Une énigme hante depuis des siècles la pensée des historiens, des chercheurs, des écrivains et des intellectuels. L'Histoire s'écoule au fil du temps, le monde change, les cultures dépérissent puis disparaissent, les empires se forment, conquièrent le pouvoir, puis s'effondrent. De nouvelles nations apparaissent sur la scène de l'histoire, apportent leur contribution, puis se fondent dans la nuit des temps, influentes civilisations vite oubliées. Changements et transformations caractérisent en permanence l'histoire des nations.

Les peuples sont à l'image de l'être humain. La fin de l'homme est de mourir, c'est une règle biologique ; la fin des peuples est de s'éteindre, c'est une règle historique.

Pourtant, il est un peuple qui ne change pas, qui ne disparaît ni ne s'éteint. Sa présence est flagrante, il persiste à inscrire son nom sur n'importe quelle page de l'Histoire. Il n'est pas mortel. Il s'agit du peuple juif.

Sondez les profondeurs de l'Histoire, cherchez au fil du temps ; pouvez-vous trouver ne serait-ce qu'un autre petit peuple persécuté qui ait survécu autant de générations ? Chaque nation a prospéré, puis est venu le temps de son déclin. Chaque nation qui a brillé comme le soleil à son zénith s'est ensuite perdue dans l'obscurité de la nuit. Certaines tribus cachées dans les coins reculés du monde ont survécu, tant qu'aucune autre civilisation ne les a atteintes. Mais qu'est-il resté d'elles après qu'elles aient été exposées à des influences étrangères ? Rien ! Le peuple juif, lui, a subsisté, malgré ses nombreuses pérégrinations et le fait d'être impliqué dans la vie de nombreuses cultures, malgré les dangers, les tragédies, sa vulnérabilité face aux tentatives de destruction. Il a été battu, il a même été enterré ; mais il est ressuscité d'entre les morts, il s'est toujours relevé.

"Il est un peuple dispersé et disséminé parmi les nations", a déclaré Haman au temps de l'Empire perse. Un empire perse ? Qui s'en souvient encore ? Alors que le peuple juif humilié et exilé sans terre, sans pouvoir politique, sans État propre, a survécu et a continué à démentir les lois de l'Histoire.

L'historien Arnold Twenby, l'un des plus prestigieux historiens du XXème siècle, étudie dans son livre l'ascension et la chute de 21 civilisations, en l'occurrence les civilisations égyptienne, indienne, crétoise, sumérienne, maya, syrienne, hittite, hellénique, arabe, perse, hindoue, mexicaine, babylonienne, chrétienne orthodoxe russe et non-russe, ainsi que la culture occidentale, celles de la Chine ancienne, de l'Inde antique, du Yucatan et d'Extrême-Orient (Japon et Corée et au-delà). Mais…

"Le fait de préserver son identité de la part d'une nation sans indépendance politique, sans langue commune, sans regroupement centralisé, qui soit au contraire dispersée dans le monde, et affrontant de terribles et incessantes persécutions, est un phénomène résolument irrationnel qui laisse pantois tout historien."

Le philosophe français Jean-Paul Sartre a écrit : "Le peuple juif ne peut en aucun cas être considéré à la lumière des règles habituelles de l'histoire humaine. Le peuple juif est intemporel."

Le philosophe russe Nicolas Berdiaeff a déclaré : "Quand j'ai tenté d'utiliser l'approche matérialiste pour étudier le destin historique des peuples, elle a achoppé sur la nation juive, pour laquelle aucune explication ne vient éclairer la destinée. Selon les critères matérialistes et positivistes, cette nation aurait dû disparaître depuis longtemps de la surface du globe. Sa survie est un phénomène à la fois mystérieux et miraculeux, qui indique que l'existence de cette nation renvoie à une volonté déterminée."

L'écrivain américain Herman Wouk a dit : "Ce peuple a surmonté une incroyable succession de malheurs et de tribulations, à laquelle il est naturellement impossible de résister. Cette survie prolongée, contraire à toute logique historique, est un phénomène des plus merveilleux qui exige des explications, et dont la longévité même est assez étonnante."

Selon le Pr Georges Friedman, sociologue et historien français : "L'histoire du peuple juif n'est pas comparable à celle des autres peuples. J'ai écrit autrefois que les Juifs étaient "un accident de l'Histoire", une nation qui ne respecte pas les règles convenues de l'Histoire."

Le philosophe et mathématicien français Blaise Pascal a écrit : "J'ai trouvé dans un coin reculé de l'humanité un peuple spécial, différent de tout autre peuple du monde, et le plus vieux de tous. Un peuple dont les origines trouvent leurs racines il y a des milliers d'années de cela. Le fait que ce peuple existe encore est pour moi énigmatique, et il me semble utile et souhaitable de réfléchir à son sujet."

