Cela vous est-il déjà arrivé de prier “à la va-vite” ? Oui, vous allez me dire : presque tous les jours. Entre les enfants, les tâches ménagères, le travail et les multiples obligations, c’est déjà difficile de trouver un moment pour prier ! Et rester concentrée en plus ?! C’est mission impossible !

La Paracha de Vayikra va vous apporter un message réconfortant et surtout déculpabilisant ! Cette Paracha est consacrée tout entière à la description du service sacerdotal dans le Sanctuaire, ainsi qu’aux lois des sacrifices. Mais aujourd’hui, on n’a plus de Beth Hamikdach, alors quel message peut-on tirer de cette Paracha ?

Le mot “Korban”, que l’on traduit généralement par “sacrifice” vient de la racine קרב qui signifie rapprocher (Karov en hébreu signifie proche). Le Rav Chimchon Raphaël Hirsch explique que la personne qui amenait un Korban (une offrande) montrait qu’elle souhaitait vraiment se rapprocher d’Hachem ; et le moment-même où cette personne donnait cette offrande correspondait à un moment de grande bénédiction et de connexion avec le Divin.

Mais, depuis que le Beth Hamikdach a été détruit, c'est la prière qui a remplacé les sacrifices : “nos lèvres ont remplacé les taureaux”[1]. Et de même que le Kohen devait avoir de bonnes pensées au moment où il servait au Beth Hamikdach, nous-mêmes nous devons nous efforcer d’avoir des intentions pures au moment où nous prions, afin que nos prières soient entendues. Le Rav Its’hak Kirzner explique que le but d’une prière n’est pas de changer la volonté d’Hachem, mais de nous transformer nous-mêmes ; de devenir une personne qui a conscience que tout provient d’Hachem. La prière est un outil nous permettant de forger une relation vraie avec notre Créateur et de faire de Lui un D.ieu vivant et présent dans notre vie plutôt qu’un concept lointain abstrait.

Tout comme les femmes avaient l’obligation d’amener des sacrifices, aujourd’hui nous devons prier au minimum une fois par jour. Cela peut paraître difficile pour nous les femmes, surtout lorsque nous avons des enfants en bas âge. Comment réaliser cela de la meilleure façon possible ?

La Torah nous dit qu’une personne qui est trop pauvre pour amener un animal en sacrifice peut amener un oiseau. Si elle est trop pauvre pour amener un oiseau, elle peut amener une offrande faite de farine et d’huile. Lorsque la Torah traite de ce cas, elle dit “et quand une Néfech (âme) va offrir une offrande à Hachem” : c’est la seule fois où le terme de Néfech est utilisé. Rachi explique : “Le Saint béni soit-Il a dit : Je lui en tiens compte comme si c’est sa propre « âme » qu’il avait offerte”.[2]

Pour cette personne pauvre, qui s’est vraiment sacrifiée pour pouvoir apporter cette offrande, cette farine vaut bien plus aux yeux d’Hachem qu’un animal entier offert par un riche. C’est bien connu que, dans un cadeau, c’est l’intention qui compte, bien plus que son prix...

De même, une femme qui est “pauvre” en termes de temps et qui offre à Hachem 10 minutes par jour, c’est comme si elle offrait son âme ! Ainsi, on comprend aussi qu’il vaut mieux en dire moins mais avec plus de ferveur, plutôt que prier longuement de manière machinale[3]. Si l’on prie avec les enfants autour de nous qui nous demandent de l’attention, il y a fort à parier que notre prière sera prononcée sans ferveur (on sera plutôt en train de se dire des phrases du style : “J’espère que David ne va pas encore frapper Jonathan” ou bien “Oh non, la petite va encore tomber de sa chaise !!”).

Il vaut mieux réserver quelques courtes minutes lorsque tout est au calme : les grands sont à l’école et les petits dorment ou sont à la crèche, afin de réserver notre moment privilégié de rapprochement avec Hakadoch Baroukh Hou. Car ce qui crée la connexion avec Lui, c’est surtout notre pensée, plus que les paroles à proprement dites.

Ainsi, en ce qui concerne la prière, il vaut mieux privilégier la qualité que la quantité. Donc, pourquoi ne pas, par exemple, se lever 10 minutes plus tôt pour profiter d’un moment privilégié avec notre Créateur ? Acheter un Sidour avec une traduction pour mieux comprendre la portée des paroles que l’on prononce ? Ou bien réserver un jouet “spécial quand Maman parle avec Hachem” : une belle façon d’éduquer nos enfants à la Téfila dès leur plus jeune âge…

Même si le temps qui nous est imparti est court, il doit être riche et fort en qualité. Et cela est considéré comme si nous avions offert notre propre Néchama à Hachem.

Et si vous n’êtes pas encore convaincue par cette idée et que vous continuez de vous sentir coupable par vos prières en mode “express”, ce Midrach va illustrer cette idée de façon encore plus forte.

La première phrase de notre Paracha est “D.ieu appela Moïse”, ce qui pourrait sous-entendre qu'Il l'a appelé comme on appellerait un ami proche. En hébreu, c'est Vayikra (ויקרא). Au Har Sinaï, lorsque Moïse a écrit ce mot sur le premier Séfer Torah du monde, dicté par la voix de D.ieu en personne, il s’est senti un peu mal à l’aise : “Tout le monde va croire qu’Hachem et moi sommes proches comme des amis !”. Alors, pour combler ce malaise, il a dessiné un tout petit Alef, comme pour dire au monde entier : “Ne croyez pas que je suis quelqu’un de grand qui mérite d’être intimement proche d’Hachem, je suis petit comme ce Alef !”. Ce qu'il faut savoir, c'est qu’Hachem lui avait donné la quantité exacte d’encre pour pouvoir écrire ce Séfer Torah. Donc, du fait que la lettre Alef était plus petite que la taille prévue, il restait un tout petit surplus d’encre. Et Moché a pris de cette encre et l’a étalée par inadvertance sur son front. Et depuis ce jour, grâce à cette goutte d’encre divine déposée sur son front, Moché rayonnait ! La Torah dit que le visage de Moché était si brillant de sainteté que personne ne pouvait en soutenir l'éclat. Il devait donc porter un voile chaque fois qu'il s'adressait au peuple pour atténuer cette lumière divine[4].

Ainsi, nos courtes prières, à l’instar de ce petit Alef, sont celles qui font rayonner notre lumière intérieure. C'est vrai, nous avons parfois la même réaction que Moché Rabbénou : “Moi ? Proche d’Hachem ?! Mais je ne prie que quelques minutes par jour !”, et pourtant, ces brefs instants, pourtant si intenses, consistent à permettre à D.ieu de pénétrer dans nos vies. Comme ce petit Alef qui a permis au visage de Moché de rayonner d'une lumière divine, ce sont nos courtes prières qui permettent à notre âme divine intérieure de réaliser son rayonnement dans le monde.

Inspiré de Parsha in Pink de Mindy Bodner-Lankry



[1] Hochea (14,3)

[2] Vayikra (2,1)

[3] Choulhan Aroukh (1,4)

[4] Chemot (34, 29-35)