Avez-vous déjà entendu ce verset dans Pirke Avot (l’Éthique des pères) qui dit : « Quel est l’homme riche ? Celui qui est content de ce qu'il a" ? Je vais vous en donner une belle illustration.

La semaine dernière, je regardais les informations et je suis tombée sur un flash spécial qui a capté mon attention : la maison d’un richissime homme d’affaires en flammes, faisait la une du journal télévisé. Les images étaient choquantes, tout son domicile s’envolait en fumée. Des flammes immenses consumaient sauvagement toutes ses possessions, sa richesse, son titre, ses honneurs. Tout ce pour quoi il avait durement travaillé lui était arraché cruellement. Sa résidence si luxueuse, si prestigieuse, qui a enivré plus d’un esprit, qui a laissé plus d’une personne rêveuse, n’était à présent qu’un tas de cendres qui disparaissait derrière un épais nuage de fumées noires et asphyxiantes.

Je ne suis pas du genre à suivre les informations, et encore moins à y prendre part émotionnellement parlant, mais là, je n’arrivais pas à détacher mes yeux de ce reportage. En fait, je regardais avec pitié la femme de cet homme d’affaires. Elle avait le visage sali par la suie et les larmes mélangées. Enveloppée dans la couverture que les pompiers lui avaient posée sur le dos, son regard était vide, elle avait l’air perdu comme un enfant abandonné.

Je me suis mise un instant à sa place. Sa vie avait basculé en quelques minutes. Elle qui était l’objet des regards envieux, elle qui n’avait jamais eu à se baisser pour ramasser sa pitance, elle qui avait toujours connu l’opulence et le no-limite, se retrouvait, du jour au lendemain, démunie de tout.

En plongeant mon regard dans son regard désemparé, j’admettais avoir été une de ces personnes qui avaient déjà émis la fameuse phrase « ça doit être quand même agréable de vivre cette vie, on ne peut pas nier que certains soucis sont évités quand on vit comme ça… ». Mais aujourd’hui, devant cette femme qui inspirait la pitié plus qu’autre chose, je revoyais mon jugement. Finalement, les possessions n’ont absolument rien à voir avec le bonheur. Aujourd’hui, j’étais plus riche que cette personne hautement fortunée, car j’appréciais ce que j’avais, même s’il s’agissait du minimum. J’étais heureuse de mes possessions, même si elles n’avaient jamais atteint des sommets, même si je n’avais jamais eu suffisamment d’argent pour mettre de côté ou me payer des extras. Aujourd’hui, je comprenais plus que jamais le verset dans Pirké Avot qui dit : “Quel est l’homme riche ? Celui qui est content de ce qu'il a."

Malheureusement, nous avons une fâcheuse tendance à idéaliser la vie des autres par rapport à la nôtre. Nous avons pour habitude de comparer notre pelouse à celle du voisin et, trop souvent, nous trouvons la sienne bien plus verte que la nôtre.

“Le mari de la voisine la gâte à chaque occasion…”, “Les enfants de ma cousine sont tellement sages et serviables…”, “Le patron de mon amie distribue les promotions et les jours de congés comme des petits pains, alors que le mien nous fait travailler des heures supplémentaires sans même nous proposer de nous les payer…”, “Mon beau-frère et ma belle-sœur sont amoureux comme au premier jour…”. Autrefois, j’étais une de ces femmes qui se plaignait avec facilité de sa vie difficile, de son manque de moyens, de l’absence d’amour et de bénédiction dans son foyer… Mais ma mère m’a toujours appris une chose très vraie que je comprends désormais : « Si tu voyais les vies de toutes ces personnes dans leur globalité, tu ne voudrais pour rien au monde du lot de l’autre. Tu choisirais tes batailles et tes manques, car ils t’ont été donnés sur mesure avec tes capacités à les surmonter. » Désormais, je comprenais que le bonheur ne dépendait pas de toutes ces possessions extérieures, je comprenais que le bonheur était, au contraire, une richesse intérieure. J’étais maîtresse de mon bien-être et je ne voulais que rien ni personne ne puisse me le retirer. Je ne voulais pas me sentir dévastée si je perdais mes maigres possessions.

Ce jour-là, je réalisai que j’étais plus fortunée que cette femme, non pas parce que je possédais une paire de tennis, certes quelque peu fatiguée, une brosse à dents, certes quelque peu usagée, et un sac à main, certes quelque peu déchiré, de plus qu’elle, mais parce que j’étais heureuse d’avoir ce que j’avais, parce que j’avais conscience que chaque objet que je possédais ne m’appartenait pas et qu’il était là uniquement pour m’aider à atteindre mes objectifs et à vivre ma vie, mais il n’était en aucun cas la cause de mon bonheur. Je ne sentais pas que mon bien-être dépendait de mes possessions et c’était une grande liberté.