Voilà ce que l'écrivain américain Mark Twain a déclaré : "Les Égyptiens, les Babyloniens et les Perses ont rayonné sur la planète avec leur splendeur et leur magnificence jusqu'à leur zénith, puis ils ont disparu. Les Grecs et les Romains ont suivi, ont fait grand bruit, puis ont disparu. D'autres nations sont apparues, portant haut leur flamme pendant un certain temps, mais ils se sont brûlés à leur propre feu, et maintenant ils sont rentrés dans le rang ou ont disparu. Les Juifs les ont tous vu passer, et ils sont restés jusqu'à maintenant ce qu'ils ont toujours été. Ils n'ont pas montré de signes de déclin, ni d'infirmité due à leur grand âge, ni de diminution de leurs qualités, et de diminution de leur vigilance. Tout homme est mortel, sauf le Juif. Tous les autres peuples passent, mais lui reste. Quel est le secret de son immortalité ? "

Le professeur Samuel Ettinger, historien à l'Université hébraïque de Jérusalem, affirme : "Très nombreux ont été les Juifs et les Gentils, les amis et les ennemis du peuple juif, qui n'ont cessé de se demander, même de nos jours : "Quel est le secret de la constance, de l'existence et de la renaissance des Juifs ? Pourquoi les plus grands empires, les cultures ou civilisations des plus fortes ont-ils disparu du monde, ont été anéantis ou assimilés, les Perses dans la culture musulmane, les Grecs dans l'influence romaine byzantine ? Et cela alors que les Juifs sont restés Juifs ?" Car ils ont conscience, ainsi que leur environnement, qu'ils sont les enfants d'Avraham, d'Its'hak et de Ya’acov. La pérennité de leur existence en a fait un objet d'étonnement et d'admiration, mais aussi d'envie et de haine."

Écoutons Avraham Livni, un ancien prêtre converti au judaïsme : "Le peuple d'Israël et son existence éternelle sont un véritable "mystère" pour les Chrétiens, un casse-tête inquiétant et réel. Pendant des siècles, le christianisme a plutôt essayé de se débarrasser de ce sujet que d'essayer de le penser. Elle a utilisé tous les moyens à sa disposition pour se débarrasser de ce peuple agaçant : persécutions, massacres, culture du mépris, calomnie, et toutes formes de violence. Mais les Juifs ont survécu, et cette pérennité surnaturelle a encore donné une autre dimension à ce mystère."

Au début du XXème siècle, l'écrivain russe Léon Tolstoï a étudié ce phénomène historique inédit. Sans le savoir, il a tout simplement repris presque mot pour mot les termes de la Haggada de Pessa'h : "Le peuple juif est le symbole de l'éternité, lui que ni la corruption, ni la torture n'ont pu défaire, ni le feu, ni l'épée de l'Inquisition n'a pu faire disparaître de la surface de la Terre. Il a été le premier à déclamer les paroles de D.ieu, il a été si longtemps le Gardien de la prophétie, et il a tellement donné au reste de l'humanité. Il ne se peut qu'une telle nation se fane. Le Juif est éternel, il est le symbole de l'éternité".

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Comment D.ieu perpétue-t-Il ainsi Son peuple ? On peut le découvrir petit à petit en observant notre histoire.

Parlons de la dispersion parmi les Nations, qui parait être l'un des pires décrets. Or justement la diaspora présente cet avantage qu'il existe toujours un endroit où se refugier en cas de besoin. D'ailleurs, nos Sages l'ont bien dit : "D.ieu nous a rendu justice en nous disséminant parmi les Nations" (traité Pessa'him p. 87).

Il existe une rivière particulière au milieu de "l'océan" humain. Le plus violent ressac des impulsions humaines ne l'a jamais fait déborder, et le feu le plus intense de la cruauté humaine n'a jamais réussi à l'assécher. Et cela alors même que ses flots s'écoulent déjà depuis deux millénaires, parfois rouges du sang des Justes assassinés. La source de la rivière se confond avec le début de l'histoire du monde, sa fin se perd dans les ombres de l'éternité. Cette rivière refuse de se fondre dans les eaux environnantes. Il s'agit du peuple juif.

Certains veulent nier le facteur surnaturel de l'histoire juive, et expliquer par l'antisémitisme le fait qu'Israël ne soit pas assimilé parmi les nations. À leur avis, les Juifs auraient volontiers voulu s'assimiler, mais les Gentils ne leur auraient pas permis de le faire.

En réalité, point n'est besoin de grandes connaissances pour voir que le développement de notre peuple diffère distinctement et fondamentalement de ceux de toute l'Histoire humaine. Nos amis comme nos ennemis sont unanimes sur le sujet. Cette différence extraordinaire fait que ce peuple ne périt point, qu'il renait constamment de la poussière et des cendres, et qu'il rejaillit avec force après les coups violents qu'il subit.

Si cette pérennité est facteur d'antisémitisme, elle supprime également à l'avance toute possibilité de succès à l'idée d'anéantissement. Cependant, les antisémites ne se lassent jamais, et tentent inlassablement à chaque génération de nous détruire. Mais l'antisémitisme est impuissant, non pas parce qu'Israël dispose de soldats formés à se battre pour leur existence, mais parce que les ennemis d'Israël sont aussi les ennemis de D.ieu.

