Chaque élection est une occasion pour le citoyen de s’interroger sur ce qui compte vraiment pour lui. Pour les uns, ce sont les droits sociaux. Pour d’autres, la sécurité prime. Pour certains, le réchauffement climatique et le devenir de la planète sont les points critiques des prochaines années.

Il va sans dire que toutes ces préoccupations sont réelles et majeures. Mais en Israël, il existe aussi des partis religieux dont l’objectif est de faire passer le respect de la Torah avant tout.

On peut s’interroger sur l'origine de ces partis politiques religieux orthodoxes. Il est vrai qu'à l'origine, justement, les dirigeants du peuple juif étaient des dirigeants religieux. On peut citer Moché (Moïse) qui a fait sortir les Hébreux d’Égypte, Yéhochou’a (Josué) qui les a fait rentrer en Terre d'Israël, les Juges comme Chmouel (Samuel), ou les Rois comme David.

Cela a continué même après la destruction du second Temple, lorsque le peuple juif, en exil, était dirigé par des Princes - Nassi en Israël ou Reich Galouta en Babylonie - descendants de la dynastie royale davidique.

Puis, peu à peu, le peuple juif s’est éparpillé parmi les nations. De fait, il a été contraint de se concentrer sur la vie religieuse, mais aussi et surtout sur sa propre survie.

Ce n’est que récemment, en 1885, que le rav Chimchon Raphaël Hirsch fonde l’Union des Orthodoxes en Allemagne. Son but est avant tout de protéger les Juifs pratiquants du vent d’assimilation venant de la Haskala, les Lumières juives.

Peu de temps après, en 1897, est créée l’Organisation Sioniste. Ses forces vives proviennent essentiellement des courants non-religieux du peuple juif. Le besoin d’une organisation religieuse se fait alors sentir afin de contrebalancer une influence laïque grandissante au sein du peuple juif.

Cependant les prémices d’un véritable parti politique orthodoxe ne voient le jour qu’en 1912. Les dirigeants spirituels du judaïsme européen fondent alors la Agoudat Israël. Le but de cette association est “d’apporter des solutions à toute question qui se pose pour le peuple juif, selon l’esprit de la Torah et des commandements”. 

C’est alors que se constitue l’Assemblée des Sages de la Torah, dont la mission est de définir les directives nécessaires au fonctionnement de la Agoudat Israël. Parmi ses membres les plus célèbres, citons  le ‘Hafets ‘Haïm, Rav ‘Haïm ‘Ozer Grodzinski, l’Admour de Gour, le Rabbi Rachab de Loubavitch, Rabbi ‘Haïm Soloveitchik de Brisk ou le Grand-Rabbin de Jérusalem Rav Yossef ‘Haïm Zonnenfeld. C’est d’ailleurs sous l'impulsion de ce dernier que sera établie une branche de la Agoudat Israel dans le Yichouv (peuplement) juif, en Terre d'Israël.

D’ailleurs peu de temps avant la proclamation de l'État d'Israël, en 1948, la Agoudat Israël se montre plus favorable à l’idée d’un État juif en Terre d’Israël. Ses dirigeants lancent même un appel aux jeunes de participer à la guerre d'indépendance. En contrepartie, l'armée doit s’engager à remplir 5 conditions : pas d'enrôlement obligatoire des jeunes femmes, exemption des étudiants en Yéchiva, nourriture servie strictement Cachère, aucun entraînement durant le Chabbath ou les fêtes, mise en place d'unités religieuses.

C’est à ce moment-là que le futur premier ministre David Ben Gourion envoie une lettre mettant en place ce qui deviendra le Status Quo. C'est-à-dire les règles informelles définissant l'équilibre entre le religieux et la laïcité au sein du pays.

C’est alors que la Agoudat Israel prend la forme d’un vrai parti politique. Ainsi lors des premières élections législatives, en 1949, elle se présente au sein de la liste Front religieux uni, avec le Mizra’hi, parti religieux sioniste. Puis en 1951, la Agoudat Israël adopte une organisation interne typique d’un parti politique. Les quatre principaux courants du judaïsme orthodoxes y sont représentés : ‘Hassidout (surtout Gour et Vishnitz), Ashkénazes lituaniens, Sépharades et le courant dit de Jérusalem.

Plus tard, en 1984, est fondé le parti politique Shas, sous l’impulsion du dirigeant Ashkénaze Rav El’azar Mena'hem Chakh. Son but est de mieux représenter les intérêts des orthodoxes d’origine sépharade. Shas, abréviation d’Union Internationale des Sépharades Observants la Torah, prend forme sous la direction spirituelle du Rav 'Ovadia Yossef.

Quatre ans plus tard, en 1988, c’est au tour du Rav Chakh de fonder un parti pour mieux représenter les intérêts du public ashkénaze lituanien, le Déguel Hatorah (Drapeau de la Torah). Même si depuis 1992, ce parti s’est présenté aux élections conjointement avec la Agoudat Israel, sous une liste commune appelée “Yahadout Hatorah” (Judaïsme de la Torah).

Hormis une origine commune, ces différents partis ont su préserver un autre point commun. Ils affichent tous le double objectif de préserver un judaïsme authentique et de conserver le caractère juif de l’Etat d'Israël.  Et aujourd’hui toujours, les députés orthodoxes à la Knesset (parlement) israélienne se réfèrent à l’avis des grands d’Israël comme Rav Guershon Edelstein ou Rav Shimon Ba’adani.