« Assemble le peuple – les hommes, les femmes et les jeunes enfants et ton étranger qui est dans tes portes – afin qu’ils entendent et afin qu’ils apprennent et qu’ils craignent Hachem, votre D.ieu ; ils prendront garde de faire toutes les paroles de cette Torah. » (Dévarim 31,12)

Tous les sept ans, l’ensemble de la nation avait l’obligation de se rendre au Beth Hamikdach pour écouter le roi lire toute la Torah. La présence des tout petits enfants était aussi exigée, bien qu’ils fussent trop jeunes pour comprendre ce qui se passait et ce qui était lu. Rachi écrit que cette Mitsva avait pour but de récompenser ceux qui amenaient les bébés. Mais si l’on ne tirait aucun bénéfice à ce qu’ils soient présents, pourquoi méritait-on une récompense ?

Rav Yérou’ham Levovits explique quel était ce bénéfice. Bien que les petits enfants fussent trop jeunes pour saisir ce qui se passait, inconsciemment, ils étaient influencés par cet événement spirituel tellement important. Il le prouve par l’histoire de Rabbi Yéhochou'a ben ’Hanania. La Michna dans Pirké Avot raconte que Rabbi Yo’hanan ben Zakaï fit l’éloge de ses illustres disciples. À propos Rabbi Yéhochou'a ben ’Hanania, il déclara : « Achré Yoladto » — celle qui lui donna naissance est digne de louanges.[1]

La Barténoura, dans sa deuxième interprétation sur cette partie de la Michna, affirme que Rabbi Yo’hanan voulait faire l’éloge de la mère de Rabbi Yéhochou'a quant à sa façon de l’élever. Il rapporte le Talmud Yérouchalmi[2] relatant que durant sa grossesse, elle se rendait dans toutes les maisons d’étude de la ville et demandait aux érudits en Torah de prier pour que son bébé devienne un Talmid ’Hakham. De plus, dès le jour de sa naissance, elle ne retira jamais son berceau de la maison d’étude, afin que seuls des mots de Torah pénètrent dans ses oreilles. Quel effet positif cela peut-il avoir sur un bébé qui ne comprend pas un mot de ce qu’il entend ? Le Kédouchat Tsion[3] explique qu’en entendant la voix de la Torah, la sainteté de la Torah s’incrusta dans son âme même s’il n’en saisissait pas le sens. Cela fit une telle impression sur lui qu’il put, par la suite, devenir un érudit en Torah d’une telle envergure.

C’est ainsi que l’on peut expliquer le bénéfice d’amener les jeunes enfants à Hakel – le fait d’entendre la Torah et d’être dans un environnement imprégné de Yirat Chamaïm faisait grande impression sur l’âme de l’enfant et avait un bénéfice sur le long terme.

La Mitsva de Hakel nous enseigne également l’importance fondamentale du rôle des parents dans l’éducation de leur enfant, de lui donner une chance de devenir un grand érudit. Les parents devaient supporter la difficulté du long voyage avec leurs jeunes enfants jusqu’au Beth Hamikdach. Cette détermination, cette résolution à traverser cette épreuve pour s’assurer que l’enfant grandisse dans les conditions spirituelles optimales est essentielle tout au long de sa jeunesse. Il ne suffit pas de lui donner une éducation juive et de compter sur l’école pour donner inculquer les connaissances en Torah nécessaires. Il faut être prêt à fournir de grands efforts pour donner à l’enfant toutes les chances de grandir dans le domaine de la Torah.

On raconte l’histoire d’une femme qui vivait dans une extrême pauvreté en Europe. Elle avait à peine de quoi nourrir ses enfants, mais était déterminée à donner à son fils la meilleure éducation en Torah. À cette époque, les cours étaient particuliers, l’enseignement s’effectuait individuellement et non dans une classe de plusieurs élèves. Elle dépensa donc une grande partie de ses revenus pour l’éducation de son fils. Un jour, n’ayant plus de quoi payer le professeur, elle décida de faire un acte très spécial. Les hivers en Europe étaient particulièrement rudes et le seul moyen de chauffer la maison était le four. Elle vendit son four et souffrit du froid, pour pouvoir continuer à financer l’étude de son fils. Cet enfant devint par la suite le fameux Ridbaz, un grand érudit, et l’auteur d’un commentaire sur le Talmud Yérouchalmi. Lui-même racontait souvent son histoire, soulignant le mérite de sa mère dans son incroyable sagesse.

Cette Messirout Néfech nous dépasse, mais elle nous donne une idée de ce à quoi il faudrait aspirer pour éduquer nos enfants à la Yirat Chamaïm (crainte du Ciel) et pour que nos fils deviennent des Talmidé ’Hakhamim. Par exemple, la scolarité de nos enfants coûte peut-être plus cher quand ils sont placés dans des institutions conformes à l’esprit de Torah, mais si l’on réalise que leur Avodat Hachem (service divin) est plus importante que tout, il nous sera plus facile de payer ces sommes ; ce ne sera pas perçu comme un fardeau, mais comme un excellent investissement.

La Mitsva de Hakel nous enseigne la nécessité de faire de gros efforts et de consacrer beaucoup de temps pour nos enfants, dès leur naissance et tout au long de leur vie.

 

[1] Peut se traduire littéralement « Heureuse est celle qui lui donna naissance ».

[2] Yébamot 1,6.

[3] Le Rabbi de Babov, rapporté dans Darké Avot, 1er vol., p. 279.