Souvent, il a pu sembler à l'observateur de l'histoire d'Israël, qu'il n'y a plus d'espoir, à D.ieu ne plaise, et que le peuple juif est dans un effondrement irrémédiable.

Mais en réalité, non seulement ces moments de faiblesse du peuple juif lui permettent de se reprendre et de refleurir, mais l'essor qui y fait suite est bien supérieur à son état préalable.

Une observation même superficielle de la vie du peuple d'Israël permet de repérer ce cycle vertueux.

Notre premier exil, l'exil égyptien, était une époque de déclin spirituel terrible, outre la dureté de l'esclavage physique. Les enfants d'Israël sont tombés jusqu'au 49ème degré d'impureté. Or, qu'est-il arrivé ensuite ? La sortie d'Égypte, le Sinaï et le don de la Torah, c'est-à-dire la plus grande ascension spirituelle que nous avons pu mériter à ce jour !

Après l'entrée en Israël, a commencé l'ère des Juges. Cette période est décrite dans le Livre des Juges : "Et les enfants d'Israël ont fait le mal aux yeux de D.ieu et ils servirent des dieux étrangers... La colère de D.ieu s'enflamma contre Israël, et Il les livra entre les mains de pilleurs qui les pillèrent, et Il les vendit à leurs ennemis aux alentours, et ils ne furent plus capables de résister à leurs ennemis... Puis D.ieu suscita des Juges qui les délivrèrent des mains de leurs déprédateurs..." (Juges II).

Les périodes de gloire et d'affaiblissement du peuple juif se sont succédées ainsi pendant toute la période du premier Temple. Le prophète Chmouel, et les rois David et Chlomo ont succédé aux fils de 'Eli, Assa au roi Re'havam, 'Hizkiyahou à A'haz et aux rois impies Ménaché et Amon. Puis, après une période de chute spirituelle continue qui a conduit à la destruction du premier Temple et à l'exil, s'est ouverte une ère nouvelle préservée de toute idolâtrie de la part d'Israël. Le deuxième Temple a d'ailleurs été détruit pour la seule raison de la haine gratuite.

Pourtant, la période du second Temple a elle-même connu des hauts et des bas : de l'hellénisme et ses tentations assimilationnistes à la dévotion des Hasmonéens pour le maintien de la Torah en Israël. Et encore une fois, tout comme la destruction du premier Temple a apporté son message, de même la destruction du second Temple est venu frapper les diverses sectes (les Sadducéens et les Esséniens), qui étaient monnaie courante en Israël à cette époque, et en a placé d'autres en dehors de la communauté juive (en l'occurrence les Chrétiens).

Ce cycle s'est poursuivi tout au long de l'exil du Second Temple et jusqu'à ce jour. Pour citer un exemple célèbre, évoquons le déclin spirituel qui a précédé l'expulsion d'Espagne. Il a été principalement causé par l'influence intellectuelle de l'époque et le fait que certains Juifs s'adonnaient à la philosophie grecque, sans discernement suffisant. Suite à cela est advenue l'expulsion, qui a déraciné une grande partie du peuple juif. Voyez comme c'est extraordinaire ! La génération suivant l'expulsion d'Espagne a elle connu une éruption spirituelle des plus merveilleuses et l'esprit de pureté et de repentance existait dans toutes les couches de la société. Ce fut la génération de Maran "Beth Yossef " et du "Choul'han 'Aroukh", du Ari Hakadoch et de ses étudiants. Les enseignements de cette génération ont nourri le peuple juif jusqu'à nos jours.

Nous ne pouvons pas ne pas mentionner ici un exemple qui nous est le plus proche de tous. Quiconque a vécu à l'époque de l'Holocauste sait que beaucoup se sont laissés gagner par le désespoir le plus profond. Comme si, à D.ieu ne plaise, le peuple juif n'allait pas se relever de cette tragédie, qu'il ne guérirait pas des coups mortels qui lui ont été porté. En effet, qui aurait pu imaginer que peu de temps après les Juifs retrouveraient la terre d'Israël et y établiraient des institutions religieuses dans la sainteté.

La "main" de D.ieu guide notre histoire, et redonne la vie à des ossements desséchés. Elle vient insuffler de nouveau la vie suite aux décrets qui frappent notre peuple.

Nous finirons ce texte par un extrait du célèbre écrivain russe Léon Tolstoï sur l'immortalité d’Israël. "Le Juif est le symbole de l'éternité. Ceux qui ont voulu le massacrer et le torturer depuis des milliers d'années n'en sont pas venus à bout, ceux qui l'ont menacé de l'épée, du feu et de l'Inquisition n'ont pas réussi à les rayer de la surface de la terre. Ce peuple a été le premier à célébrer l'existence de D.ieu, a été si longtemps en charge de la prophétie et a diffusé Sa parole dans le monde entier juif. Les Juifs existeront toujours, comme l'éternité elle-même."