La paracha Metsora énumère les diverses formes d’affliction de la tsaraat, la lèpre[1]. Après avoir évoqué celle qui touche le corps, la Thora parle d’une forme de lèpre qui peut apparaître sur les habitations ; les versets décrivent le processus pénible de purification. Il fallait, entre autres, sortir toutes les possessions du domicile, pour éviter qu’elles ne soient contaminées, et retirer les pierres de mur touchées.

Hazal proposent deux explications qui semblent contradictoires concernant la raison de l’apparition de la tsaraat sur la maison de l’individu. Rachi rapporte le midrach qui nous raconte le côté avantageux de découvrir des tâches de lèpres sur les murs de sa demeure ; les Amorréens avaient caché, quand ils vivaient en Canaan, leurs objets précieux dans les murs des maisons, afin que les Bné Israël ne puissent en profiter. Les Juifs n’avaient logiquement aucun moyen de pouvoir trouver ces trésors. C’est pourquoi Hachem plaça les points de lèpre sur les parties de cloisons qui camouflaient ces trésors, afin que ces pierres soient retirées et que la fortune soit dévoilée[2]. Cette explication suppose que la tsaraat sur les habitations n’était pas une sanction, mais un moyen d’enrichir grandement le peuple juif.

D’autre part, la guemara dans Arakhin énonce explicitement que la lèpre sur les murs des maisons était une punition de la faute de tsarout ayin (l’avarice)[3]. La guemara dans Yoma donne l’exemple d’un tel comportement chez une personne qui ne voulait pas prêter ses biens aux autres et qui niait donc posséder les objets que les gens voulaient lui emprunter. Par la suite, sa maison fut touchée par la lèpre et il dut tout mettre à l’extérieur. Tout le monde put alors voir qu’il possédait en réalité ces biens[4]. Ces guemarot indiquent clairement que la tsaraat sur les maisons venait condamner certaines fautes.

Comment résoudre la contradiction entre ces maamaré ‘Hazal (paroles de nos Sages) ? D’après l’avis rapporté par Rachi, s’ils méritaient le trésor en récompense, pourquoi devaient-ils souffrir des difficultés causées par la lèpre qui frappait leur lieu de résidence ? Et selon les guemarot rapportées, s’ils méritaient d’être punis, pourquoi en tiraient-ils un bénéfice, celui de trouver les trésors cachés à l’intérieur de leurs murs ?!

Rav Moché Feinstein zatsal répond en expliquant que la personne touchée par la lèpre sur les murs de sa maison méritait certainement les deux éléments : la punition ainsi que le profit qui résultait de cette affliction. S’il n’avait pas commis cette faute, Hachem lui aurait octroyé l’argent mérité d’une autre manière, plus agréable. Et s’il n’était pas digne de trouver les trésors cachés des Amorréens, alors pourquoi la tsaraat sur ses murs lui permit-elle de les trouver ? Ainsi la personne dont la maison était touchée par la lèpre et qui découvrait de grandes richesses cachées dans les murs devait considérer les deux aspects de la Hachga’ha (Providence Divine). D’une part, elle devait se réjouir du bienfait d’Hachem Qui venait de lui faire acquérir une nouvelle richesse, mais elle doit en même temps faire techouva et ne pas se laisser distraire par cette bonne nouvelle.[5]

Ajoutons que la nature de la récompense est liée à la faute commise. L’individu coupable de mesquinerie eut recours à des tactiques malhonnêtes pour protéger sa richesse. Son erreur fut de vouloir conserver sa propriété bedérekh hatéva – il se fia aux lois de la nature et au bon sens qui veut que la pratique de la charité ou le fait de prêter un objet entraîne une diminution des biens. Il croit que le fait de lésiner va protéger sa fortune. Par conséquent, il est puni en souffrant d’une perte financière (le dommage engendré sur son domicile) et d’une grande gêne quand tout le monde saura qu’il s’agit d’un homme malhonnête qui évite de céder temporairement ses affaires.

Par ailleurs, le fait de trouver le trésor caché lui enseigne également une leçon concernant son attitude erronée. Il pensait devoir avoir recours à des méthodes sournoises pour s’enrichir, mais la Thora montre qu’Hachem peut prodiguer à l’homme des richesses de diverses façons.[6] Ainsi, cette personne trouvera de l’argent à l’endroit le plus improbable — à l’intérieur des murs de sa propre maison ! Tout en retirant un avantage, elle apprend qu’elle ne doit pas dépenser trop d’énergie à acquérir des biens, mais plutôt reconnaître qu’Hachem peut lui fournir tout ce dont elle a besoin.

Deux enseignements importants peuvent être tirés du développement ci-dessus. Tout d’abord, nous voyons qu’Hachem peut, dans Sa sagesse infinie, récompenser et « sanctionner » quelqu’un simultanément. Le fait d’infliger une punition, d’après la Thora, ne consiste pas à causer une souffrance sans raison. Les « punitions » divines sont des « stratégies » par lesquelles Hachem communique avec nous et nous exhorte, de manière allusive, à changer de comportement dans certains domaines. Ainsi, même quand nous apprenons de bonnes nouvelles, il est sage de discerner les aspects négatifs qui s’y cachent et de se demander s’il n’y a pas de message sous-jacent à la récompense, comme ce fut le cas de la tsaraat sur les maisons.

Autre message, qui s’applique plus spécifiquement à notre désir d’acquérir des biens et de l’argent ; la tsaraat sur les murs des habitations nous montre que trop de hichtadlout (efforts personnels) investie dans la matérialité est inutile. C’est d’autant plus le cas quand on adopte un comportement radin ou malhonnête.

Il nous faut réaliser que «  arbé chelou’him laMakom » — Hachem peut nous procurer tout ce dont on a besoin, de la façon la plus originale, même en nous faisant découvrir des trésors dans les murs de nos maisons !



[1] Vayikra, 14:34.

[2] Rachi, Vayikra, 14:34, au nom de Thorat Kohanim, 5:4.

[3] Arakhin, 16a.

[4] Yoma, 11b.

[5] Darach Moché, Parachat Metsora, 14:34. Voir aussi Ayéleth Hacha’har, Parachat Metsora, 14:34 qui tire une conclusion très similaire à celle de rav Feinstein.

[6] Hachem a de nombreux “messagers” qui peuvent exécuter Sa volonté (en l’occurrence, enrichir la personne).