou à Kippour. C'est un travail quotidien !

Lorsque je m'isole pour parler avec mon Créateur, une fois par jour, je fais Téchouva à ce moment-là. Cette heure de méditation solitaire (Hitbodédout) est une Téchouva quotidienne et je m'isole à Roch Hachana, à Kippour, mais aussi tous les autres jours de l'année.

C'est un peu comme un homme qui entre dans une maison et commence à tout casser : les chaises, les tables, les tableaux, la vaisselle, les appareils... Lorsqu'il finit par se calmer, il vient voir le propriétaire de la maison et lui dit : je te demande pardon pour tout ce que j'ai cassé. Voici maintenant une autre version de l'histoire : un homme entre dans une maison et commence à tout casser. Après avoir détruit tout le mobilier, il se tient devant le propriétaire et lui dit : je te demande pardon pour avoir cassé cette chaise, je te demande pardon pour avoir détruit cette table, je te demande pardon pour avoir déchiré ces livres... Quelle est la meilleure Téchouva ? Celle où on demande pardon une fois dans l'année pour toutes les fautes commises ou celle qui a lieu chaque jour, qui prend en compte chaque détail de la journée ?


Revenons à Roch Hachana et à Ouman. Qu'en est-il de la famille ? Pourquoi laisser seuls sa femme et ses enfants ?

Un jour, un de mes élèves est venu me voir en me disant que sa femme ne voulait pas qu'il aille passer Roch Hachana à Ouman. Je lui ai répondu : si elle est capable de te promettre qu'elle te sauvera, te nettoiera de tes péchés et te fera sortir méritant du Jour du Jugement, alors non seulement tu n'es pas obligé d'aller à Ouman mais moi, et tous mes élèves, viendront lui demander sa bénédiction !

Rabbi Na'hman a fait une promesse ! Et cette promesse vaut bien quelques efforts. Ne croyez pas qu'aller à Ouman est facile. On passe son temps à faire la queue : à l'aéroport Ben Gourion, à l'aéroport de Kiev, à la douane, devant les autobus, pour obtenir une chambre ou un repas, devant le Mikvé, et bien sûr devant le tombeau de Rabbénou... Il ne s'agit vraiment pas d'un séjour de loisir et détente. Et puis, croyez-vous que l'homme est heureux de quitter sa famille pour les fêtes ? Pas du tout ! Mais s'il se rend à Ouman, ce n'est pas uniquement pour sa propre personne. Il est l'émissaire de toute sa famille !

Je crois que si l'homme se comporte comme il se doit avec sa femme tout au long de l'année, qu'il la respecte, qu'il lui accorde son attention, alors elle n'aura aucun problème à le laisser partir à Ouman. Mais si l'homme se comporte comme un tyran à la maison et que soudain lui vient l'envie de se rendre sur le tombeau de Rabbénou, alors il est normal que son épouse se ''venge'' et refuse qu'il voyage...


Pourquoi le mouvement massif de retour vers la Torah ne s'accompagne-t-il pas d'un regain d'unité au sein du peuple juif ?

Si on ne comprend pas que l'essentiel de la Téchouva est entre l'homme et son prochain, alors la Téchouva est superficielle. Il faut respecter l'autre, quelles que soient ses opinions, il faut l'écouter, voir le bien qui est en lui et pas le contraire. Ce sont les Guédolim qui doivent mener ce changement d'optique. Pour ma part, j'enseigne à mes élèves à apprendre de chacun. La Torah nous enseigne : vous aimerez la vérité et le Chalom. Ce n'est que par le biais de la paix que la vérité est accessible. Si quelqu'un croit profondément dans la voie qu'il a choisie, pourquoi aurait-il peur d'écouter une autre opinion ? Mon nom est Chalom et je suis heureux de parler de Chalom !


Au-delà de la Téchouva sur ses fautes, quelle est la Téchouva d'une personne qui respecte déjà la Torah et les Mitsvot ?

Faire les Mitsvot avec joie, avec engouement, avec envie. C'est là le message-clé de Rabbi Na'hman de Breslev...