Le nom ou plus précisément le prénom n’est pas une chose anodine. Il s’agit bien plus qu’une simple appellation. Nos Sages enseignent dans le traité Brakhot (7b) : « le nom provoque ». Le nom influence le caractère de celui qui le porte. Le traité Yoma (93b) raconte comment Rabbi Meïr examinait les noms. Une fois, ce dernier, rabbi Yéhouda et rabbi Yossi entrèrent chez un aubergiste. Rabbi Meïr examina le nom du maître de maison. Lorsqu’il apprit que ce dernier s’appelait Kidor, il refusa de lui confier son argent, car ce nom est celui d’un fauteur comme il est écrit (Deutéronome 32;20) : « car c’est une race aux voies obliques… » Rabbi Yéhouda et Rabbi Yossi n’ont pas fait attention à cette interprétation et ont confié leur argent. Finalement, le maître de maison les a volés. Rabbi Yéhouda et Rabbi Yossi ont alors reconnu l’influence du nom sur la personne. 

On trouve dans les écrits du Ari zal (Cha'ar Haguilgoulim) que lorsque le père et la mère donnent un nom à leur enfant, ils ne le font pas par hasard. D.ieu les inspire. Il donne un nom en correspondance avec la nature profonde du nouveau-né. La nomination n’est pas qu’une question de goût personnel ou d’honneur familial. Elle renferme les secrets de l’âme.  

Nos Sages ont ainsi dit (Midrach Tanhouma, Haazinou) : « L’homme doit toujours examiner les noms afin de bien nommer son fils. Car le nom peut parfois engendrer du bien ou du mal. » Il faut souligner le terme « parfois ». Selon nos Sages, le nom ne s’oppose pas au libre arbitre. Il n’y a pas de déterminisme. Chacun est libre de faire le bien ou son contraire, quel que soit son nom. Seulement, le nom a parfois une influence dans le caractère ou la vie de celui qui le porte. Par exemple, une personne s’appelant Avraham sera potentiellement plus généreuse tandis qu’un Eliézer bénéficiera d’une aide divine particulière. C’est en tous les cas ce qu’écrit Rav Yossef Caro, de mémoire bénie, dans son ouvrage Maguid Mécharim. 

Est-il permis de donner des noms non-juifs ?

Le nom ayant une influence, il est évident qu’il ne faut pas donner à un enfant le nom d’un fauteur. Cela concerne-t-il les noms non-juifs ?

On trouve dans l’histoire de nombreux Tsadikim qui portaient des noms non-juifs. Le traité Guittin (11b) enseigne que la majorité des Juifs en exil portent des noms non-juifs. On trouve ainsi des Amoraïm (Sages de l’époque de la Guémara) avec des noms non-juifs comme rav Papa, rav Zvid etc. Rav Moshé Feinstein écrit à ce sujet que bien qu’il soit préférable d’utiliser des noms juifs, il n’y a aucun interdit à utiliser des noms non-juifs. Il cite en exemple des Rabbins portant ce type de noms comme l’auteur du Maguid Michné (l’un des principaux commentaires du Michné Torah du Rambam) qui s’appelait Vidal. Selon Rav Moshé Feinstein, beaucoup de noms non-juifs se sont ancrés dans le peuple d’Israël. Il ajoute que les paroles de nos Sages sur le mérite des enfants d’Israël d’avoir conservé des noms hébraïques ne s’appliquent qu’avant le Don de la Torah. Dès lors, la Torah nous distingue des autres peuples. Rav Moshé Feinstein maintient donc qu’il n’y a aucun interdit à nommer un enfant avec un nom non-juif. Il faut tout de même noter que tout le monde ne partage pas cet avis. Le Maharam Shiq (Choul’han 'Aroukh Yoré Déa 169) écrit que celui qui donne à son enfant un nom non-juif transgresse un interdit de la Torah comme il est écrit (Lévitique 20, 26) : « Je vous ai séparés d’avec les peuples pour que vous soyez à Moi. » Selon le Maharam Shiq, ce verset nous enjoint de nous distinguer des non-Juifs de toutes les façons possibles, y compris par notre nom. Selon d’autres décisionnaires, cet interdit ne concerne que la tenue vestimentaire et les coutumes. En conclusion, Rav Moshé Feinstein amène les paroles de nos Sages nous demandant de nommer un enfant selon le nom de ses pères. Ceci s’applique même si le nom est non-juif.